Son histoire
par Henri Wallon

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Procès de condamnation - Procès ordinaire
Deuxième séance - 28 mars 1431.
articles 31 à 70

e dit jour de mercredi furent présents révérends pères, seigneurs et maîtres : Gilles, abbé de Fécamp ; Pierre, prieur de Longueville, Jean Beaupère, Jacques de Touraine, Erard Emengart, Maurice du Quesnav, Nicolas Midi, Pierre Maurice, Guillaume Le Boucher, Jean de Nibat, Jean Le Fèvre, Jean de Chastillon, Jacques Guesdon, Gérard Feuillet, docteurs en théologie sacrée ; Raoul Roussel, docteur en l'un et l'autre droit ; Robert Le Barbier, licencié en droit canon ; William Haiton, Nicolas Couppequesne, bacheliers en théologie sacrée ; Jean Guérin, Denis Gastinel, Jean Le Doulx, bacheliers en l'un et l'autre droit ; Jean Pinchon, Jean Basset, Jean de La Fontaine, Jean Colombel, Jean Duchemin, bacheliers en droit canon ; André Marguerie, archidiacre de Petit-Caux, Jean Alespée, Nicolas Caval, Geoffroy du Crotay, licenciés en droit civil ; Guillaume Desjardins, Jean Tiphaine, docteurs ; Guillaume de La Chambre, licencié en médecine ; William Brolbster et John de Hampton, prêtres.
  Devant eux a été continuée la lecture commencée la veille, des articles du libelle produit par le promoteur. Leur contenu a continué d'être exposé à Jeanne en français, article par article ; elle a été interrogée sur chacun de ses articles et a continué à y répondre ainsi qu'il suit.

  Fut requise de faire serment,
  A quoy elle respondit que voluntiers de ce que touchoit son procez, elle diroit verité
  Et ainsi le jura.
  Et premièrement, quant à l'article de l'habit et des armes, respond que l'habit et les armes qu'elle a portees, a esté par le congé de Dieu.
  Et sur ce qu'elle fut interroguee de laisser son habit, respond qu'elle ne le laisseroit point sans le congié de nostre Seigneur ; et luy deust trencher la teste. Mais se il Luy plaist, elle le metra tantost jus (1).



Article 31. "Item ladite Jeanne, au temps de sa jeunesse et depuis, s'est vantée, et de jour en jour se vante, d'avoir eu plusieurs révélations et visions, sur lesquelles, bien qu'elle air été sur ce charitablement admonestée et dûment et juridiquement requise sous serment de droit, elle n'a voulu et ne veut faire nul serment ; bien plus elle se refuse à le déclarer suffisamment par parole ou signe, mais elle a différé, contredit et refusé de le faire, diffère, contredit et refuse. Et en refusant formellement, à plusieurs et à diverses fois elle a dit et assuré, en jugement et ailleurs, qu'elle ne nous découvrirait point ses révélations et visions, dût-on lui trancher et la faire tirer par les chevaux ; qu'on ne lui arracherait pas de la bouche le signe que Dieu lui révéla et par quoi elle connut qu'elle venait de Dieu."

- A ce trente et unième article, Jeanne répond que, de révéler le signe ou autres choses contenues en l'article, elle peut bien avoir dit qu'elle ne le révélerait point. Et ajoute qu'en sa confession autrefois faite, il doit y avoir que, sans le congé de Notre Seigneur, elle ne révélerait le signe.

  Respond que a reveler le signe contenu en l'article, elle pourroit bien avoir dit qu'elle ne le reveleroit point.
  Et dit que, en sa confession autresfoys faicte, dit que, sans congié de nostre Seigneur, elle ne le reveleroit point.


  [Or le 22 février, elle a dit qu'il n'est point de jour qu'elle n'entende cette voix, et aussi qu'elle en a bien besoin.
  Item, le samedi 24 février, dit que cette nuit-là, la voix lui a dit beaucoup de choses pour le bien de son roi et qu'elle aurait voulu que le roi les sût pour lors, dût-elle ne pas boire de vin jusqu'à Pâques. Car il en serait bien plus aise à diner.
  Item, le mardi 27 février, dit qu'elle a bien dit en une fois à son roi tout ce qui lui avait été révélé, car cela le touchait bien. Item, ce mardi, elle a dit qu'elle adressa lettres à son roi contenant qu'elle envoyait pour savoir si elle entrerait dans la ville où était ledit roi ; et qu'elle avait bien fait cent cinquante lieues pour venir vers lui à son secours, et quelle savait pour lui beaucoup de bonnes choses. Et lui semble que dans lesdites lettres était contenu qu'elle le reconnaîtrait bien entre tous les autres.
  Item, le jeudi Va au secours du Roi de France, tu lui rendras son royaume1er mars, interrogée quelle figure avait saint Michel répondit qu'elle ne lui vit pas de couronne, et de ses vêtements rien ne sait. Interrogée si ledit saint Michel était nu, répondit :"Pensez-vous que Notre Seigneur n'ait de quoi le vêtir ?"
  Item le jeudi 15 mars, requise de dire comment elle pensa s'échapper du château de Beaulieu, entre deux pièces de bois, répondit qu'onques ne fut prisonnière en aucun lieu qu'elle ne s'échappat volontiers ; et, étant dans ce château, elle eût enfermé ses gardes dans la tour, n'eût été le portier qui l'avisa et la rencontra. Item dit, qu'à ce qu'il lui semble, il ne plaisait pas à Dieu qu'elle s'échappât pour cette fois, et qu'il fallait qu'elle vît le roi des Anglais, comme ses voix le lui avaient dit, ainsi qu'il est écrit ci-dessus. Item, ce même jeudi, interrogée sur la grandeur et stature de l'ange qui lui apparut, elle dit que le samedi elle en répondrait avec l'autre chose dont elle doit répondre, assavoir ce qu'il en plaira à Dieu. Ce même jour, interrogée sur ce qu'elle a dit pour dire vérité on est parfois pendu, et si elle sait en elle quelque crime ou faute par quoi elle put [ou dût] mourir, si elle ne les confessait, répondit que non.
  Item, le samedi 17 mars, interrogée sur l'âge et les vêtements de sainte Catherine et de sainte Marguerite, répondit : "Vous aurez sur ce la réponse que vous avez eue de moi ; et n'en aurait autre chose ; et je vous en ai répondrait tout au plus certain ce que je sais.]



Article 32. "Item, par là vous pouvez et devez véhémentement présumer que ces révélations et visions, si ladite Jeanne les eut jamais, viennent plutôt du fait d'esprits menteurs et malins que de bons ; ainsi doit être tenu par tous, attendu surtout la crauté, l'orgueil, la tenue, les actions, les mensonges, les contradictions signalées en plusieurs et divers articles, et qui peuvent bien être dites et retenues comme présomptions juridiques, entièrement légitimes."

