Son histoire
par Henri Wallon
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Le procès en nullité de la condamnation
VII - Motifs de droit présentés par Isabelle, Pierre et Jean d'Arc
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ur toute chose est victorieuse la vérité ! Très honorables pères et juges très distingués, accomplissant vos fonctionsà la place et par l'autorité suprême du saint Siège apostolique,
vous savez que l'amie de la vérité c'est la simplicité, que
l'adhésion à la vérité n'a pas besoin du secours des mots,
comme au chapitre Veritatis de De jurejurando [Xa II.24.14],
et au Code, Si minor ab hereditate abstineat, 1. I [C. II.39.1].
La brillante splendeur de vos lumières sait aussi d'expérience
par quels sentiers on atteint la vérité ; donc, ayant examiné
souvent non seulement les actes, mais aussi les circonstances
et les aspects des choses, la cause, le temps, la volonté et
les caractères des personnes, et ayant recherché avec la plus
grande diligence tous les avis divers, dont traite le canon
Occidit, cause XXIII, qu. VII [D. G. n.23.8.14], le canon Judicantem,
cause XXX, qu. v [D. G. II.30.5.11], et Code De judiciis,
Judices [C. III.1.9], comme ces jugements sont vôtres,
ils auront une grande utilité et produiront souvent une justice sûre pour le salut public et une vérité inébranlable.
Aussi la rectitude très lucide de votre sagesse connue partout, conforme aux aspirations du saint Siège apostolique,
est reconnue et préférée aux autres par le ministre suprême
de la justice, le pape Nicolas, cinquième du nom, notre seigneur, aux fins d'exercer un ministère de justice et de vérité
en cette cause, clairement, c'est-à-dire pour la réputation de
la précieuse défunte Jeanne d'Arc, dite la Pucelle, envoyée
au dernier supplice après beaucoup de procédures et de sentences téméraires et iniques, faites contre les règles du droit,
et faussement accusée pour une question de foi. Agissent
donc en cette affaire, avec votre promoteur, la mère, les
frères et les parents de ladite défunte, demandeurs, contre
feu Pierre Cauchon, évêque de Beauvais, Jean Estivet dit
Benedicite, procureur fiscal ou promoteur des affaires et des
causes criminelles à la cour spirituelle de Beauvais, et Jean Le
Maistre, vice-inquisiteur de la perversité hérétique au même
diocèse, accusés, et les autres parties adverses indiquées en
ce procès ; les demandeurs désirent, demandent humblement
et supplient qu'après les incidents habituels de cette procédure, et en observant les règles et les délais juridiques, une
fin soit donnée à la cause, que la vérité soit mise en lumière,
que par votre sentence définitive soit décidé ce qui est juste,
et que les conclusions des demandeurs inscrites dans leurs
articles principaux soient totalement admises. Or, pour
accomplir cela, et afin que vos remarquables dignités puissent en suivant la justice être plus facilement favorables, lesdits demandeurs, persistant dans leurs affirmations, offrent,
sous la forme de raisons de droit et en conclusion de ce qui a été produit en cette affaire, les motifs et raisons qui suivent.
Il faut d'abord savoir que ce procès apostolique, fait par
vous, a tiré son origine de règles juridiques sûres ; et il estévident que dès le début votre justice a eu comme fondement
la coutume et les règles canoniques, que vous avez été, et
que vous êtes, les juges compétents ; pour cela il faut considérer le mandement apostolique venant de la conscience du
souverain pontife en forme de justice, adressé non sans raison à vos insignes providences, présenté avec toute la solennité
convenable en public, devant une assistance de clergé et de
peuple, en public à Paris, dans la grande salle de l'évêché,
le septième jour du mois de décembre, l'an du Seigneur mille
quatre cent cinquante-cinq, et reçu avec grande révérence
et honneur, en considération de ce suprême saint Siège apostolique. Là, après une très pieuse et claire supplique des
demandeurs par l'organe de leur conseil, après une sérieuse
délibération préalable pour un examen très équitable d'une
affaire si importante, et la charge de juge une fois acceptée
par vous, une citation en la forme juridique fut délivrée
suivant vos ordres, des notaires furent institués, votre promoteur fut désigné, comme le montrent les actes judiciaires.
De même dans cette présentation et réception, et dans la
délivrance de la citation en justice, on estime que les formes
juridiques ont été observées régulièrement. Le mandement
apostolique en effet a été présenté solennellement par les
demandeurs voulant satisfaction, en présence des notaires
et avec un grand accompagnement de gens, à une heure
convenable et fixée pour cela, comme dans le chapitre Consultât, De officio delegati [Xa I.29.24] ; dans un lieu connu et
en présence de vous, délégués, siégeant en tribunal, comme
dans la cause II, question 6, canon Biduum [D. G. II.2.6.29]
et comme l'enseigne le Spéculateur dans le Speculum, au
titre De competentis judicis aditione, § Viso cujus judicium ; et
devant vous les demandeurs expliquèrent avec révérence,
par leur conseil, les faits exposés dans le mandement apostolique, c'est-à-dire leur plainte très pieuse. De cet exposé
ressortait sans feinte la naissance d'un droit, comme au
Digeste sur la loi Aquilia, Si ex plagis § In clivo [Dig. IX.
2.52.2] ; et au chapitre De muliere desponsata impube, et
dans les droits allégués au même endroit par le Spéculateur ;
mais ensuite le mandement susdit a été reçu avec révérence
par vos paternités, les demandeurs entendus, et acceptés
sans réserve, en présence des notaires, suivant le chapitre
Quoniam contra, De probatione [Xa II.19.11] ; et le joug de
cette délégation de justice, bien que difficile, fut accepté cependant par charité, comme méritoire et digne de faveur.
Alors fut aussi décidée la citation, à exécuter par écrit, des
parties adverses, comme dans le canon Vocatio de la cause
V. Q. 2 [D. G. II.5.2.1], avec publication préalable, car une
tâche ardue menaçait cette cause, comme dans le chapitre
Romana, De foro competenti § Contrahentes [VIo II.2.1] et
comme l'indique Innocent au chapitre Licet, De accusationibus
[Xa V.1.14].
De même on ne doit pas omettre que dans le procès en
matière de foi ou de soupçon d'hérésie, faussement engagé
par les parties adverses contre ladite Jeanne d'Arc, défunte,
aurait dû précéder juridiquement l'infamie, et l'enquête
sur l'infamie aurait alors dû être faite contre elle au début
de son procès ; or elle n'a pas été faite, au moins de manière
valide, mais volontairement et par dol elle fut omise. Cependant comme « toute chose, quelles que soient les causes qui
la font naître, disparaît par les même causes » suivant le
chapitre Omnis res, De regulis juris [Xa V.41.1], vous n'avez
pas voulu, juges insignes et célèbres, omettre les enquêtes
valides, préparatoires à ce procès qui est le vôtre, ainsi que
leurs preuves très claires ; mais vous avez repris dès le début
celles-ci, rédigées en documents authentiques et faites en vertu
de l'autorité apostolique par révérendissime seigneur le cardinal d'Estouteville, et, de sa propre autorité, par la majesté
royale ; elles furent faites antérieurement avec solennité, en
cette affaire, au lieu de l'origine [de Jeanne] et ailleurs en des
lieux remarquables, avec les dépositions de hauts princes et
de personnes éminentes, sur la vie, la réputation, les moeurs,
les vertus, la foi très sûre, le comportement honnête et l'arrivée de cette Jeanne ; et vous avez voulu, vénérables juges,
les rassembler et les placer en tête de votre travail, par
grande prévoyance.
De même, et parce que le début de chaque chose est la
partie principale, comme au chapitre Sedes, De rescriptis
[Xa I.3.15], par Bernard, et au Digeste, De origine juris, dans
la loi première [Dig. I.2], il faut remarquer la bonne exécution de la citation aux parties adverses, en des lieux divers, villes et églises insignes de Rouen et de Beauvais, faite aux
personnes et à leurs domiciles officiellement, réitérée en outre
plusieurs fois, les citations étant multipliées suivant l'exigence
des règles judiciaires, et mandées à exécution par un affichage
public, avec notification très apparente par des édits patents ;
ainsi, grâce à cela, toute personne honorable put avoir une
connaissance notoire et évidente, et il n'est resté personne
qui pût invoquer une ignorance justifiée de ce procès, qui
est le vôtre, de quelque manière que ce soit, si ce n'est par paresse
et négligence, comme on le voit manifestement par les instruments fidèles de ces citations et édits et par les documents
publics ; à ceux-là on doit prêter foi, au chapitre Scripturam,
De fide instrumentorum [Xa II.22.1], avec sa glose.
De même par les actes publics de votre procès apparaît
plus clair que la lumière ce qui s'est passé dans la cité de
Rouen, lieu très remarquable, où le premier procès inique
fut mené de manière dolosive et injuste contre la défunte.
A plusieurs reprises vous, ou certains de vous, êtes venus
personnellement pour siéger en tribunal, et vous avez observé
comme il se doit tous les délais qu'impose l'ordre de la justice ;
et les parties adverses étant accusées de dols, de contumaces,
de présomption téméraire dans leur ancien procès, entaché
de fausseté, iniquité et nullité évidentes, après chaque délai
vous avez ordonné ce qui était de droit, une fois entendus
cependant les demandeurs et votre promoteur. Vous avez
en effet décidé, dès le début par une déclaration, que votre
juridiction était bien fondée, que vous étiez les juges compétents de la cause pour les parties, et vous avez déclaré en
outre avec raison que vous continueriez la procédure. Ensuite
vous avez décidé que la demande des plaignants vous fût
présentée en forme d'acte public, et que les parties fussent
de nouveau appelées pour la litiscontestation. Cela fait,
vous avez reçu, par une autre de vos décisions, cette demande
en la forme de conclusions par articles. Puis vous avez pris
soin de procéder à l'audition des témoins, à la réception des
preuves, à la production de ce procès prétendu faux, à la
comparaison légitime des déclarations de la défunte avec les douze articles, que les parties adverses prétendirent
faussement avoir été extraits comme il se devait des déclarations de la défunte ; enfin vous avez accepté, après considération juste et sainte, les dépositions véridiques faites
par des témoins insignes et ne souffrant aucune réserve, les
enquêtes produites à nouveau par les autorités apostolique et
royale, les traités admirables de lumière et de sagesse, les
délibérations, les écritures, les livres, les livrets des prélats,
des docteurs fameux en droit divin comme en droit humain,
et des hommes instruits, toutes choses qui sont de droit dans
la présente cause, surtout à propos des déclarations catholiques
de ladite défunte, des visions d'esprits bons, et de l'iniquité
des juges dans le précédent procès.
De même l'adjonction de votre promoteur étant réalisée
par votre sentence soit ordonnance judiciaire, vous avez
ensuite fixé de nombreux jours et délais aux fins de dire contre
les présentations et productions, et vous avez reporté la
forclusion aux fins de dire, suivant le droit ; enfin toutes et
chacune des choses devant être observées, selon le droit
commun et d'après le récit apostolique qui vous a été adressé,
l'ayant été, dans la cause par vous juridiquement conclue
vous avez justement donné un jour d'assignation, pour
entendre prononcer le droit et votre sentence définitive ; en
précisant cependant que les demandeurs, s'ils le voulaient,
pour votre entendement et pour une meilleure mise en lumière
de la vérité, pourraient présenter à vos révérendissimes paternités les raisons et motifs de droit, afin qu'ils fussent joints
au procès. Obéissant à vos ordres, les demandeurs ont présenté humblement ces écrits, avec la révérence et les amendements qui s'imposent, implorant fort humblement de votre
office de juge que vous prononciez la sentence, avec les protestations susdites.
De même l'ordre judiciaire pour les actes mentionnés et
chacun des délais est incontestable : d'abord suivant des
règles claires, très connues de vous, canoniques ou civiles,
et aussi suivant les écrits de Tancrède dans son traité De ordine
judiciorum, et du Spéculateur en son second livre du Speculum juris, et surtout d'après les textes et les docteurs
des droits canonique et civil, en leurs écrits désignés aux
endroits et rubriques convenables et apparentes ; ensuite
d'après l'observance ou la pratique [judiciaire], qui enseigne
toute chose, surtout dans les cours ecclésiastiques, quand
elle a été reconnue notoire et approuvée partout. C'est pourquoi, ni les allégations des droits, ni les indications particulières, qui seraient trop longues dans un délai observé de
toute manière, ne sont avancées ici, ni répétées. Et d'ailleurs
ont paru suffire convenablement les droits qui ont été insérés
et allégués en entier dans votre procès, tout au long des
articles de conclusion des demandeurs, séparément, aux
fins de justifier les prétentions et de condamner le procès
faux et inique des parties adverses.
De même et néanmoins pour que l'iniquité du premier
procès revienne plus vite en mémoire, que la présomption
téméraire de ceux qui jugèrent si sottement soit dissipée
et corrigée, il faut considérer comment ils procédèrent de
manière inique et injuste, avec nullité et sans droit : avec
quelle méchanceté calculée, avec quelle haine damnable et
détestable ces juges malveillants agirent contre la défunte,
rejetant toute pitié, ne prêtant aucune attention à toute la
faiblesse féminine, en méprisant toute appréciation des
circonstances, dont traite le canon Occidit, cause XXIII
qu. 8 et la Somme (D. G. II.23.8.14).
De même, et d'abord, on doit considérer l'audace présomptueuse de ces prétendus juges, qui osèrent avec une telle
témérité accepter une telle charge judiciaire, alors qu'ils
ne pouvaient ni ne devaient devenir, selon les règles du droit,
juges de la défunte, surtout en matière de foi ; ainsi leurs
procès, avec la sentence et ses suites, étaient tenus comme
entachés de nullité ; au Code, Si a non competenti judice
[C. 7.48] en entier ; au chapitre Ad nostram, De consuetudine
[Xa I.4.3]. En effet cette Jeanne n'était pas née au diocèse
de Beauvais, ni elle n'y résidait, ni elle n'y avait commis le
crime d'hérésie ; et ainsi la compétence n'était pas obtenue
en raison du domicile ou du délit : cause III, qu. 6 ; cause VI qu. 3 [D. G. II.3.6. et 6.3] ; chapitre Placuit et dernier
chapitre De foro competenti [D. G. II.6.3.4 et Xa II.2.20]. En
outre l'évêque de Beauvais avait décidé de procéder avec le
vice-inquisiteur, et cependant le pouvoir de ce vice-inquisiteur, qui prétendait être délégué, n'est pas établi par un
acte, et il n'y en a nulle trace dans le procès ; en sens contraire
chapitre Per hoc, De hereticis, livre du Sexte [VI° V.2.17],
chapitre Cum in jure, De officio delegati [Xa I.29.31]. Bien
plus cet évêque a procédé sans le vice-inquisiteur à plusieurs
actes essentiels ; en sens contraire chapitre Cum plures,
De officio delegati aut commissarii, livre du Sexte [VI° I.14.8],
En outre ils procédèrent plusieurs fois en faisant interroger
Jeanne par d'autres, ce qu'ils n'auraient pas dû faire dans
une affaire aussi grave : De officio delegati, chapitre I dans les
Clémentines [Clem. I.8]. Il est établi en outre par témoins
qu'à ce vice-inquisiteur et aux autres conseillers furent
adressées des menaces terribles, capables d'inspirer une
juste crainte, conformément à la glose du canon Injustum
et du canon Quatuor, cause XI, qu. 3 [D. G. II.11.3.89 et 78].
Jeanne elle-même en effet récusa ledit évêque, comme suspect
et son ennemi mortel, à ce que disent les témoins, suivant le
chapitre Suspicionis, De officio delegati [Xa I.29.39]. De même
Jeanne se soumit au jugement du pape, faisant effectivement
appel ; et ainsi il n'était pas permis au juge inférieur d'en
connaître : cause II qu. 6, canon Si quis vestrum [D. G. II.2.6.4].
Et même, comme cette question des révélations faisait
partie des causes majeures, la connaissance en appartenait
au pape seul, auquel Jeanne requit que la cause fût remise.
Donc ils procédèrent de manière nulle, comme au chapitre
Majores, De baptismo [Xa III.42.3]. En outre on refusa à
cette Jeanne, détenue dans une dure prison, défenseur et
conseil, à savoir refus que les articles fussent examinés par
l'Église alors rassemblée à Bâle ; et les juges interdirent aux
notaires d'inscrire au procès ses justifications. Ajoutons les
faux extraits des articles tirés des dépositions de Jeanne,
donnés aux opinants, la persécution et la complication des
questions difficiles, enfin les suggestions dolosives de ceux qui la conseillèrent pour la tromper. Cela en effet, et beaucoup
d'autres points mentionnés plus haut, développés plus
longuement dans les articles de conclusion, rendent le procès
mené contre Jeanne, avec ses suites, entaché de nullité, ou
du moins font qu'il doit être cassé et repris.
De même ces juges n'avaient pas compétence, sinon de
manière nulle et sans droit, en matière d'inspirations et de
révélations occultes, ni ne pouvaient prononcer un jugement
valable sur les apparitions d'esprits concernant Jeanne. En
effet pour ces apparitions occultes et les inspirations, savoir
si elles viennent de Dieu ou non relève et est connu de Dieu
seul, qui juge des choses secrètes et cachées au canon Erubescant
XXXII dist. [D. G. I.32.11] ; au canon Christiana, cause
XXXII qu. 5 [D. G. II.32.5.23] ; et ces questions n'appartiennent
pas au jugement de l'Église, au chapitre Tua nos, De simonia
[Xa V.3.34]. Nous pouvons cependant dire, par une conjecture
très valable, que ces apparitions procédèrent d'un esprit bon ;
d'abord parce que cette Jeanne était vierge, a constamment
affirmé qu'elle l'était, et a offert de se soumettre à une inspection et un examen ; d'où il est vraisemblable de dire qu'elle
eut des apparitions venant du Saint-Esprit, suivant ce que
dit Ambroise au canon Tolerabilius, cause XXXII, qu. 5 [D. G.
II. 32.5.1]. Deuxièmement parce que cette Jeanne était
très humble, comme il apparaît dans ses réponses, et rechercha
non pas les honneurs humains, mais le salut de son âme ; et
elle ne parla jamais avec arrogance. Or l'humilité jointe à
la virginité est louée avec admiration au canon Hec autem
scripsimus, XXX dist. [D. G. I.30.16] ; et ainsi elle a pu dignement recevoir révélations et apparitions venant du Saint-Esprit. Troisièmement parce qu'elle fut ouvertement d'une
vie recommandable par son honnêteté et son comportement ;
car elle allait souvent et dévotement à la messe et à l'église,
se confessait assez souvent, jeûnait, aimait les pauvres et
faisait choses de ce genre. Quatrièmement parce que les
apparitions lui faisaient de bons messages, lui disant de bien
se conduire, de se confesser souvent, de fréquenter l'église,
de garder la pureté de l'âme et du corps, et ainsi elles la conduiraient à la béatitude. Cinquièmement parce qu'à sa
première apparition l'ange lui inspira de la peur, et à la fin
la réjouit, comme fit l'ange qui apparut à Marie et à Zacharie.
Sixièmement, lorsque les anges lui apparaissaient, elle se
signait du signe de la croix, et ceux-ci ne partaient pas ; ce
que font les esprits malins, comme dans le canon Postea,
De consecratione, dist. 4 [D. G. III.4.2.63]. Septièmement elle
comprenait la voix des esprits, qui parlaient clairement,
alors que les esprits malins font le contraire, au canon Sciendum,
cause XXVI, qu. 4 [D. G. II.26.4.2]. Huitièmement parce
qu'elle eut une fin catholique et très pieuse. En effet par
permission des juges elle reçut très dévotement les sacrements
de pénitence et d'eucharistie ; et, lors de sa fin dans les
flammes, elle invoqua le nom du Seigneur Jésus à haute voix et
mourut pieusement, alors que les esprits malins font mal
finir leurs adeptes et les mènent à la damnation éternelle,
comme dans le canon Nec mirum, cause XXVI, qu. 5 [D. G.