- Ce trente-deuxième article, le mercredi après la fête des Rameaux, 28 mars, Jeanne répond qu'elle le nie, et qu'elle a agi par révélations des saintes Catherine et Marguerite, et qu'elle le soutiendra jusqu'à la mort.   Item, ce même jour, dit qu'elle fut conseillée par certains de son parti de mettre JHESUS MARIA ; et sur certaines de ses lettres mettait bien JHESUS MARIA, et sur les autres, non.
  Item dit que quant à ce point où il y a écrit : "Tout ce qu'elle a fait c'est par le conseil de Notre Seigneur", il doit y avoir :  "Tout ce que j'ai fait de bien."
  Interrogée, ce même jour, si, en allant devant La Charité elle fit bien ou mal, répond : "Si j'ai mal fait, on s'en confessera".
  Interrogée si elle faisait bien d'aller devant Paris, répond que les gentilshommes de France voulurent aller devant Paris ; et de ce faire, lui semble qu'ils firent leur devoir d'aller contre leurs adversaires.

  Respond qu'elle nye et ce qu'elle avoit faict, ce avoit esté par revelacion de saincte Katherine et saincte Margueritte. Et le soustiendra jusques a la mort.
  Item, dit qu'elle fut conseillee par aulcun de son party qu'elle mist en ses lectres : JHESUS MARIA ; ce qu'elle a faict en aulcunes, et aux aultres, non.
  Dit que, quand aux poinctz desdictes lectres, ou il y a escript : Tout ce qu'elle a faict, c'est par le conseil de nostre Seigneur, il doibt avoir : Tout ce que j'ay faict de bien.
  Interrogué si, d'aller devant La Charité, elle fist bien ou mal, respond : Se elle a faict mal, elle s'en confessera.
  Interroguee se elle jaisoit bien de aller devant Paris, respond que les gentilzhommes de France voulurent aller devant Paris. Ilz luy semble que ilz feirent bien de aller contre leurs adversaires.



Article 33. "Item, ladite Jeanne, présomptueusement et témérairement, s'est vantée et se vante de connaître l'avenir et d'avoir connu le passé, de découvrir les choses présentement occultes ou cachées ; et, ce qui est l'attribut de la divinité, elle se l'attribue à elle-même, humaine créature, simple et indocte."

- A ce trente-troisième article, ce mercredi 28 mars, Jeanne répond : "Il appartient à Notre Seigneur de faire des révélations à qui Il lui plait" ; et de l'épée et autres choses à venir qu'elle a dites, c'est par révélation.

  Dit que il est en nostre Seigneur de reveler a qu'il luy plaist, tant de l'espee que aultres choses advenir. Et ce qu'elle en a dit, a esté par revelacion ; et se rapporte a ce que elle en a respondu.

   [Or le samedi 24 février, elle a dit que les Bourguignons auront guerre, s'ils ne font ce qu'ils doivent ; et qu'elle le sait par sa voix.
  Item le mardi 27 février, interrogée si, quand elle vint à l'assaut devant la bastille d'Orléans, elle n'a point dit à ses gens qu'elle recevrait sagettes, viretons, pierres des bombardes, répondit que non ; et il y eut cent de blessés, et plus. Mais dit bien à ses gens qu'ils n'eussent point de doute, et qu'ils lèveraient le siège. Interrogée, ce même jour, devant quelle bastille elle fit retirer ses hommes, répondit qu'elle n'en a mémoire. Dit aussi qu'elle était bien assurée de faire lever le siège d'Orléans, par révélation à elle faite ; et ainsi l'avait-elle dit à son roi, avant que d'y venir. Dit aussi que, à l'assaut de la bastille du Pont, elle fut blessée au cou d'un vireton ; mais eut grand réconfort de sainte Catherine, et fut guérie dans les quinze jours ; et ne laissa point de chevaucher et besogner. Interrogée si elle eut prescience qu'elle serait blessée, répondit qu'elle le savait bien et l'avait dit à son roi, mais que, nonobstant, elle n'aurait pas laissé de besogner. Et cela lui fut révélé par les voix des saintes Catherine et Marguerite. Dit outre que c'est elle qui fut la première à poser l'échelle en haut, à la bastille du Pont ; et, comme elle la levait, elle fut blessée au cou d'un vireton.
  Le jeudi 1er mars, elle a dit, qu'avant qu'il soit sept ans, les Anglais perdraient plus grand gage qu'ils ne le firent devant Orléans. Dit aussi que lesdits Anglais auront plus grande perte qu'onques n'eurent en France ; et ce sera par la grande victoire que Dieu enverra aux Français. Et cela elle le sait par révélation qui lui a été faite ; et, avant sept ans, ces choses adviendront ; et elle était bien courroucée que ce fut tant différé. Item, dit, comme plus haut, qu'elle sait cela par révélation, aussi bien qu'elle savait que nous, évêque, étions devant elle. Elle a dit : "Je le sais aussi bien comme vous êtes ici !" Interrogée quelle année cela arrivera, répondit : "Vous n'aurez pas encore cela ; bien voudrais-je que ce fût avant la Saint-Jean. Ce même jour, interrogée si elle a dit que cela adviendrait avant la Saint-Martin d'hiver, répondit qu'elle avait dit qu'avant la Saint-Martin d'hiver on verrait bien des choses ; et ce pourrait être que ce soient les Anglais qui seront rués sus et couchés à terre. Interrogée sur ce qu'elle a dit à John Grey, son garde, dans la prison, cette fête de la Saint-Martin, répondit : "Je vous l'ai dit." Interrogée par qui elle sait que cela adviendra, répondit qu'elle le sait par les saintes Catherine et Marguerite. Item, ce dit jeudi 1er jour de mars, interrogée quelles promesses les saintes Catherine et Marguerite lui firent, répondit : "Ce n'est pas du tout de votre procès !" Et entres autres choses, elles lui dirent que son roi serait restitué dans son royaume, le veuillent ou non ses adversaires. Item ce même jour, dit qu'elle sait bien que son roi gagnera le royaume de France ; et le sait bien, comme elle sait que nous sommes là.
  Le samedi 3 mars, interrogée si ses voix ne lui ont rien dit en général, répondit : "Oui, vraiment, elles me dirent que je serai délivrée ; mais ne sais ni le jour ni l'heure ; et que hardiment je vous fasse bonne chère !"
  Le samedi 10 mars, interrogée si elle fit cette sortie de Compiègne du commandement de ses voix, répondit qu'en la semaine de Pâques dernièrement passée, étant sur les fossés de Melun fut dit par les voix de sainte Catherine et de sainte Marguerite qu'elle serait prise avant la Saint-Jean, et qu'il fallait qu'ainsi fût fait ; qu'elle ne s'ébahit pas et prît tout en gré, et que Dieu lui aiderait. Ce même jour, interrogée si, depuis ce lieu de Melun, il ne lui fut point dit par ses voix qu'elle serait prise, répondit que oui, par plusieurs fois et presque tous les jours. Et requérait de ses voix, quand elle serait prise, qu'elle mourût bientôt, sans long travail de prison ; et ses voix lui dirent qu'elle prît tout en gré et qu'ainsi le fallait faire ; mais ne lui dirent point l'heure ; et si elle l'avait sue, elle n'y fût point allée. Et avait plusieurs fois demandé pour savoir l'heure de sa prise mais elles ne lui dirent point. Ce même jour, dit que, quand elle dut partir pour aller à son roi, lui fut dit par ses voix : "Va hardiment ; quand tu seras devers le roi, il aura bon signe de te recevoir et croire en toi !"
  Le lundi 12 mars, interrogée comment elle eût délivré le duc d'Orléans, répondit qu'elle eût pris assez d'Anglais dans ce pays-ci pour le ravoir et racheter ; et si elle n'en eût pris assez, elle eût passé la mer pour l'aller quérir en Angleterre, à puissance. Interrogée si les saintes Catherine et Marguerite lui avaient dit sans condition et absolument qu'elle prendrait suffisamment de gens pour avoir le duc d'Orléans, qui était en Angleterre, ou autrement qu'elle passerait la mer pour l'aller quérir et l'amener avant trois ans, répondit que oui, et qu'elle dit à son roi qu'il la laissât faire au sujet des prisonniers. Dit en outre que si elle avait duré trois ans, elle l'eût délivré. Item dit qu'elle n'avait plus bref terme que trois ans et plus long que d'un an ; mais n'en a pas de présent, mémoire.
  Le mercredi 14 mars, interrogée quel est le péril et danger dans lequel nous, évêque et autres clercs, nous nous mettions en lui faisant ce procès, répondit que sainte Catherine lui a dit qu'elle aurait secours et elle ne sait si ce sera d'être délivrée de la prison ou, quand elle sera en jugement, s'il ne surviendrait pas quelque trouble au moyen duquel elle pourrait être délivrée ; et pense que ce sera l'un ou l'autre ; et le plus souvent ses voix lui disent qu'elle sera délivrée par grande victoire. Et après, ses voix lui disent encore : "Prends tout en gré, ne te chaille de ton martyre !"]