II.26.5.14]. Neuvièmement parce qu'elle a paru prédire les événements futurs miraculeusement : par exemple au temps
de la plus grande affliction du royaume et lorsque le roi était accablé, elle promit et déclara qu'elle le ferait couronner à Reims sous peu, ce qu'elle fit. Elle prédit l'abandon du
siège d'Orléans et l'expulsion des Anglais hors du royaume,
ce qui se passa, selon ces paroles « Non est vestrum, etc. »
[Actes I.7]. Et ce sont les signes des bons esprits ; ces derniers,
si Jeanne les vénéra, elle n'a pas erré, car elle fut conduite
par une inspiration divine ; elle n'a pas erré en vénérant les
apparences de sainte Catherine, sainte Marguerite et saint Michel. Bien plus, même si ce furent de mauvais anges transfigurés en anges de lumière, on ne peut pas dire qu'elle a erré
en les vénérant, car elle croyait que c'étaient des saints et
des saintes sous une telle forme ; une telle erreur n'est ni
périlleuse, ni condamnable : cause XXIX, qu. 1 § I [D. G. II.29.1] ;
surtout parce qu'elle ne fut pas entêtée dans son opinion,
mais se soumit au jugement de l'Église. Et si quelque argument pouvait être présenté en sens contraire, il a été répondu
clairement dans les articles de conclusion susdits.
De même ce n'est pas à cause de son habit d'homme qu'on
doit incriminer cette Jeanne pleine de foi ; car si, comme
elle l'affirme et comme on peut vraisemblablement le présumer,
elle l'a revêtu sur une inspiration divine, elle n'a pas péché.
En effet « Où est l'Esprit, là est la liberté », au chapitre
Licet, De regularibus [Xa III.31.18] ; au canon Due sunt leges,
cause XIX, qu. 2 [D. G. II.19.2.2]. De même doit être compris
le canon Si qua mulier, XXX dist. [D. G. I.30.6], qui interdit
[cet habit] quand on agit par débauche, suivant la glose et
les docteurs. Or elle agit ainsi, non par débauche, mais pour
conserver sa virginité ; en effet le changement d'habit est
permis aux clercs, quand intervient une juste raison de
crainte : au chapitre Clerici, [avant] dernier De vita et honestate
clericorum [Xa III. 1.15]. Et elle agit ainsi à cause d'une
crainte fondée d'être violée par les Anglais, qui essayèrent
de le faire, comme cela est prouvé par témoins. Il n'est pas
vrai non plus qu'elle refusa d'entendre la messe pour ne pas
avoir à quitter cet habit ; au contraire elle demanda toujours
d'entendre la messe ; elle offrit de quitter son vêtement
d'homme, si elle était détenue dans une prison d'Église,
ou en compagnie de femmes honnêtes, et hors des mains des
Anglais ; bien plus elle offrit, si les juges le disaient, de le
quitter suivant leur bon plaisir. De même on ne peut la
déclarer relapse si elle le reprit, car elle l'avait pris licitement ;
et cela ne concerne pas la matière d'hérésie, surtout parce
qu'elle le reprit pour mieux empêcher des actions de violence
et pour couvrir sa nudité ; car les Anglais avaient enlevé ses
vêtements de femme, et c'est poussée par la nécessité qu'elle
reprit ses vêtements d'homme. En vérité la nécessité n'est
aucunement soumise à la loi : De furtis, chapitre [III] [Xa
v.18.3]. Tout cela est prouvé clairement dans votre procès
et par les dépositions des témoins.
De même votre charité très remarquable peut aussi considérer que ladite Jeanne, ni d'esprit, ni d'intention, n'a jamais
dévié de la droite vérité, ni n'a offensé Dieu. Son départ en
effet, sans l'autorisation de son père, elle le justifie parfaitement ; parce qu'elle agit sous l'inspiration de Dieu, et qu'on doit obéir à Dieu plus qu'aux hommes. Deuxièmement
elle agit par pitié, pour que ses père et mère ne fussent pas
troublés par une trop grande affliction ; et troisièmement
parce qu'elle leur demanda pardon pour cela. Elle se justifie aussi elle-même, en apposant ce nom de Jésus sur les
lettres qu'elle envoyait pour les besoins de la guerre ; parce
qu'elle soutenait une guerre juste par inspiration divine et
qu'elle la croyait licite, car tout doit être fait au nom de
Dieu : XXIII dist., canon In nomine Domini [D. G. I.23.1]. Semblablement
sur le prétendu désespoir qu'elle eut, en sautant
de la tour, elle se justifie parfaitement ; elle déclare en effet
avoir fait cela non par désespoir, mais pour sauver sa propre
personne, dans l'espoir de secourir beaucoup d'autres bonnes
gens, et par charité et pitié pour la ville de Compiègne, menacée de destruction.
De même elle doit être justifiée du prétendu mensonge
qu'elle aurait fait, en affirmant qu'un ange avait apporté
un signe à notre sire le roi, en fléchissant le genou devant
lui, etc. On répondra qu'il n'est pas licite de mentir, bien que
cependant dans une réponse habile on puisse feindre, en
taisant la vérité, comme fit Abraham devant Pharaon, au canon Queritur § Ecce, cause XXII, qu. 2 [D. G. II.22.2.21 et 22].
Mais il en est ainsi : « ange » est le nom d'une charge ; c'est
en effet la même chose que « envoyé de Dieu », suivant ce
texte : « Voici que j'envoie mon ange qui précédera, etc. »
[Exode 23, 20], où il est question de Jean-Baptiste. Or Jeanne
se disait l'envoyée de Dieu auprès du roi ; aussi pouvait-elle à bon droit dire que l'ange, c'est-à-dire elle même, envoyée
de Dieu, porta au roi la couronne, c'est-à-dire la palme de
la victoire qui le conduisit à la couronne. Et si on dit qu'elle
parlait expressément de saint Michel, elle est excusable ;
en effet on dit de la même manière que le séraphin purifia
la langue d'Isaïe, non par lui-même, mais par un autre. En
effet ce qui est fait par les inférieurs, et relève du domaine
et des fonctions des supérieurs, est déclaré comme fait par
ces supérieurs ; ainsi à ce sujet Michel est désigné comme
chef de la milice [céleste] ; et ainsi Jeanne, affirmant avoir tout fait par la révélation de Michel, dit que saint Michel
a tout fait ; et qu'elle-même eût été cet ange, ses paroles
l'indiquent clairement. En cela elle n'a donc pas menti,
mais a parlé habilement.
De même elle n'est pas à incriminer, si elle a dit qu'elle
devait être sauvée, et si elle l'a fermement soutenu et cru ;
elle ajouta en effet que cela arriverait vraiment, si elle gardait ce qu'elle promit à Dieu, à savoir la pureté tant de
l'âme que du corps. Car qui agit ainsi, ne pèche en rien, mais
est sauvé. Et si Jeanne a pareillement déclaré qu'elle serait
délivrée de sa prison, elle n'a pas proféré un mensonge ;
en effet elle a affirmé que les voix des esprits lui ont conseillé
de soutenir le martyre patiemment, car pour finir elle serait
sauvée ; et cela ne doit pas être tenu pour une médiocre
délivrance ; et ainsi elle n'a pas proféré un mensonge. Il
y eut aussi des gens ayant l'esprit prophétique, qui parfois,
ne parlant pas dans cet esprit, n'annoncèrent pas la vérité ;
sur ceux-ci il y a un texte dans le canon Querendum et le
canon Potest, De penitentia, dist. II [D. G. II.33.2.6 et 11].
On ne peut pas non plus lui reprocher d'avoir dit que les
saintes Catherine et Marguerite aimaient les Français et
détestaient les Anglais ; en effet elle s'est expliquée, disant
que ces saintes aiment ceux que Dieu aime, et détestent
ceux que Dieu déteste, suivant le texte : « J'ai chéri Jacob,
j'ai eu Esaü en haine » [Malachie 12]. Il n'est pas vrai qu'elle
ait dit n'avoir jamais commis péché mortel ; elle a dit ne pas
savoir si elle avait péché mortellement, et que Dieu ne voudrait pas qu'elle eût fait ou fît chose pouvant charger
son âme : ce qui serait arrivé si, ayant péché, elle n'avait pas
fait une pénitence convenable. Ces paroles ne contiennent
rien de mal. Et par ce qui vient d'être avancé, ces paroles
sont légitimement justifiées.
De même il sera nécessaire de rappeler que Jeanne fut
accusée faussement d'avoir erré, lorsqu'on a prétendu qu'elle
refusa de se soumettre au jugement de l'Église militante,
même après qu'on lui eût montré la différence entre celle-ci
et l'Église triomphante, ou qu'elle révoqua finalement cette soumission, à laquelle cependant est tenu tout catholique,
suivant le canon Hec est fides, cause XXIV qu. 1 [D. G. II.24.1.14],
le canon Ego Berengarius, De consecratione dist. II [D. G.
III.2.42]. Car à propos de cela elle méritait vraiment d'être
justifiée. D'abord ce qu'elle fît suivant une révélation, elle
le fît suivant un esprit bon, comme cela a été dit, et ainsi,
en suivant une loi privée, elle fut exemptée de la loi commune,
comme dans les règles alléguées plus haut. Bien plus, en
admettant un doute sur cette révélation, pour savoir si elle
procédait d'un bon ou d'un mauvais esprit, comme il s'agit
de choses cachées et connues de Dieu seul, l'Église ne pouvait
nullement en juger : au canon Erubescant XXXII dist. [D. G.
I.32.11] ; au canon Christiana, cause [XXXII], qu. 5 [D. G.
II.32.7.23] ; et au chapitre Tua nos, De simonia [Xa V.3.34].
En revanche, pour ce qui concerne les articles de la foi, nous
sommes tenus de suivre le jugement de l'Église, sinon nous
serions hérétiques : chapitre I De summa Trinitate, au Sexte
[VI°.1]. De même nous devons tenir au jugement de l'Église
pour tout ce que tient et enseigne l'Église : au canon Nolite,
XI dist. [D. G. I.11.3] et au canon Novit, XII dist. [D. G. I.12.10]
avec la note ; pour le reste liberté est donnée de tenir ce
qui plaira. En effet, dans les choses secrètes chacun peut
suivre sa propre opinion ; ainsi la note Jean André au chapitre I De summa Trinitate, dans le Sexte.
De même cette Jeanne est excusable si au début elle ne
se soumit pas, car elle ignora au début ce qu'était l'Église.