Article 34. "Item ladite Jeanne, persévérant dans ses témérité et présomption, a dit, répandu et publié qu'elle reconnaît et discerne les voix des archanges, des anges, des saints et des saintes de Dieu, affirmant qu'elle sait distinguer leur voix des voix humaines."

- A ce trente-quatrième article, ce mercredi 28 mars, ladite Jeanne répond qu'elle s'en tient à ce qu'elle en a dit. Et au sujet de sa témérité et de la conclusion de l'article, s'en rapporte à Notre-Seigneur, son juge.

  S'en rapporte a nostre Seigneur son juge.

  [Or, le mardi 27 février, interrogée si c'était la voix d'un ange qui lui parlait, ou si c'était la voix d'un saint ou d'une sainte, ou celle de Dieu, directement, répondit que cette voix était celle de sainte Catherine ou de sainte Marguerite. Et leurs figures sont couronnées de belles couronnes, moult richement et moult précieusement : "Et de ce, dit-elle, j'ai congé de Notre Seigneur. Si vous en faites doute, envoyez à Poitiers où autrefois j'ai été interrogée". Item, ce même jour, interrogée comment elle reconnait l'une de l'autre ses saintes, répondit qu'elle les reconnaissait pour le salut qu'elles lui font. Dit aussi qu'elle les discernait parce qu'elles se nomment à elle.
  Item, le jeudi 1er mars, interrogée comment elle sait que son apparition est homme ou femme, répondit : "Je le sais bien et reconnais les saintes à leur voix" ; et parce qu'elles le lui révélèrent. Ce même jour, interrogée quelle figure elle y voit, répondit qu'elle voit le visage. Interrogée si elles ont des cheveux, répondit : "Il est bon à savoir !" Interrogée s'il y avait quelque chose entre leurs couronnes et leurs cheveux, répondit que non. Interrogée si leurs cheveux étaient longs et pendants, répondit : "Je ne sais". Dit aussi qu'elle ne sait s'il y avait des bras ou d'autres membres figurés. Item dit qu'elles parlaient très bien, et bellement, et les entendait très bien. Interrogée comment elles parlaient puisqu'elles n'avaient pas de membres, répondit : "Je m'en rapporte à Dieu !"
  Item, le 15 mars, interrogée si elle n'a point d'autres signes que ces apparitions fussent de bons esprits, répondit : "Saint-Michel me le certifia avant que les voix me vinssent." Interrogée comment elle reconnut que c'était saint Michel, répondit : "Par le parler et le langage des anges !" Et croit fermement que c'étaient des anges. Interrogée "J'avais 13 ans quand j'entendis une voix venant de Dieucomment elle crut que c'était langage des anges, répondit qu'elle le crut assez vite et eut cette volonté de le croire. Et dit en outre que saint Michel, quand il vint à elle, lui dit que sainte Catherine et sainte Marguerite viendraient à elle, et qu'elle agit suivant leur conseil ; et qu'elles étaient ordonnées pour la conduire et conseiller en ce qu'elle avait à faire ; et qu'elle les crût en ce qu'elles lui diraient, et que c'était par le commandement de Notre Seigneur. Interrogée, si le Diable se mettait en forme d'ange, comment elle reconnaitrait que ce fut bon ange ou mauvais, répondit qu'elle reconnaitrait bien si c'était saint Michel, ou chose contrefaite à sa ressemblance.
  Item répondit que, la première fois, elle eut grand doute si c'était saint Michel, et cette première fois, eut grand peur ; et le vit maintes fois avant qu'elle sût que c'était saint Michel. Item, interrogée comment elle reconnut cette fois-là que c'était saint Michel, plutôt que la première fois où il lui était apparu, répondit que la première fois elle était jeune enfant et en eut peur ; et depuis, saint Michel lui enseigna et montra tant, qu'elle crut fermement que c'était lui. Interrogée quelle doctrine il lui enseigna, répondit que, sur toutes choses, il lui disait qu'elle fût bonne enfant, et que Dieu l'aiderait ; et entre autres choses lui dit qu'elle viendrait au secours du roi de France ; et une grande partie de ce que l'ange lui enseigna est dans ce livre ; et lui racontait l'ange la pitié qui était au royaume de France.]



Article 35. "Item, ladite Jeanne s'est vantée et affirma qu'elle savait discerner ceux que Dieu aime mieux et ceux qu'il hait."

- A ce trente-cinquième article, ce mercredi 28 mars, elle répond : "Je m'en tiens à ce que j'en ai autrefois répondu, au sujet du roi et du Duc d'Orléans" ; et des autres gens, elle n'en sait rien. Item dit qu'elle sait bien que Dieu aime mieux son roi et le duc d'Orléans, pour l'aise de leurs corps ; et dit qu'elle le sait par révélation.

  Et dit qu'elle sçait bien que Dieu ayme mieulx son roy et le duc d'Orleans que aulcuns aultres ; et qu'elle sçait par revelacion.