C'est évident, car entre les saints et l'Église elle ne fit nulle
différence. Sur cette ignorance, des témoins déposent dans
votre procès. Mais aussitôt après avoir compris, et dès qu'on
lui eût expliqué, elle se soumit toujours à l'Église. Selon
même des dépositions de témoins à ce procès, certains individus firent semblant, pour la tromper, de venir de la part
du roi, notre sire, et lui suggérèrent fortement, si elle voulait en sortir, de ne pas se soumettre à l'Église, et ainsi trompée
par ce dol, peut-être différa-t-elle ; mais ensuite elle se soumit
vraiment et à différentes reprises, comme cela vous est
pleinement exposé dans les articles de conclusion que vous ont remis les demandeurs. Cette soumission cependant,
le juge, alors évêque de Beauvais, interdit aux notaires de
l'inscrire ; les témoins déposent ainsi ; malgré tout il est
encore évident, par ses paroles insérées au procès, que Jeanne
s'est soumise à l'Église, par ses actes, par ses paroles, par
ses actions et sa participation aux sacrements.
De même et surtout doivent être relevées et gardées en
mémoire la fausseté et l'iniquité inouies introduites dans
ce premier procès ; les parties adverses en ont corrompu
leur procès, tout en voulant cependant tout à fait le farder
et le fortifier, grâce à la production de certains douze articles,
mensongèrement extraits de prétendus aveux de Jeanne.
Sur ces articles, ainsi faussement extraits, donnèrent leur
opinion, écrites de leur main ou signée, des gens d'Église
notables et instruits, les uns dans les saintes écritures, les
autres en droit canonique, maîtres, docteurs, licenciés,
bacheliers formés et expérimentés, en grand nombre ; ceux-ci
vraiment doivent être tenus comme exempts de toute marque
d'iniquité et excusables, ayant été trompés pour leur consultation, à l'exception de ceux qui étaient au courant de ce
travail, car ils croyaient que la vérité leur avait été communiquée et se trouvait dans lesdits articles au sujet des déclarations en justice de Jeanne ; alors que bien au contraire, à cause d'une haine mortelle et d'une passion désordonnée,
des choses vraies omises et des choses fausses exprimées
se trouvaient dans ces faux articles. Il fut plein d'iniquité
que lesdits douze faux articles, commençant par « Une certaine femme », ainsi extraits, eussent été envoyés aux opinants.
De même il faut relever que cette différence entre les
vraies déclarations de Jeanne et le contenu des articles
faussement extraits a été assez longuement démontrée par
une comparaison entre ces articles et lesdites déclarations,
faite en justice, vérifiée et approuvée par vous ; de plus
cette différence a été déduite très complètement de tout
ce procès, exposée plus clairement que le jour par les dépositions des témoins et des notaires, par les notes originales,
par le collationnement avec les premiers procès, et très largement par les traités de plusieurs prélats, docteurs en droit
divin et humain, et enfin exposée brillamment dans les
articles de conclusion. Aussi paraît-il convenable, pour
abréger, de surseoir à une plus longue relation de ces différences.
De même, et parce que ce procès inique contre la défunte
Jeanne a presque tout entier été fondé sur ces faux articles,
il sera nécessaire de révéler par sentence judiciaire l'iniquité
de ces articles extraits faussement, par dol et mensonge, et
de les brûler et lacérer publiquement, pour rendre manifeste la vérité, et pour excuser de manière valide et opportune ceux qui ont opiné sur eux.
De même vu les moyens, motifs et raisons qui précèdent,
suscrits et recueillis en un bref résumé, en ajoutant votre
procédure avec dépositions de témoins ne souffrant aucune
réserve, en comparant et en opposant le procès très inique,
plein de dol et violence, à votre justice, catholique et resplendissante de vérité, en recueillant et ajoutant les assertions
faites, les vérités dégagées par des personnes illustres,
prélats, docteurs et savants en l'un et l'autre droit, les livres,
les livrets, traités et conclusions ici rassemblés et joints,
que présentent à nouveau ici les demandeurs : il apparaît
et il est évident de manière très claire que ledit premier
procès a été, était et est manifestement entaché de faux,
dol, iniquité, mensonge et nullité dans l'accusation ; tel il
doit être déclaré par sentence, ou du moins doit-il être cassé,
annulé et brûlé ostensiblement, en public et de manière
manifeste.
De même et pareillement il est évident que ladite défunte
de bonne mémoire, Jeanne d'Arc, dite la Pucelle, a vécu
pendant toute sa vie de manière louable et honnête, qu'elle
n'a pas dévié des vérités de la foi, de la doctrine et des règles
de l'Église, qu'elle n'a rien affirmé ou cru qui pût sentir
l'hérésie, ou qui allât contre la foi catholique et les traditions
de la sainte Église romaine ; au contraire ces choses haïssables,
elle les a détestées, et n'a jamais commis ces crimes que les
accusés osèrent témérairement avancer et dénoncer ; et elle ne fut jamais à ce propos en aucune manière diffamée par
la renommée publique ou par quelque relation digne de foi,
ni autrement n'avoua ou ne fut convaincue en justice, avec
l'aide du Seigneur. En outre on la vit et pareillement on
l'entendit demander souvent le jugement du saint Siège
apostolique et du concile général, et des docteurs pleins de
foi.
De même et dès à présent lesdits accusés, parties adverses,
conduits par l'esprit malin et persévérant dans une trop
grande iniquité, sont rendus convaincus de méchanceté
obstinée, de fausseté, de dol et de tromperie damnable ;
ce sont des juges suspects et iniques ceux qui osèrent très
mensongèrement poursuivre cette vierge innocente et, contre
la vérité, l'accuser de perversité et des excès criminels mentionnés par dol dans leurs fausses et iniques première et
deuxième sentences ; et bien plus, à cause des faussetés
choisies et pleines de dol, contenues et décrites faussement
là même, ils la condamnèrent sans droit, premièrement à
la prison perpétuelle, et deuxièmement à être abandonnée
entre les mains de la justice séculière, comme récidiviste,
hérétique et criminelle en d'autres matières ; procédant
sans indulgence, ni miséricorde, suivant leur seule passion
perverse, hostile et pleine de dol, ils refusèrent de prêter
attention à l'innocence, à la faiblesse, à l'ignorance et à la
jeunesse de cette innocente fille ; mais au contraire prirent
soin véritablement de détruire ses justifications, soumissions
et protestations, et, par une entente perverse, de lui ôter
tout moyen de justice, avides d'obtenir en tout cas sa mort, ô douleur ! et son sang.
De même, de tout ce qui a été recherché, produit, recueilli
et dûment rédigé par écrit en observant les règles juridiques,
il a été établi, et il est établi que les parties adverses ont
persévéré de manière nulle et sans droit dans leur procès
inique contre la défunte, privée de tout défenseur de son
innocence, en méprisant les règles juridiques, et en suivant
la seule passion de leur volonté sans frein ; ils procédèrent
enfin jusqu'aux sentences iniques : par l'une ils condamnèrent cette innocente Jeanne, comme coupable d'hérésie et d'autres
crimes, à la prison perpétuelle, au pain et à l'eau ; par l'autre
ils la déclarèrent avec méchanceté récidiviste, en sorte qu'elle
fut abandonnée à la cour de justice séculière et conduite
au dernier supplice après des prédications publiques, ignominieuses et scandaleuses ; ils ne rougirent pas de regarder
de tous leurs yeux cette innocente vierge périr par le feu et
brûler, au péril de l'âme de ceux qui avaient ainsi jugé avec
iniquité, en opprobre et ignominie, injure et offense contre
sa mère, ses frères et ses parents, actuellement plaignants
et demandeurs.
De même la nullité de ces sentences iniques, l'erreur manifeste, la contradiction évidente, la calomnie, l'incertitude,
l'obscurité, la cruauté, la peine prononcée au mépris de tout
droit et des règles sacrées contre une personne du sexe faible
et d'âge juvénile, après de si grandes souffrances en prison et
les angoisses des interrogatoires, tout cela a été mis au jour
très clairement par la conduite, selon les règles, de votre
procès. D'abord, du texte du premier procès et des dépositions de ceux dignes de foi qui y assistèrent, il ressort que
Jeanne ne fut nullement convaincue des genres de crimes
qu'on lui reprochait, sauf peut-être pour le port de vêtements
d'homme ; et sur ce point elle est excusable cependant, comme
cela apparaît bien ci-dessus. Deuxièmement, si l'on examine
toutes les incriminations, on constate qu'elle n'a pas péché
en matière de foi, ni ne mérita d'être jugée hérétique ou
relapse : l'abjuration qu'elle fit n'était pas valide, et de
plus elle ne la comprit pas du tout ; et ce qu'on n'a pas compris,
on n'a pu validement l'abjurer. Troisièmement elle ne devait
pas être déclarée relapse dans l'hérésie, puisqu'elle n'y était
pas tombée ; car elle donna des réponses catholiques et ne
fut pas trouvée d'esprit mal fait, ni opiniâtre contre la foi
et la doctrine de l'Église, elle ne répandit, n'établit et ne
soutint d'un esprit obstiné aucun dogme ou erreur. Quatrièmement il n'était pas valable de la déclarer coupable dans
une sentence en dénommant de manière générale les genres
de crimes qui lui étaient reprochés, comme cela fut fait dans les sentences mêmes, sans désigner et ajouter ensuite les infractions particulières avec les circonstances ;
en effet une telle accusation vague est interdite, et n'est
pas admise par le droit, dans les libelles et les sentences,
surtout quand il s'agit d'affaires criminelles mettant autrui
en position critique ; et même, suivant les lois et les canons,
une modération de la peine par le juge est tenue comme
presque due, à cause de l'âge tendre et du sexe faible, ainsi
que tout cela est exposé et inséré par écrit dans les articles
de conclusion.
De même avec tant d'opprobres, de vexations, d'injures,
de tourments et de calomnies infligés à ses parents par
des juges remplis d'iniquité et de dol, sa mère, ses
frères, ses parents supportèrent avec peine le scandale
d'une exécution si grandement funeste ; ils décidèrent de
poursuivre la réparation de son honneur, l'innocence d'une
telle parente, sa justification et le rétablissement de sa bonne
renommée. Ils doivent à bon droit être recommandés, si,
conduits par un bon conseil et fermes dans leur ardent courage, ils demandèrent la justice du saint et suprême Siège
apostolique et réclamèrent avec insistance le secours des
remèdes du droit ; le saint Siège apostolique enfin, favorable à leurs justes plaintes, ayant confiance en la droiture,
la sagesse, la très vaste et sage science de vos lumières célèbres,
très connues dans tout l'univers catholique, vous envoya le
mandat de son autorité apostolique ; en vertu de celui-ci,
emmené sur le droit chemin de la raison, votre procès est
prêt à toucher à la fin souhaitée, le croit-on, dans les prochains jours, sous la direction du Seigneur, et grâce à votre
activité, votre prudence et votre travail.