  [Or, le jeudi 22 février, elle a dit qu'elle sait bien que Dieu aime bien le duc d'Orléans, et aussi qu'elle avait eu plus de révélations sur lui que sur homme vivant, excepté son roi.
  Item, le samedi 24 février, interrogée si elle pouvait tant faire sur cette voix qui lui apparaissait qu'elle voulût obéir et porter message à son roi, répondit qu'elle ne savait si cette voix voulait obéir à moins que ce fût la volonté de Dieu et que Notre Seigneur y consentît : "Et s'il plait à Messire, il pourrait bien faire révéler à son roi et de cela, elle serait bien contente." Interrogée pourquoi cette voix ne parle pas maintenant avec son roi, comme elle le faisait quand elle était en présence de Jeanne, répondit qu'elle ne sait si c'est la volonté de Dieu.
  Item, le samedi 17 mars, interrogée comment elle sait que sainte Catherine et sainte Marguerite haïssent les Anglais, répondit : "Elles aiment ce que Dieu aime et haïssent ce que Dieu hait." Interrogée si Dieu hait les Anglais, répondit que de l'amour ou de la haine que Dieu a aux Anglais, ou de ce que Dieu fera à leurs âmes, elle ne sait rien ; mais sait bien qu'ils seront boutés hors de France, excepté ceux qui y mourront ; et que Dieu enverra victoire aux Français contre les Anglais. Interrogée si Dieu était pour les Anglais, quand ils étaient en prospérité en France, répondit qu'elle ne sait si Dieu haïssait alors les Français, mais croit qu'il voulait permettre de les laisser battre pour leurs péchés, s'ils y étaient.]



Article 36. "Item ladite Jeanne a dit, affirmé et s'est vantée, dit, affirme et se vante, de jour en jour, qu'elle a su et sait véritablement, et que non seulement elle-même, mais d'autres hommes encore, sur sa requête, ont connu et reconnu véritablement certaine voix, qu'elle nommait sa voix, qui venait à elle ; bien que, de sa nature, la dite voix, qu'elle a désignée et désigne, eût été et soit invisible pour toute créature humaine."

- A ce trente-sixième article, ladite Jeanne répond qu'elle s'en tient à ce qu'autrefois elle en a répondu.

  Et des aultres choses, elle en a respondu.

  [Or ce jeudi 22 février, elle a dit que ceux de son parti reconnurent bien que la voix était envoyée de par Dieu, et qu'ils virent et reconnurent cette voix ; et qu'elle le savait bien. En outre dit que son roi et plusieurs autres ouïrent et virent les voix qui venaient à ladite Jeanne : là était Charles de Bourbon, et deux ou trois autres.]


Article 37. "Item ladite Jeanne avoue avoir fait fréquemment le contraire de ce qui lui a été enjoint et ordonné par les révélations qu'elle se vante d'avoir de Dieu ; par exemple, quand elle s'éloigna de Saint-Denis, après l'assaut de Paris ; quand elle sauta de la tour de Beaurevoir, et en d'autres circonstances. En quoi il est manifeste qu'elle n'a pas eu révélations de Dieu, ou bien qu'elle a méprisé les préceptes et révélations expresses par lesquelles elle se dit être en tout régie et gouvernée. Et en outre elle a dit, quand elle eut commandement de ne pas sauter de la tour, et qu'elle fut tentée de faire le contraire, qu'elle ne pouvait faire autrement. En quoi elle semble mal juger du libre arbitre de l'homme et tomber dans l'erreur de ceux qui avancent qu'il est nécessité par des dispositions fatales, ou quelque chose de semblable."

- A ce trente-septième article, ce mercredi 28 mars, elle répond : "Je m'en tiens à ce qu'autrefois j'en ai répondu." Toutefois elle ajouta qu'à son départ de Saint-Denis elle eut congé de s'en aller.
  Interrogée si, en agissant contre le commandement de ses voix, point pécher mortellement, répond : "J'en ai autrefois répondu et m'en remets à ladite réponse." Et, de la conclusion, elle s'en attend à Notre Seigneur.

  Toutesfoys elle dit que a son partement de Sainct Denis, elle eut congié.
  Interroguee se faire contre le commandement de ses voix, elle cuide point pecher mortellement, respond : J'en ay aultresfoys respondu. Et m'en actendz a ladicte responce.
  Et de la conclusion de l'article, elle s'en actend a nostre Seigneur.


  [Or, le jeudi 22 février, elle a dit que sa voix lui dit qu'elle demeurât devant Saint-Denis en France ; mais contre sa volonté, les seigneurs l'emmenèrent. Cependant, si elle n'avait pas été blessée, elle ne fût point partie. Et fut blessée dans les fossés de Paris. Item, a dit qu'en cinq jours elle fut guérie.
  Item interrogée, le samedi 10 mars, si ses voix lui eussent commandé qu'elle sortit de Compiègne et signifié qu'elle serait prise, elle y fût allée, répondit que si elle eût su l'heure et qu'elle dût être prise, elle n'y fût pas allée volontiers ; toutefois elle eût fait le commandement de ses voix à la fin, quelque chose qui lui dût advenir.
  Item, le jeudi 15 mars, interrogée si onques ne fit quelque chose contre le commandement et la volonté de ses voix, répondit qu'elle a pu et su faire, elle l'a fait et accompli à son pouvoir. Quant au saut de la tour de Beaurevoir, qu'elle fit contre le commandement de ses dites voix, elle ne s'en put tenir ; et quand ses voix virent sa nécessité, et qu'elle ne savait et ne pouvait s'en tenir, elles portèrent secours à sa vie et la gardèrent de se tuer. Et dit en outre que, quelque chose qu'elle fît onques en ses grandes affaires, ses voix l'ont toujours secourue ; et c'est signe qu'elles sont de bons esprits. Item, ce même jour, interrogée si elle croit que ce n'est point grand péché de courroucer sainte Catherine et sainte Marguerite qui lui apparaissent, et d'agir contre leur commandement, répondit que oui, et le sait amender ; et que le plus qu'elle les courrouça onques, ce fut du saut de Beaurevoir, à son avis. Et de cela elle leur a crié merci, et des autres offenses qu'elle peut avoir faites envers elles.]



Article 38. "Item ladite Jeanne, bien que dès le temps de sa jeunesse ait dit, fait et perpétré nombre de méfaits et de crimes, péchés et délits honteux, cruels, scandaleux, déshonorants inconvenants pour son sexe, néanmoins elle a dit et afflrmé que tout ce qu'elle fit, elle l'a fait de par Dieu et suivant sa volonté : qu'elle ne fit et n'a rien fait qui ne provienne de Dieu, par les révélations des saints anges et des saintes vierges Catherine et Marguerite."

- A ce trente-huitième article Jeanne répond qu'elle s'en tient à ce qu'autrefois elle en a dit.