Il reste donc, révérendissimes pères, juges très illustres et
docteurs très savants, à faire luir la splendeur de votre vérité ; à dissiper et refouler les froids nuages du premier et
inique procès ; à déclarer l'abominable iniquité de ce procès,
de ses sentences et de ses suites, ainsi que le dol, l'erreur et
le caractère funeste ; et à effacer entièrement la tache faite à Jeanne et aux siens en matière de foi. Que celle-ci se relève, lavée de toute souillure en matière d'erreur ou de perversité
hérétique et de toute tache en matière de foi ou d'opposition à
l'Église ; que s'exhalent la bonne réputation et l'innocence de
cette Jeanne virginale, comme celle de sa mère, de ses frères
et de toute sa parenté ; qu'enfin, par votre jugement publié
et une sentence de justice perpétuelle, les fins juridiques,
conclusions, réparations, prédications solennelles, représentations, images, croix, fondations et autres signes publics
de réparation en perpétuel souvenir, ainsi que les autres
conclusions contenues dans la pétition des demandeurs et
exprimées pleinement dans leurs articles de conclusion,
que toutes ces fins soient accordées très complètement aux
demandeurs à l'avenir, et que tout ce que vous manderez à exécution soit observé irrévocablement ; comme l'ordonne
cette autorité suprême et inébranlable du Siège apostolique, à vous commise en cette affaire, très illustres et honorables
seigneuries et très dignes paternités, qui devrez être récompensées dans une gloire sans fin par Celui qui accorde les dons éternels pour toute la durée des temps.


[Deinde sequuntur motiva juris per dictos Ysabellem, Petrum et Johannem d'Arc exhibita et producta]
« SUPER omnia vincit veritas. Colendissimi patres
judicesque discretissimi, suprema sanctæ apostolicæ
Sedis vice et auctoritate fungentes, novistis quoniam
veritatis amica est simplicitas, quodque fides veritatis
verborum adminicula non requirit (in cap. « Veritatis » De jurejurando, et Cod. « Si minor ab hæreditate
abstineat », 1. I). Et dudum expertum tenet vestræ
lucis jubar fulgidum, quibus semitis veritas pertingatur
; ita ut, scrutatis sæpius nedum operibus, sed rerum
circumstantiis et emergentibus, causa, tempore, voluntate,
personarum differentia, et quibusvis varietatibus
diligentissime perquisitis (de quibus in canone « Occidit » caus. xxiii. q. 8 ; et in can. « Judicantem »
caus. xxx. q. 5 ; et cap. « Judices quum sunt » De judiciis)
; judicia vestra longe prodierint, solidamque frequenter publicæ salutis produxerint justitiam, et inflexibilem
veritatem. Exinde per orbem diffusa sapientiæ
vestræ lucidissima rectitudo, sanctæ apostolicæ
Sedis congrua amplexibus, a supremo justitiæ ministro,
Nicolao papa V. (1), domino nostro, cæteris noscitur
præelecta ad justitiæ et veritatis tractandum ministerium
in hac causa expressæ dudum fama pretiosæ
defunctæ Johannæ d'Arc, dictæ la Pucelle,
multis temerariis et iniquis, præsumptisque processibus
et sententiis contra juris ordinem, ultimo supplicio
deputatæ, falsoque in fidei causatæ materia.
Instantibus igitur in hac parte, una cum vestro promotore,
matre, fratribus et parentibus defunctæ
ejusdem, actoribus, adversus quondam Belvacorum
episcopum, Petrum Cauchon, Johannem Estiveti
dictum Benedicite, procuratorem fiscalem aut promotorem
negotiorum et causarum criminalium in
spirituali curia Belvacensi, ac Johannem Magistri,
prætensum ibidem inquisitoris hæreticæ pravitatis
vicarium, reos, cæterasque partes adversas in hoc
processu expressas : tendunt ipsi actores, humiliterque
postulant et supplicant, post solemnes hujusmodi
processus sui agitationes, juris ordine et terminis
debite observatis, finem causæ imponi, veritatem
elucidari, et per vestram sententiam diffinitivam quod
justum fuerit decerni, suasque eisdem actoribus conclusiones
in suis articulis principalibus descriptas
adjudicari plenissime. Ad hæc autem complenda, ut
discreta vestra claritas, justitia suadente, facilius valeat inclinari, porrigunt actores præfati, in suis protestationibus
sæpe scriptis persistentes, sub forma
brevi rationum juris, et epilogo deductorum in hac
parte, causas et rationes quæ sequuntur.
« Primo igitur, ut a recto juris ordine ortum suscepisse
noscatur vester hic processus apostolicus, et
constet vestrum ab initio judicium fundatura esse rite
et canonice, vosque judices fuisse et esse competentes,
attendere opus est mandatum apostolicum, ab ejusdem
summi pontificis conscientia in forma justiliæ emanatum,
vestris directum non immerito providentiis
insignibus ; cum qua decuit solemnitate magnifica, in
publica cleri et populi assistentia, palam, Parisius, in
episcopali aula majori, die VII. mensis decembris,
anno Domini MCCCCLV., præsentatum, et grandi susceptum
reverentia et honore, contemplatione supremæ
sanctæ ejusdem apostolicæ Sedis ; ubi, supplicatione
piissima per actores aperta, sui organo
consilii, pro tantæ rei consideratione æquissima, gravi
prævia deliberatione, suscepto per vos judiciali onere,
citatorium in forma juris vestra ordinatione decretum
est, instituti sunt notorii, promotor vester citatus
est, prout actum judiciale manifestat.
« Item, et in hujusmodi præsentatione et receptione,
ac citatorii decretatione, forma juris observata
rite censetur. Præsentatum est enim mandatum
apostolicum per actores impetrantes solemniter,
notariis præsentibus, cum comitiva hominum numerosa,
hora congrua et ad id ordinata, prout in
cap. « Consuluit » De officio delegati ; in loco insigni,
et pro tribunali vobis sedentibus delegatis, ut caus II.
q.6. can. « Biduum, » et prout docet Speculator in Speculo, tit. De competentis judicis aditione, § Viso
cujus judicium ; et in vestro conspectu, factum in
mandato apostolico narratum seu querelam piissimam
actores ipsi explicuerunt, per suum consilium,
reverenter. Ex quibus narratis jus oriri non erat
simulandum, ut ff. ad leg. Aquiliam « Si ex plagis » § In
clivo ; et in cap. De muliere desponsata impube, et
in juribus ibidem per Speculatorem allegatis ; sed ex
tunc, per vestras paternitates, auditis actoribus, receptum
est mandatura sæpedictum reverenter, repertum
omni exceptione majus, præsentibus notariis, in
forma cap. « Quoniam contra « De probatione ; et
acceptatum judicii mandati jugum, licet difficile, caritate
tamen meritorium et favorabile. Decretum etiam
est hic citatorium contra partes adversas, in scriptis
exsequendum, ut in canone « Vocato » caus. v. q. 2,
ac pronuntiatione præcedente, quoniam causæ hujus
instabat arduum negotium, ut in cap. « Romana »
De foro competenti § Contrahentes, et prout notat
Innocentius, in cap. « Licet » De accusationibus.
« Item, nec venit omittendum quoniam in processu
fidei aut suspicionis hæresis falso præsumpto per
partes adversas contra dictam Johannam d'Arc, defunctam,
de jure debuerit infamia præcedere, et inquisitio
infamiæ tunc fieri contra ipsam in exordio
sui processus : licet facta non fuerit, saltem valida ; sed
scienter et dolose prætermissa. Quia tamen omnis res
per quascumque causas nascitur, per easdem dissolvitur,
(in cap. « Omnis res » De regulis juris), noluistis
tamen, insignes judices et præclari, omittere validas
informationes hujusmodi vestri processus præambulas,
imo lucidissimas probationes ; sed easdem ab mitio amplexi estis, authenticis scriptis redactas
ex apostolica auctoritate per reverendum dominum
cardinalem de Estoutevilla, per regiam majestatem
suave aucloritate, ac alias solemniter, hac in re, in
loco suæ propriæ originis et alibi in locis insignibus,
et ex depositionibus excelsorum principum et personarum
egregiarum factas, super vita, fama, moribus,
virtutibus, fide rectissima ac honesta conversatione,
et adventu dictæ Johannæ ; quas vos ipsi, judices
venerandi, colligere et huic vestro operi præponere
voluistis, providentia ravi.
« Item, et quoniam cujuslibet rei principium potissima
pars est, ut in cap. « Sedes » De rescriptis, per
Bernardum ; et ff. De origine juris, in leg. I., commemoranda
est valida citatorii vestri exsecutio contra
partes adversas, ad loca diversa, civitates, et ecclesias
insignes Rothomagensem et Belvacensem, ad personas
et domicilia eorum palam deducta, imo et iterata
pluries, citatoriaque multiplicata secundum exigentiam
judicialis ordinis, et per publicam affixionem
exsecutionibus mandata, et per edita patentia notificata
apertissime ; ita ut, ex eisdem, omnis honesta
persona notoriam et manifestam notitiam habere valuerit
; nec remanserit qui justam hujusmodi vestri
processus ignorantiam prætendere potuerit, quovismodo,
nisi crassam pariter et supinam, prout per
ipsorum citatoriorum et edictorum fidelia instrumenta
publicaque documenta constat aperte ; quibus est
præstenda fides, in cap. « Scripturam » De fide
instrumentorum, cum sua glossa.
« Item, et per acta publica vestri hujus processus
luce clarius manifestatur ; in civitate Rothomagensi, loco valde insigni, in quo processus alter iniquus
contra ipsam defunctam agitatus est dolose et inique,
vicibus iteratis ; vos aut aliquos, seu alterum
vestrum comparuisse personaliter, pro tribunali
sedentes, et omnes terminos debite observasse
quos postulat ordo juris ; accusatisque partium adversarura
dolis, contumaciis, et sui dudum processus
temeraria præsumptione, falsitate, iniquitate et
nullitate palam infecti, in termino quolibet ordinasse
quæ juris erant ; auditis tamen dictis actoribus vestro
etiam promotore. Decrevistis enim ab initio sententialiter
judicium vestrum fundatum opportune, vosque,
judices causæ et partibus fore competentes, declarastis ;
ulteriusque merito fore vos processuros. Deinde petitionem
actorum, in forma acti publici, vobis porrigi
et, ad litem contestandam, partes rursum vocari judicastis.