  Et sur plusieurs interrogacions qu'on luy faisoit a respondu qu'elle s'en rapporte a ce qu'elle en a aultresfoys respondu.
  Et de la conclusion, a nostre Seigneur.


  [Or, le samedi 24 février, elle a dit que, n'était la grâce de Dieu, elle ne saurait rien faire. Item, ce Jeanne et son père aux champs - 1493même jour, interrogée si ceux de Domrémy tenaient le parti des Bourguignons ou le parti adverse, dit qu'elle ne connaissait au village qu'un Bourguignon et qu'elle eût bien voulu qu'il eût la tête coupée, voire s'il eût plu à Dieu. Interrogée si la voix lui dit en sa jeunesse qu'elle hait les Bourguignons, répondit que, depuis qu'elle comprit que les voix étaient pour le roi de France, elle n'aima point les Bourguignons.
  Interrogée, le jeudi 15 mars, si au fait de la guerre elle n'a rien fait sans le congé de ses voix, répondit : "Vous en êtes tous répondu ; lisez bien votre livre, et vous la trouverez ; et toutefois dit qu'à la requête des gens d'armes fut faite une vaillance d'armes devant Paris, et qu'aussi elle alla devant La Charité à la requête de son roi. Et ce ne fut ni contre ni par le commandement de ses voix. Interrogée si onques elle fit quelque chose contre leur commandement et volonté, répondit comme il est rapporté à l'article précédent.]



Article 39. "Item, bien que le juste péche sept fois en un jour, cependant Jeanne a dit et publié qu'elle n'a jamais fait, ou du moins n'a jamais cru faire, œuvres de péché mortel, nonobstant qu'elle ait accompli en réalité toutes les actions qu'ont accoutumé de faire les gens de guerre, et de pires, ainsi qu'il est déclaré dans les articles qui précèdent et suivront."

- A ce trente-neuvième article, le mercredi 28 mars, elle répond : "J'en ai répondu ; je m'en attends à ce que autrefois j'en ai dit."

  Respond : J'en ay respondu. Je m'en actend que autresfois, j'en ay dit.

  [Or, le samedi 24 février, interrogée si elle sait qu'elle est en la grâce de Dieu, répondit : "Si je n'y suis, Dieu veuille m'y mettre, et si j'y suis, Dieu m'y veuille tenir." Et dit qu'elle serait la plus dolente du monde si elle savait n'être pas en la grâce de Dieu. Dit que, si elle était en grand péché, elle croit que la voix ne viendrait pas à elle, et qu'elle voudrait que chacun l'entendit aussi bien qu'elle.
   Item, le jeudi 1er mars, elle a dit qu'elle a grande joie quand elle voit sa voix ; et lui semble, quand elle la voit, qu'elle n'est pas en péché mortel. Item, dit que les saintes Catherine et Marguerite la font volontiers se confesser à tour de rôle. Item, dit que si elle est en péché mortel, elle ne le sait. Interrogée si, quand elle se confesse, elle croit être en péché mortel, répondit qu'elle ne sait si elle a été en péché mortel, mais n'en croit pas avoir fait les œuvres : "Jà ne plaise à Dieu, dit-elle, que j'y fusse onques, et jà ne lui plaise que j'en fasse les oeuvres ou les aie faites, par quoi mon âme en soit chargée.
  Item, le mercredi 14 mars, interrogée si ce n'est pas péché mortel de prendre un homme à rançon et de le faire mourir prisonnier, répondit qu'elle ne l'a point fait. Et, comme on lui parlait d'un nommé Franquet d'Arras, qui lui fut baillé à Lagny pour être mis à mort, répondit qu'elle fut consentante à le faire mourir, s'il l'avait mérité, et pour ce qu'il confessa être meurtrier, larron et traître. Et dit que son procès dura quinze jours ; et en furent juges le bailli de Senlis et les gens de la justice de Lagny. Et dit qu'elle requérait d'avoir Franquet pour un homme de Paris, hôtelier de l'hôtellerie de l'Ours ; et quand elle sut que ce seigneur était mort et que le bailli lui eut dit qu'elle voulait faire grand tort à la justice en délivrant ce Franquet, elle dit alors au bailli : "Puisque mon homme est mort, que je voulais avoir, faites de celui-là ce que devrez faire par justice !" Et, quand on lui a rapporté qu'elle avait assailli Paris un jour de fête ; qu'elle avait eu le cheval de monseigneur l'évêque de Senlis ; qu'elle s'était laissé choir de la tour de Beaurevoir ; qu'elle portait l'habit d'homme; qu'elle était consentante à la mort de Franquet d'Arras, on lui demanda si en cela elle ne croyait pas avoir fait péché mortel : elle répondit, premièrement sur l'assaut de Paris : "Je ne crois pas être en péché mortel, et si je l'ai fait, c'est à Dieu d'en connaître, et au prêtre en confession." Secondement, au sujet du cheval de monseigneur l'évêque répondit qu'elle croit fermement qu'elle n'a point péché en cela car ledit seigneur évêque de Senlis eut assignation pour le dit cheval de deux cents saluts d'or. Troisièmement, au sujet de la tour de Beaurevoir, répondit qu'elle ne fit pas ce saut par désespoir, mais en espérance de sauver son corps et d'aller secourir plusieurs bonnes gens qui étaient en nécessité ; et après ce saut s'en confessa et en a demandé pardon à Notre Seigneur, et eut pardon de lui ; et croit que ce n'était pas bien fait de faire ce saut. Item, dit qu'elle sait qu'elle en a eu pardon après s'en être confessé par la relation de sainte Catherine, et que, sur son conseil, elle alla s'en confesser. Quatrièmement, au sujet de l'habit d'homme, etc..., répondit : "Puisque je le fais par le commandement de notre Sire, en son service, je ne crois point mal faire, et quand Il lui plaira de commander, il sera bientôt mis bas."]



Article 40. "Item, ladite Jeanne, oublieuse de son salut et à l'instigation du diable, n'est et n'a pas été honteuse, à plusieurs reprises, de recevoir le corps du Christ, en plusieurs et divers lieux, en habit d'homme et dissolu, vêtement interdit et prohihé pour elle par le commandement de Dieu et de l'Église."

- A ce quarantième article, ladite Jeanne répond : "J'en ai répondu et je m'en attends à ce qu'autrefois j'en ai dit" ; et en conclusion elle s'en attend à Notre Seigneur.

  Respond : J'en ay respondu. Je m'en actend que autresfois, j'en ay dit.
  Et de la conclusion, s'en actend a nostre Seigneur.


  [Or interrogée, le samedi 3 mars, quand elle allait par le pays, si elle
recevait souvent le sacrement de confession et de l'autel, quand elle veanit aux bonnes villes, répondit que oui, à la fois. Interrogée si elle recevait les dits sacrements en habit d'homme, répondit que oui ; mais n'a point mémoire de les avoir reçus en armes.]



Article 41. "Item, ladite Jeanne, comme une désespérée, par haine et mépris des Anglais, et aussi par crainte de la destruction de Compiègne qu'elle avait ouï annoncer, tenta de se précipiter du sommet d'une tour élevée, et, à l'instigation du diable, elle se mit en tête de ce faire, s'y appliqua et fit tout ce qu'elle put pour accomplir ce dessein ; elle se précipita ainsi, poussée et induite par un instinct diabolique, entendant plutôt rechercher le salut de son corps que celui de son âme, et d'autres âmes ; se vantant maintes fois qu'elle se tuerait plutôt que de permettre qu'on la livrât aux mains des Anglais."

- A ce quarante et unième article, Jeanne répond : "Je m'en attends à ce qu'autrefois j'en ai dit."

  Respond : J'en ay respondu. Je m'en actend que autresfois, j'en ay dit.

  [Or interrogée, le samedi 3 mars, si elle fut longuement en la tour de Beaurevoir, répondit qu'elle y fut quatre mois ou environ ; et quand elle sut que les Anglais devaient venir, elle fut moult courroucée ; et toutefois ses voix lui défendirent plusieurs fois qu'elle ne sautât : et finalement, par terreur des Anglais, elle sauta et se recommanda à Dieu et à Notre Dame. Item, interrogée si elle ne dit point qu'elle aurait mieux aimé mourir que d'être en la main des Anglais, répondit qu'elle aimerait mieux rendre l'âme à Dieu que d'être en la main des Anglais.
  Interrogée, le mercredi 14 mars, quelle fut la cause pourquoi elle sauta de la tour de Beaurevoir, répondit qu'elle avait ouï dire que ceux de Compiègne, tous jusqu'à l'âge de sept ans, devaient être mis à feu et à sang ; et qu'elle aimerait mieux mourir que de vivre après une telle destruction de bonnes gens ; et ce fut une des causes de son saut ; et l'autre fut qu'elle sut qu'elle était vendue aux Anglais et qu'elle eût eu plus cher de mourir que d'être en leurs mains. Interrogée si elle fit ce saut sur le conseil de ses voix, répondit que sainte Catherine lui disait presque tous les jours qu'elle ne sautât point, et que Dieu l'aiderait et aussi ceux de Compiègne. Et ladite Jeanne dit à sainte Catherine que, puisque Dieu aiderait ceux de Compiègne, elle voulait y être ; et sainte Catherine lui dit : "Sans faute, il faut que le preniez en gré ; et vous ne serez point délivrée tant que n'aurez vu le roi des Anglais." Et ladite Jeanne répondit : "Vraiment, je ne le voudrais point voir, et j aimerais mieux mourir que d'être mise en la main des Anglais !" Item dit que après qu'elle fut chue de la tour, elle fut deux ou trois jours sans vouloir manger ; et toutefois elle fut réconfortée par sainte Catherine qui lui dit qu'elle se confessât et requît pardon à Dieu pour ce qu'elle avait sauté ; et que sans faute ceux de Compiègne auraient secours avant la Saint-Martin d'hiver ; et alors elle se prit à manger et à boire et tôt après fut guérie.
  Interrogée si, quand elle retrouva la parole après ledit saut, elle ne renia point Dieu et ses saints, répondit qu'elle n'a point mémoire qu'elle reniât onques Dieu et ses saints. Interrogée si elle veut s'en rapporter à l'information faite ou à faire, répondit qu'elle s'en rapportait à Dieu et non à autre.]



Article 42. "Item, ladite Jeanne a dit et publié que sainte Catherine, sainte Marguerite et saint Michel ont des membres corporels, tels que tête, yeux, visages, etc... ; elle ajouta qu'elle a palpé de ses mains lesdites saintes, et qu'elle les a accolées et baisées."

- A ce quarante-deuxième article, ladite Jeanne répond : "J'en ai répondu et m'en attends à ce que j'en ai dit ailleurs."

  Respond : J'en ay respondu. Je m'en actend que autresfois, j'en ay dit.

  [Or, le samedi 17 mars, interrogée si elle baisa ou accola onques sainte Catherine et sainte Marguerite, répondit qu'elle les a accolées toutes les deux, et qu'elles fleuraient bon. Interrogée si, en les accolant, elle n'y sentait point de chaleur on autre chose, répondit qu'elle ne les pouvait point accoler sans les sentir et toucher. Interrogée par quelle partie elle les accolait, ou par haut ou par bas, répondit : "Il convient mieux de les accoler par le bas que par le haut !"]


Article 43. "Item, ladite Jeanne a dit et publié que les saints et saintes, les anges et les archanges parlent le français et non l'Anglais, et que les saints, les saintes, les anges et les archanges ne sont pas du parti des Anglais mais de celui des Français, affirmant que les saints et les saintes, qui sont dans la
gloire, tiennent en haine capitale, à leur honte, un royaume catholique, un pays adonné à la vénération de tous les saints suivant les prescriptions de l'Église."

- A ce quarante-troisième article, qui lui a été exposé, Jeanne ne répond rien d'autre que : "Je m'en attends à Notre Seigneur et à ce que j'en ai répondu."

  Respond : J'en ay respondu. Je m'en actend que autresfois, j'en ay dit.

  [Or,le jeudi 1er mars, elle a dit que la voix est belle, douce et humble   et parle langage de France. Interrogée si cette voix, c'est à savoir sainte Marguerite, parlait la langue anglaise, répondit : "Pourquoi parlerait-elle anglais ? elle n'est point du parti des Anglais".]


Article 44. "Item, ladite Jeanne se vanta et se vante, a publié et publie que sainte Catherine et sainte Marguerite lui firent promesse de la mener au Paradis et lui certifièrent qu'elle acquerrait la béatitude si elle conservait sa virginité, et qu'elle en est sure."

- A ce quarante-quatrième article ladite Jeanne répond : "Je m'attends à Notre Seigneur et à ce que j'en ai répondu ailleurs."

  Respond : J'en ay respondu. Je m'en actend que autresfois, j'en ay dit.

  [Or, le jeudi 22 février, elle a dit que jamais ne Jeanne et ses voix d'après un dessin de Lecurieuxrequit de la voix autre récompense finale, sinon le salut de son âme.
  Item, le mercredi 14 mars, interrogée si, depuis que ses voix lui ont dit qu'elle ira en sa fin au royaume de Paradis, elle se tient assurée d'être sauvée et qu'elle ne sera point damnée en enfer, répondit qu'elle croit fernement ce que ses voix lui ont dit, savoir qu'elle sera sauvée, aussi fermement que si elle était déjà au royaume de Paradis. Et quand on lui eut dit que cette réponse était de grand poids, elle répondit qu'elle la tenait pour un grand trésor. Et ajouta relativement à cet article : pourvu qu'elle tint le serment et promesse qu'elle a faits à Notre Seigneur, c'est assavoir qu'elle gardât bien sa virginité, et de corps et d'âme. Interrogée si, après cette révélation, elle croit qu'elle ne puisse faire péché mortel, répondit à cela : "Je ne le sais, mais sur ce, je m'en attends à Notre Seigneur, entièrement." Item, interrogée si elle a besoin de se confesser, puisqu'elle croit, par révélation de ses voix, qu'elle sera sauvée, répondit qu'elle ne sait point qu'elle ait péché mortellement ; mais si elle était en péché mortel, elle pense que sainte Catherine et sainte Marguerite la délaisseraient bientôt, croyant qu'on ne saurait jamais trop nettoyer sa conscience.
  Item elle a dit le jeudi 1er mars, que sesdites saintes lui promirent de la conduire en Paradis et ainsi l'avait requis d'elles.]