Quibus ita factis, ipsam petitionem in forma
articulorum concludentium, ex vestra alia ordinatione,
recepistis. Post hæc, ad testium examen, ad
probationum receptionem ac productionem falsi illius
prætensi processus, comparationemque legitimam
confessionum dictæ defunctæ contra articulos duodecim,
quos partes adversæ falso prætenderunt ex
confessatis a defuncta debite elicitos, procedere curastis
; productas insuper testium insignium ac omni
exceptione majorum depositiones veridicas, informationesque
apostolica et regia auctoritatibus reproductas,
admirandæque lucis et sapientiæ tractatus, deliberationes,
scripturas, libros, codices prælatorum,
doctorum insignium juris divini pariter et humani,
et virorum litteratorum, quæ juris sunt in causa præsenti,
præsertim super dictæ defunctæ confessionibus catholicis, spirituum visionibus bonorum, et super
iniquitate judicantium in processu priori, justa et
sancta consideratione admisistis.
« Item, et vestri promotoris adjunctione per vestram
admissa judicialem sententiam seu ordinationem, deinceps
ad dicendum contra exhibita et producta dies et
terminos præfixistis multiplices, et proeclusionem dicendi
contulistis, ut jura decernunt ; tandemque merito
omnibus et singulis observatis quæ de jure communi,
ac vestro apostolico rescripto mandante, debuerunt
observari, in causa per vos juridice concluso, diem assignandam
decreveritis, ad jus audiendum et vestram
diffinitivam sententiam pronuntiandam judicialiter ;
proviso tamen quod ipsi actores, si voluerint, ad
animos vestros, pro veritatis elucidatione majori, rationes
seu motiva juris vestris reverendissimis paternitatibus
possent offerre, suo processui copulandas. Quas,
jussionibus vestris acquiescendo, in his scriptis, cum
reverentia et correctione debitis, offerunt humiliter
dicti actores, vestrum judiciale officium super ipsa
finali facienda pronuntiatione, humilius implorantes,
sub protestationibus sæpedictis.
« Item, et quoniam juris ordo iste in præmissis per
singulos sui terminos indubitatus est, tam ex juribus
enucleatis vobis notissimis, canonicis et civilibus, etiam
secundum scripta per Tancredum, in suo tractatu De ordine
judiciorum, per Speculatorem, suo secundo libro,
in Speculo juris, imo et per textus et doctores juris
canonici et civilis, suis lociset rubricis opportunis et
notoriis titulata, tum ex observantia sive experientia,
rerum magistra, in omni præcipue ecclesiastica curia
notorie visitata et approbata undequaque : idcirco neque jurium allegantiæ seu quotationes singulares,
quæ prolixa forent, in termino quomodolibet observato,
hic exprimuntur seu repetuntur. Et tamen ad
longum in articulis concludentibus eorumdem actorum,
seorsum et seriose, ad plenum huic vestro
processui inserta sunt et allegata jura quæ ad propositorum
verificationem, et adversarum partium
suique falsi et iniqui processus condemnationem, visa
sunt suflicere condecenter.
« Item, et nihilominus, ut ad memoriam promptiorem
redeat iniquitas dicti primi processus, et illorum
qui judicaverunt tam inepte temeraria præsumptio
discutiatur et corrigatur, attendere opus est quam
excogitata malitia, quam damnata et abhorrenda inimicitia
judices illi malivoli contra ipsam defunctam,
omni pietate seclusa, omni muliebri fragilitate non
attenta, spretaque omnimoda circumstantiarum
ponderatione (de quibus in dicto can. « Occidit »
caus. XXIII. quæst. 8 et Summa), inique, injuste
atque nulliter et de facto processerunt.
« Item, et primo, attendi debet præsumptus ausus
prætensorum judicum illorum, qui tanta temeritate
judicium tale acceptare præsumpserunt, quum ejusdem
defunctæ, præsertim in fidei materia, judices ex juris
ordine effici non poterant, nec debebant ; et ita sui
processus, cum sententia et inde secutis, nullitate
censebantur infecti (Cod. Si a non competenti judice
per totum ; in cap. « Ad nostram » De consuetudine).
Non enim orta erat ipsa Johanna de Belvacensi dioecesi,
nec ibi residebat ; nec ibi hæresim commiserat ; et sic
non sortiebatur forum ratione domicilii aut delicti
(caus. III. quæst. 1 ; caus. VI. quæst. 3 ; cap. « Placuit » et cap. ult. De foro competenti). Rursum
Belvacensis episcopus elegerat cum vicario inquisitoris
procedere, et tamen de potestate dicti vicarii, qui
delegatus dicebatur, non constitit per acta, nec de ea
apparet in processu, contra cap. « Per hoc » De hæreticis,
libro VI ; contra cap. « Quum in jure » De officio
delegati. Imo etiam dictus episcopus sine illo vicario
ad plures actus substantiales processit, contra
cap. « Quum plures » De officio delegati aut commissarii,
libro VI. Etiam ad examen dictæ Johannæ
pluries per alios processerunt ; in tam gravi causa
quod facere nequiverunt (De officio delegati, cap. I.
in Clem.). Constat insuper per testes dicto vicario et
aliis consulentibus minas illatas et terrores inducentes
justum metum, secundum glos. can. « Injustum » et
can. « Quatuor » caus. XI. quæst. 3. Ipsa enim Johanna
recusavit dictum episcopum, ut suspectum et capitalem
inimicum, sicuti dicunt testes, juxta cap. « Suspicionis »
De officio delegati. Item, judicio Papæ se submisit
dicta Johanna, provocans in effectu ; et ita non licuit
inferiori cognoscere (caus. II. quæst. 6, can. « Si quis
nostrum »). Etiam, quum hæc materia de revelationibus
esset de majoribus causis, ad solum Papam
spectavit cognitio, ad quem ipsa petiit remitti. Igitur
nulliter processerunt, ut in cap. « Majores » De baptismo.
Insuper eidem Johannæ in duro carcere clausæ denegata
est defensio et consilium : denegatio scilicet
quod articuli per Ecclesiam tunc congregatam Basileæ
non viderentur ; et est a judice prohibitum notariis ut excusationes suas scriberent in processu. Item, falsa
articulorum a confessionibus Johannæ extractio data
opinantibus ac vexatio, intricatio in quæstionibus
difficilibus, ac submissiones dolosæ eam deceptive
consulentium. Hæc enim et alia multa supratacta, et
latius in dictis articulis concludentibus declarata, processum
illum contra dictam Johannam, cum inde
secutis, nullitate infectum, saltem cassandum reddunt
ac retractandum.
« Item, nec spectare potuit dictis judicibus, nisi
nulliter et de facto, de inspirationibus et occultis
revelationibus, et spirituum apparitionibus dictam
Johannam concernentibus, certum proferre judicium.
Istæ enim occultæ apparitiones et inspirationes,
an a Deo procedant velne, soli Deo pertinent
et notæ sunt, qui secreta et. occulta solus
judicat (in can. « Erubescant » XXXII. dist.; in
can. « Christiana » caus. XXX. quæst. 5 ) ; nec
spectant judicio Ecclesiæ (in cap. « Tua nos » De simonia).
Dicere tamen possumus, ex omni valida
conjectura, apparitiones hujusmodi a bono spiritu
processisse ; primo, quoniam ipsa Johanna virgo erat,
et talem se constanter asseruit, et se exhibuit inspiciendam
et visitandam ; exinde verisimilius dicendum a
Spiritu Sancto apparitiones habuisse, secundum Ambrosii
dictum, in can. « Tolerabilius » caus. XXX.
quæst. 5. Secundo, nam ipsa Johanna erat humilis
valde, ut patet in suis responsionibus, nec honorem quæsivit humanum, sed animse suæ salutem ; nec unquam protulit verbum arroganter. Humilitas
autem virginilati conjuncta mirabiliter laudatur
(can. « Hæc autem scripsimus » XXX. dist.); et ita potuit
revelationes et apparitiones a Spiritu Sancto suscipere
digne. Tertio, quoniam vita honestate et conversatione
commendata fuit aperte ; nam missam et ecclesiara
devote frequentabat, confessata sæpius, jejunans ;
pauperes diligens et [alia] hujusmodi. Quarto quia apparitiones
mandata bona eidem faciebant, dicendo quod
bene se regeret, quod sæpe confiteretur, quod ecclesiam
frequentaret, quod custodiret animi et corporis
virginitatem, et ducerent eam ad beatitudinem.
Quinto, quia angelus apparens ei primo timorem incussit,
et in fine lætificavit, ut fecit angelus apparens
Mariæ et Zachariæ. Sexto, dum sibi apparebant angeli,
signo crucis se signabat ; et non recedebant ;
quod faciunt spiritus maligni, ut in can. « Postea » De consecratione, dist. iv. Septimo, clara voce intelligebat
vocem spirituum ; cujus contrarium faciunt
maligni spiritus (in can. « Sciendum » caus. XXVI.
quæst. 4). Octavo, quia catholicus et devotissimus
fuit ejus finis. Ipsa enim ex permissu judicum devotissime
suscepit sacramenta Poenitentiæ et Eucharistiæ ;
et, in exitu, inter flammas, alta voce nomen Domini
Jhesu exclamavit, et religiose finivit ; quum spiritus
maligni suos sequaces male finire faciant, et in æternam
damnationem inducant, ut in can. « Nec mirum »
caus. XXVI. quæst. 5. Nono, quoniam miraculose visa
est futura prædicere, puta, tempore maximæ afflictionis
regni et oppressione regis, spoponderit et dixerit
quod faceret eum Remis coronari in brevi, prout fecit. Prædixit et dissolvit obsidionem Aurelianensem, et
expulsionem Anglicorum a regno ; quod verificatum
est, juxta illud « Non est vestrum, etc. » Et hæc signa
sunt spirituum bonorum ; quos, si Johanna adoraverit,
non erravit, spiritu ducta divino ; nec erravit
adorans speciem sanctæ Katharinæ, sanctæ Margaretæ
et sancti Michaelis. Imo, eisi mali fuerint angeli
transfigurati in angelis lucis, non dicitur errasse
adorare, credens fuisse Sanctos et Sanctas sub tali
forma ; nec est talis periculosus error, nec damnandus
(caus. XXIX. quæst. 1. § I), præsertim quum in
sua opinione non fuerit pertinax ; sed Ecclesiæ judicio
se submisil. Et si qua argumenta fieri possent ex
adverso, responsum est plane in articulis concludentibus
supradictis.