Article 45. "Item, quoique les jugements de Dieu soient entièrement impénétrables pour nous, néanmoins ladite Jeanne a dit, proféré, énoncé et promulgué qu'elle a connu et connaît qui sont les saints, les saintes, les archanges, les anges, les élus de Dieu ; qu'elle sait discerner qui est tel parmi eux."

- A ce quarante-cinquième article, ladite Jeanne répond : "Je m'en attends à ce que j'en ai répondu ailleurs."

  Respond : J'en ay respondu. Je m'en actend que autresfois, j'en ay dit.

  [Or, interrogée, le mardi 27 février, par quoi et comment elle sait que ce sont ces deux-là, sainte Catherine et sainte Marguerite, qui lui apparaissent, et comment elle reconnaît l'une de l'autre, répondit qu'elle sait bien que ce sont elles et qu'elle reconnaît bien l'une de l'autre.
  Item, le jeudi 1er mars, interrogée si les saintes lui apparaissent toujours dans le même habit, répondit qu'elle les voit toujours sous la même forme ; et leurs figures sont couronnées bien richement ; et de leurs autres habits, elle ne parle pas, ni de leurs robes dont elle ne sait rien.
  Item, le samedi 3 mars, dit des saintes Catherine et Marguerite et de ses autres apparitions qu'elle les vit bien, et qu'elle sait que ce sont saints et saintes du Paradis.]



Articles 46. "Item, elle a dit avoir requis bien affectueusement sainte Catherine et Marguerite pour ceux de Compiègne avant de sauter, leur disant entre autres choses, par manière de reproche, ceci : "Et comment laissera Dieu ainsi mourir mauvaisement ceux de Compiègne, qui sont si loyaux !" En quoi apparaissent son impatience et son irrévérence envers Dieu et les saints.

- A ce quarante-sixième article, ladite Jeanne répond : "Je m'en attends à ce que j'en ai répondu."

  Respond : J'en ay respondu. Je m'en actend que autresfois, j'en ay dit.

  [Or, le samedi 3 mars, elle a dit que, après qu'elle fut blessée en sautant de la tour de Beaurevoir, la voix de sainte Catherine lui dit qu'elle fit bonne chère et qu'elle guérirait, et que ceux de Compiègne auraient secours. Item, dit qu'elle priait souvent pour ceux de Compiègne avec son conseil.]


Article 47. "Item, ladite Jeanne, mal contente de la blessure qui lui advint, par suite de la chute ou saut fait de la tour de Beaurevoir, et de ce qu'elle n'avait pas réalisé son dessein, blasphéma Dieu, les saints et les saintes, les renia ignominieusement, et les méprisa terriblement, pour l'horreur de tous ceux qui étaient présents ; et en outre, depuis qu'elle fut au château de Rouen, en plusieurs et divers jours, elle a blasphémé et renié Dieu, la bienheureuse Vierge, les saints et les saintes, supportant impatiemment et protestant d'être mise en procès devant des gens d'Église, et d'être jugée par eux."

- A ce quarante-septième article, ladite Jeanne répond : "Je m'en tiens à Notre Seigneur et à ce que j'en ai répondu."

  Respond : J'en ay respondu. Je m'en actend que autresfois, j'en ay dit.

  [Or, le samedi 3 mars, interrogée si, après le saut de la tour, elle ne s'emporta et ne se courrouça point, et ne blasphéma pas le nom de Dieu, répondit qu'onques ne maugréa contre saint ni sainte, et ce qu'elle n'a point accoutumé de jurer. Interrogée sur le fait de Soissons dont le capitaine avait rendu la ville, et qu'elle avait dit qu'elle reniait Dieu, et que si elle le tenait elle le ferait trancher en quatre pièces répondit qu'onques ne renia saint ni sainte, et que ceux qui l'on dit ont mal entendu.
  Item, le mercredi 14 mars, interrogée si, depuis qu'elle est en cette prison, elle n'a point renié ni maudit Dieu, répondit que non, et parfois quand elle dit : bon gré Dieu, ou saint Jehan, ou Nostre Dame, ceux qui peuvent avoir rapporté ces paroles ont mal entendu.]



Article 48. "Item ladite Jeanne a dit qu'elle avait cru et croyait que les esprits lui apparaissant étaient des anges, des archanges, des saints et des saintes de Dieu, aussi fermement qu'elle croit en la foi chrétienne, et aux articles de cette foi, alors que cependant elle ne rapporte avoir eu aucun signe qui puisse être suffisant pour les reconnaître ; et sur cela encore elle n'a consulté aucun évêque, curé ou autre prélat de l'Église, ou quelque autre ecclésiastique pour savoir si elle devait donner créance à de tels esprits ; elle a dit qu'il lui avait été prohibé par ses voix de révéler à quiconque les communications susdites, si ce n'est d'abord à un capitaine de gens d'armes, au dit Charles, et à autres personnes purement laïques. En quoi elle avoue que sa croyance est téméraire, sa pensée mauvaise au sujet des articles de la foi et de leur fondement ; en outre qu'elle a eu des révélations suspectes, qu'elle a voulu les cacher aux prélats et gens d'Église et s'en ouvrir de préférence à des séculiers."

- A ce quarante-huitième article, Jeanne répond : "J'en ai répondu et m'en attends à ce qui est écrit. Et quant aux signes, si ceux qui les demandent n'en sont dignes, elle n'en peut mais. Et plusieurs fois elle a été en prière, afin qu'il plût à Dieu qu'il les révélât à certains de son parti."
  Et dit en outre que de croire en ses révélations, elle n'en demanda point conseil à évêque ou curé ou à autre.
  Item, dit qu'elle croit que c'était saint Michel pour la bonne doctrine qu'il lui montrait.
  Interrogée si saint Michel lui a dit : "je suis saint Michel", répond qu'elle en a autrefois répondu ; et quant à la conclusion de l'article répond, "Je m'en attends à Notre Seigneur."
  Item, dit qu'elle croit aussi fermement qu'elle croit que Notre Seigneur Jésus-Christ a souffert mort pour nous racheter des peines d'enfer, que c'était saint Michel, Gabriel, saintes Catherine et Marguerite que Notre Seigneur lui envoya pour la réconforter et conseiller.