« Item, nec propter habitum virilem venit increpanda
fidelis ipsa Johanna ; nam si, ut asserit et verisimiliter
præsumitur, illam sumpserit ex divina inspiratione,
non peccavit. Ubi enim spiritus, ibi libertas
(in cap. « Licet » De regularibus ; in can. « Duæ sunt
leges » caus. XIX. quæst. 2). Item, intelligendus
can. « Si qua mulier » XXX. dist., id prohibens
ubi causa luxus hoc fieret, secundum glossam et
doctores. Hoc autem non fecit causa luxus ; imo causa
virginilatis servandæ ; mutatio enim habitus clericis
permitteretur, ubi justa causa timoris intervenit (in
cap. « Clerici » ultimo De vita et honesta clericorum).
Et hoc fecit ex justo metu violationis ab Anglicis,
qui eam nisi sunt attentare, ut per testes probatum
est. Nec est verum quod missam audire cessavit, ne
illum relinqueret ; imo ipsa requisivit semper missam audire ; ipsa obtulit vestem relinquere, si in carcere
Ecclesiæ, aut in comitiva honestarum mulierum,
et extra manus custodiretur Anglicorum ; imo tamen,
si judices dicerent, ad eorum beneplacitum obtulit
relinquere. Item, non dicetur relapsa si resumpserit,
quia licita fuit assumptio, nec id hæresis tangit materiam,
potissime quum resumpserit ut violentiæ
illatæ melius obviaret, et nuditatem suam cooperiret ;
quia Anglici vestes eidem muliebres abstulerant, et
necessitate compulsa resumpserit. Necessitas vero legi
nequaquam subjicitur (De furtis, cap. II). Et hæc in
processu vestro et testium depositionibus aperte sunt
probata.
« Item, et attendere possunt vestræ discretissimæ
bonitates dictam Johannam ex animo aut intentione
non deviasse a rectitudine veritatis, nec Deum offendisse.
Recessum. enim suum sine patris licentia, valide
ipsa excusat ; quoniam Deo inspirante id fecit,
et plus Deo obediendum est quam hominibus. Secundo,
ex pietate fecit, ne pater et mater ampliori
afflictione turbarentur ; et tertio, quoniam ab eisdem
propter hoc veniam impetravit. Se ipsam etiam excusat
ex appositione hujus nominis JHESUS in litteris
quas pro bellis mittebat ; quoniam et justum bellum
divina jussione fovebat, et quoniam id credidit licitum,
quia omnia in nomine Domini fieri debent (XXIII.
dist., can. « In nomine Domini »). Similiter, super
causata desperatione, saltando de turri, se excusat
valide ; non enim id fecisse fatetur desperationis causa, sed salvationis proprii corporis, et spe succurrendi
pluribus aliis bonis personis, et ex caritate et pietate
comminatæ destructionis villæ Compendii. Conformiter
excusanda venit super causato mendacio sui dicti
asserentis quod Angelus portaverat signum domino
nostro regi, cum genuflexione ante regem, etc. Respondetur
quod non est licitum mentiri ; licet tamen
caute respondendo, veritatem tacendo fingere, prout
egit Abraham coram Pharaone, ut in can. « Quæritur » § Ecce, caus. XXII. quæst. 2. Est autem ita quod
Angelus est nomen officii ; idem est enim quod Dei
nuntius, juxta illud : « Ego mitto Angelum meum,
qui præcedet, etc, » et loquitur de Johanne Baptista.
Johanna autem dicebat se nuntiam Dei ad regem ;
ideo merito poterat dicere quod Angelus, id est ipsa
nuntia Dei, portavit regi coronam, id est palmam
victoriæ per quam pervenit ad coronam. Et, si dicatur
quod de sancto Michaele expresse locuta est,
excusabilis est ; sic enim dicitur quod Seraphim
linguam Isaiae mundavit, non per se, sed per alium.
Illud enim quod fit per inferiores, in concernentibus
proprietates et officia superiorum, dicitur fieri per superiores
; ita in proposito Michael dicitur princeps militiæ
; et ita, Johanna, asserens ex Michaelis revelatione
hæc fecisse, dixit quod sanctus Michael hæc fecit ; et
quod ipsa fuerit ille Angelus, verba sua clare innuunt.
In his igitur mentita non fuit, sed caute locuta est.
« Item, neque culpanda est si dixerit se salvandam,
et id firmiter tenere et credere ; superaddidit enim
hoc futurum verum si servaret quod promisit Deo,
scilicet virginitatem tam animæ quam corporis. Qui
enim ita agit, in nullo peccat ; sed salvatur. Et si ipsa Johannæ pariter dixerit se a carceribus fore liberandam,
mendacium non commisit ; sic enim voces spirituum
taudem eidem protulisse asseruit quod sustineret,
martyrium patienter, quia in fine salvaretur ; et hæc
non modica liberatio censenda est ; et ita mendacium
non protulit. Fuerunt etiam spiritum habentes propheticum,
quandoque non in spiritu loquentes, qui veritatem
non enuntiarunt ; de quibus textus est in can. De
poenitentia, dist. II, « Quærendum, » et can. « Potest. »
Nec potuit reprehendi si ipsa dixerit Sanctas illas beatas
Katharinam et Margaretam diligere Gallicos et odire
Anglicos ; sic enim se exposuit quod diligunt quos
Deus diligit, et odiunt quos Deus odit, juxta illud :« Jacob dilexi, Esau odio habui. » Nec est veritas
quod dixerit se mortale peccatum non habere ; sed
dixit quod nescit an peccaverit mortaliter, et quod
non velit Deus quod ipsa fecerit vel faciat aliquid
propter quod anima sua sit onerata : quod esset
quando peccasset et dignam poenitentiam non egisset.
Quæ verba nil mali continent. Et per præmissa dictæ
Johannæ verba legitime excusantur.
« Item, et opus erit ad memoriam reducere falso
causatam Johannam ipsam oberrasse, quum dicatur se
noluisse submittere judicio Ecclesiæ militantis, etiam
declarata sibi differentia inter militantem Ecclesiam
et triumphantem, aut quia submissionem revocavit
quam in finalibus fecerat (ad quam tamen tenetur
omnis catholicus, ut in can. « Hæc est fides »
caus. xxiv, quæst. 1 ; can. « Ego Berengarius » De
consecratione, dist. iv.); quia ab his verius ipsa meruit
excusari : primo, quoniam quæ fecit ex revelatione,
lecit a bono spiritu, ut supradictum est, et ita, legem privatam secuta, a lege communi exempta est, ut in
juribus præallegatis. Imo, posito quod dabium esset
an hujusmodi revelatio a bono spiritu vel malo procederet,
quum hoc occultum sit, et soli Deo notum,
Ecclesia super hoc nihil judicat (in can. « Erubescant »
XXXII. dist.; can. « Christiana » caus. xxii, quæst. 5;
et in oap. « Tua nos » De simonia). Rursum in his
quæ concernunt articulos fidei tenemur sequi judicium
Ecclesiæ ; alias essemus hæretici (cap. I. De
summa Trinitate, libro VI). Similiter judicium Ecclesiæ
tenere debemus in his quæ tenet et docet Ecclesia
(in can. « Nolite » xi. dist. et in can. « Novit » xii.
dist., cum ibi nota); in aliis datur libertas tenendi quod
placuerit. In his enim secretis quilibet potest sequi
opinionem propriam ; et ita notat Johannes Andreæ
in cap. 1. De summa Trinitate, allegato libro VI.
« Item, excusatur ipsa Johanna si a principio se
non submisit, quoniam quid esset Ecclesia ab initio
ignoravit. Patet quia inter Sanctos et Ecclesiam nullara
differentiam fecit. De ista ignorantia testes in
hoc vestro processu deponunt. Sed illico dum intellexit
et fuit sibi declaratum, semper Ecclesiæ se
submisit. Testes etiara hujusmodi processus vestri
deponunt quod quidam, dolose fingentes se venire ad
eam ex parte regis, domini nostri, fortiter eidem suaserunt,
si evadere vellet, quod non submitteret se
Ecclesiæ, ut ita dolo decepta, forsan distulit ; et
tandem veraciter Ecclesiæ se submisit multipliciter,
ut in articulis concludentibus per actores vobis datis
exprimitur plenissime. Quam famen submissionem
judex ille, tunc episcopus Belvacensis, prohibuit per
notarium scribi ; et id testes deponunt ; attamen et per verba sua, in processu scripta, adhuc constat
dictam Johannam actu, verbo et opere et sacramentorum
communione, se submisisse Ecclesiæ.
« Item, et plurimum notari debent et memoriter
retineri falsitas et iniquitas inauditæ illi primo processui
admixtæ, quibus partes adversæ suum maculaverunt
processum ; quem exinde tamen volunt omnino
colorare et validare : videlicet certorum articulorum
numero duodecim expressio, et mendose a prætensis
confessionibus dictæ Johannæ extractorum. Super
quibus articulis, sic falso extractis, opiniones dederunt
sua manu scriptas aut signatas viri notabiles
ecclesiastici et litterati, alii in sacra pagina, alii in
jure canonico et civili magistri, doctores, licentiati,
baccalarii formati et jurisperiti, in magno numero ;
qui veraciter ab omni labe iniquitatis immunes et excusandi,
ac in consulendo decepti, præter operis illius
conscios, censendi sunt, taliter opinantes, præsumentes
veritatem confessatorum judicialiter per ipsam Johannam
sibi traditam et dictis articulis expressatam ; quum
tamen, in adversum, ex inimicitia capitali et deordinato
affectu, prætermissa veritas et expressa falsitas
in dictis falsis articulis locum sibi vindicarent apertura.
Nec vacat ab iniquitate quod dicti falsi articuli
duodecim incipientes Quædam foemina, missi sunt
opinantibus sic extracti.
« Item, et advertere opus est differentiam illam
inter veritatem confessatorum per ipsam Johannam,
et contenta dictorum articulorum falso extractorum satis esse deductam ad longum, per comparationem articulorum eorumdem et ipsorum confessatorum a vobis judicialiter factam, verificatam et
approbatam ; imo et per totum vestrum hunc processum
deductam plenissime, per testiumque et notariorum
depositiones, et notas originales, et per collationem
processuum primorum, et latissime per
tractatus plurium prælatorum, doctorum juris divini
et humani, luce clarius explanatam, et in articulis
ipsis concludentibus expositam luculenter. Quare ab
ampliori expressione differentiarum ipsarum supersedere,
causa brevitatis, expedire visum est.
« Item, et quoniam processus ille iniquus contra
dictam Johannam defunctam super illis falsis articulis
fere totus fundatus exstitit, opus erit dictorum articulorum
falso, dolose et mendose extractorum iniquitatem
sententialiter detegere, ipsosque falsos et
iniquos articulos palam comburere et lacerare, ad
veritatis manifestationem et opinantium super ipsis
excusationem validas et opportunas.
« Item, et ex præcedentibus mediis, causis et rationibus,
brevi verborum corapendio suprascriptis et
recollectis, juncto vestro hoc processu una cum testium
depositionibus omni exceptione majoribus, dictique
prioris iniquissimi, dolosi ac violenti processus ad
vestrum hunc judicium catholicum et veritate fulgidum
processum comparatione, seu confrontatione,
nec non illustrium virorum, prælatorum, doctorum
ac in utroque jure peritorum, dictis assertionibus,
disputatisque et elicitis veritatibus, libris, codicibus,
tractatibus et determinationibus, hic recollectis et
adjunctis, quos et quas hic reproducunt ipsi actores :
constat et patet apertissiræ dictura primum processum falsitate, dolo, iniquitate, mendositate et calumniæ
nullitate fuisse, fore et esse manifeste infectum, talemque
venire declarandum sententialiter ; saltem
cassandum, adnullandum, et comburendum palam,
publice et manifeste.
« Item, et pariter constat dictam bonæ memoriæ
defunctam Johannam d'Arc, dictam la Pucelle, toto
tempore vitæ suæ laudabiliter et honeste vixisse, a
tidei veritate et ecclesiastica doctrina et determinatione
non declinasse, nec aliquid asseruisse aut credidisse
quod hæresim saperet, aut fidei catholicæ ac sanctæ
Romanæ Ecclesiæ traditionibus obviaret, sed hæc
horrenda potius detestasse, neque illa crimina perpetrasse
quæ rei ipsi in suo processu et sententiis iniquis
temere ausi sunt exprimere et causari ; neque ex
eisdem, fama vulgante aut alia fida digna relatione,
ipsam quomodolibet diffamatam fuisse, seu alias confessam
in jure vel convictam, Domino cooperante. Quin
imo et sanctæ apostolicæ Sedis judicium et Concilii
generalis, ac fidelium doctorum sæpius judicium exquirere
visa est pariter et audita.
« Item, et ex nunc dicti rei, partes adversæ, spiritu
ducente maligno, ampliori iniquitate perseverantes,
obstinata malitia, falsitate, dolo et fraude damnata
convicti redduntur ; suspectique et iniqui judicantes,
qui mendose nimis dictam virginem innocentem scribere
ausi sunt, et contra veritatem notare illis perversis
qualitatibus et excessibus criminosis, in suis
falsis et iniquis sententia prima et secunda, dolose
commendatis, seu potius pro dolosis et exquisitis falsitatibus
ibidem expressis et falso descriptis, de facto
condemnarunt, primo ad carceres perpetuos, et secundo ad justitiæ sæcularis manus relinquendam,
tanquam recidivam, hæreticam et alias criminosam ;
sine gratia et misericordia ambulantes, solum suum
perversum insecuti hostilem et dolosum affectum,
innocentiæ, fragilitati, ignorantiæ et juventuti nolentes
attendere, imo verius excusationes ejusdem innocentis,
submissiones et protestationes inficere, et
eidem justitiæ vias perversa conspiratione penitus denegare
curantes ; mortem, proh dolor! et sanguinem
ejusdem sitientes undequaque.
« Item, et ex omnibus in vestro instanti processu
inquisitis, productis, recollectis et, juris ordine servato,
debite in scriptis redactis, constitit et constat
quod adversus ipsam defunctam, omni suæ innocentiæ
defensione privatam, etjuris prætermisso ordine, pro
solo libitu voluntatis suæ effrenis, in suo iniquo processu
partes adversæ nulliter et de facto perseveraverunt,
et ad iniquas tandem sententias processerunt,
per quarum alteram ipsam innocentem Johannam,
veiuti hæreticam aliisque criminibus irretitam, ad
carceres perpetuos, in pane et aqua, perpetuo condemnaverunt
; et per alteram, ipsam recidivam nequiter
protulerunt, ita ut curiæ sæculari relictam, ultimoque
traditam supplicio, post publicas, ignominiosas
et scandalosas prædicationes, innocentem virginem
oculatim intueri non erubuerunt igne peremptam et
crematam, in periculum animarum sic judicantium
inique, ac in opprobrium et ignominiam, injuriam
ac offensam matris, fratrum et consanguineorum ejusdem,
nunc conquerentium et actorum.
« Item, et illarum sententiarum iniquarum nullitas,
error manifestus, contradictio evidens, calumnia, incertitudo, obscuritas, crudelitas, ejus poena contra
omnem juris ordinem et sacras sanctiones, in sexu
fragili, aetate juvenili, post tantas afflictiones carcerum,
perturbationes examinum, per vestri hujusmodi processus
deductionem juridicam, manifestantur apertissime
: tum ex primi processus serie, et eorum in hoc
processu depositionibus fide dignis, qui dicto primo
processui interfuerunt, inquibus constat ipsam Johannam
criminum qualitatibus eidem attributis non esse
convictam ullomodo, sola forsan vestium excepta virilium
delatione ; de qua tamen excusabilis censenda est,
ut ex præmissis bene constat. Tum secundo, quoniam
omnibus attentis, ex dictis criminibus, in fidei materia
non peccavit, nec valuit hæretica censeri, vel
relapsa : quæ nullam fecit validam abjurationem, imo
illam penitus non intellexit ; et quod non intellexit,
non potuit valide abjurare. Tum tertio, quoniam
relapsa dici non meruit in hæresim, quæ lapsa non
fuit ; quoniam catholica dedit responsa, et mente
infecta non reperitur, nec pertinax adversus fidem et
ecclesiasticam doctrinam, aliqua dogmata aut errores
seminavit vel adstruxit aut sustinuit animo indurato.
Tum quarto, quoniam generali nomine qualitatum
criminalium sibi impositarum notari non valuit sententialiter,
quemadmodum in sententiis ipsis notatur,
nisi particulares ibidem defectus cum circumstantiis
designentur et subaddantur ; talis enim vaga causatio
reprobata est, et non admittitur de jure in libellis aut
sententiis, præsertim criminaliter intentatis, et cum
alterius discrimine, etiam secundum leges et canones,
moderatio poenæ debita a judice censetur, propter ætatis
teneritudinem et sexus fragilitatem ; quemadmodum hæc omnia in scriptis articulis concludentibus sunt
deducta et inscripta.
« Item, et, si ex illatis tantis opprobriis, vexationibus,
injuriis, molestiis et calumniis, suæ parenti per
judices illos iniquitate et dolo refertos, mater, fratres,
parentes scandalosam tantæ perniciosæ exsecutionis
materiam ægre tulerunt ; si sui honoris reparationem,
suæque tantæ parentis innocentiam, expurgationem et
famæ propriæ reparationem procurare decreverunt :
et merito veniunt commendandi, ita ut, valido ducti
consilio et animosa virtute constantes, sanctæ apostolicæ
sapremæ Sedis petierunt justitiam, et juris provideri
remediis instanter proclamarunt ; quorum
tandem sancta apostolica Sedes, justis inclinata clamoribus,
vestrarum toto orbe catholico notissimarum
celebrium claritatum confisa rectitudine, sapientia et
profundissima literrarum et sapientiæ copia, mandatum
apostolicæ auctoritatis vobis direxit, in vim cujus,
recto deductus tramite rationis, vester iste processus
consummationem optatam, Domino dirigente, vestris
opera, providentia et labore, propinquis dierum
assumere disponitur seu creditur intervallis.
« Restat igitur, reverendissimi patres, clarissimi
judices ac doctores disertissimi, ut vestræ luce veritatis
splendor effulgeat ; nebulosa iniqui processus
prioris caligo diffugiat et revolvatur ; ac declaretur
abominanda processus ejusdem sententiarumque et
sequelarum suarum iniquitas, error atque pernicies ;
ac imposita fidei macula eidem Johannæ atque suis
penitus deleatur ; * famaque redolens et innocentia
ejusdem restauretur et declarelur ; reparationes atque
memoriæ requisitæ superius, declarentur ex suprema illa et inconcussa auctoritate sacrosanctæ Sedis apostolicæ
vestris clarissimis et colendissimis paternitatibus
commissa, quas largitor donorum æternorum
remunerare dignetur in gloria. Amen. »
* Rédaction du manuscrit de Notre-Dame.
Resurgat autem [ipsa Johanna] expurgata labe erroris seu pravitatis
hæreticæ omnique dudum sibi imposita macula fidei adversa
Ecclesiæ ; et fama redolens, et innocentia dictæ Johannæ virginis,
matris, fratrumque suorum et omnis parentelæ ejusdem ; ita ut
tandem, per vestrum patens judicium, judicialem ac perpetuam
sententiam, fines juridici, conclusiones, reparationes, prædicationes
solenmes, signa, imagines, cruces, fundationes, ac signa alia publica
perpetuarum reparationis et memoriæ, aliæque conclusiones in petitione
actorum, suisque articulis concludentibus, ad plenum expressæ,
eisdem actoribus plenissime decernantur in posterum, irrefragabiliterque
per vos ordinata observari mandentur ; suprema illa et inconcussa
apostolicæ Sedis auctoritate jubente, vestris in hac parte
commissa clarissimis et colendissimis dominationibus paternitatibusque
dignissimis, in ævum a largitore donorum æternorum perenniter
remunerandis in gloria.
Source :
Texte original latin : "Procès de Jeanne d'Arc" - T.III - Jules Quicherat, p. 275.
Traduction : Pierre Duparc, t.IV, p. 194.
Notes :
1 Lisez Calixto papa III.
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