  Respond : J'en ay respondu, et m'en actendz a ce qui est escript.
  Et quand aux signes, se ceulx qui le demandent n'en sont dignes, elle
n'en peult mais. Et plusieurs foys en a esté en priere, afïin qu'il pleust a Dieu qu'il le revelast a aulcuns de ce party.
  Et dit oultre que, de croire en ses revelacions, elle ne demande point de conseil a evesque, curé, ou aultres.
  Item, dit qu'elle croit que c'estoit sainct Michel, pour la bonne doctrine qui luy monstroit.
  Interroguee se sainct Michel luy dist : Je suis sainct Michel, respond : J'en ay aultresfoys respondu.
  Et quand a la conclusion de l'article, respond : J'en ay aultresfoys respondu, et m'en actendz a nostre Seigneur.
  Item, dit qu'elle croit aussy fermement qu'elle croit que nostre Seigneur a souffert mort et passion pour nous rachapter des peines d'enfer, que se soyent sainctz Michel, Gabriel, sainctes Katherine et Margueritte, que nostre Seigneur luy envoye pour la conforter et conseiller.


  [Or, le samedi 24 février, elle a dit qu'elle croit fermement, et aussi fermement qu'elle croit en la foi chrétienne, que Messire nous racheta des peines d'enfer, que cette voix vient de Dieu et sur son ordre.
  Item, le samedi 3 mars, interrogée si elle croit que saint Michel et saint Gabriel aient têtes naturelles, répondit: "Je les ai vus de mes yeux, et crois que ce sont eux aussi fermement que Dieu est". Interrogée si elle croit que Dieu les forma avec ces têtes qu'elle leur vit, répondit: "Je les ai vus de mes yeux, et ne vous dirai autre chose." Interrogée si elle croit que Dieu les forma en ces mode et forme où elle les vit, répondit que oui.
  Le lundi 12 mars, interrogée si elle n'a point parlé de ces visions à son curé ou à autre homme d'Église, répondit que seulement à Robert de Baudricourt et à son roi. Et dit en outre qu'elle ne fut pas contrainte par ses voix de les céler ; mais redoutait fort de les révéler par crainte des Bourguignons, et qu'ils n'empêchassent son voyage ; et spécialement redoutait moult son père et qu'il ne l'empêchât de faire son voyage. Item, ce même jour, interrogée si elle croyait bien faire de partir sans le congé de son père et de sa mère, puisqu'on doit honorer père et mère, répondit qu'en toutes choses elle leur a bien obéi, excepté en ce départ ; mais depuis elle leur en a écrit, et ils lui ont pardonné.]



Article 49. "Item, ladite Jeanne, sans autre fondement que sa seule fantaisie, a vénéré les esprits de cette sorte, baisant la terre où elle dit qu'ils ont passé, s'agenouillant devant eux, les accolant et les baisant, et leur faisant autres révérences, leur rendant grâces, les mains jointes, et contractant familiarité avec eux : et cependant elle ne savait si c'étaient de bons esprits ; bien plus, en considérant les dites circonstances, ces esprits devaient être jugés par elle et sont visiblement plutôt mauvais que bons.   Lesquels culte et vénération semblent tenir de l'idolâtrie et provenir d'un pacte noué avec les démons."

- A ce quarante-neuvième article, ce mercredi 28 mars, Jeanne répond, du commencement : "J'en ai répondu" ; et de la conclusion : "Je m'en attends à notre Sire."

  Respond : du commencement j'en ay respondu.
  Et de la conclusion, s'en actend a nostre Seigneur.


  [Or, le samedi 24 février, interrogée si elle ne remercia point la voix qui lui apparut, et si elle s'agenouilla, répondit qu'elle la remercia, mais qu'elle était assise en son lit et qu'elle joignit les mains et elle dit que ce fut après qu'elle lui requit d'avoir conseil.
  Item, le samedi 10 mars, interrogée quand le signe vint à son roi quelle révérence elle lui fit, et s'il vint de par Dieu, répondit qu'elle remercia Notre Seigneur de ce qu'il la délivra de la peine que lui feraient les clercs de par-delà qui arguaient contre elle ; et s'agenouilla plusieurs fois. Item, ce même jour, interrogée si son roi et elle ne firent point de révérence à l'ange quand il apporta le signe, répondit que oui, en ce qui la concerne ; et s'agenouilla et ôta son chaperon.
  Item, le lundi Jeanne entend des voix célestes12 mars, interrogée quand elle promit à Dieu de garder sa virginité, si elle Lui parla, répondit qu'il devait bien suffire de le promettre à ceux qui étaient envoyés de par Lui, c'est assavoir à saintes Catherine et Marguerite. Item, dit que la première fois qu'elle ouït sa voix elle fit vœu de virginité, tant qu'il plairait à Dieu ; et elle était en l'âge de treize ans, ou environ. Item, ce même jour interrogée si elle faisait révérence à saint Michel et aux anges quand elle les voyait, répondit que oui ; et baisait la terre après leur départ, là où ils avaient passé, en leur faisant la révérence.
 Item, le jeudi 15 mars, interrogée si, quand viennent ses voix, elle leur fait   révérence absolument, comme à un saint ou à une sainte, répondit que oui ; et si parfois elle ne l'a fait, leur en a crié merci depuis ; et ne leur sait faire si grande révérence, comme il leur appartient ; car elle croit fermement que ce sont saintes Catherine et Marguerite. Et dit semblablement en ce qui concerne saint Michel. Item, ce même jour, interrogée si aux saintes qui viennent à elle, elle n'a point fait d'offrande de chandelles ardentes ou d'autre chose, à l'église ou ailleurs, ou fait dire des messes, répondit que non, si ce n'est à l'offrande, à la messe, en la main du prêtre, et en l'honneur de sainte Catherine. Et croit que sainte Catherine est une de celles qui lui apparaissent ; et elle n'a point tant allumé de chandelles, comme elle ferait volontiers à sainte Catherine et à sainte Marguerite qui sont en paradis, car elle croit fermement que ce sont elles qui viennent à elle. Item, interrogée ce même jour si, quand elle met ces chandelles devant l'image de sainte Catherine, elle met ces chandelles en l'honneur de la sainte qui lui apparait, répondit : "Je le fais en l'honneur de Dieu, de Notre Dame, de sainte Catherine qui est au ciel ; et ne fais point de différence entre sainte Catherine qui est au ciel et celle qui m'apparaît." Interrogée, ce même jour, si elle a fait ou accomplit toujours ce que ses voix lui commandèrent, répondit que, de tout son pouvoir, elle accomplit le commandement que Notre Seigneur lui fait par ses voix, et de ce qu'elle en sait entendre ; et ne lui commande rien sans le bon plaisir de Notre Seigneur.
  Item, le samedi 17 mars, interrogée si elle n'a point donné de chapeaux de fleurs aux saintes qui lui apparaissaient, répondit que en l'honneur de ces saintes, elle a donné à leurs images ou représentations dans les églises plusieurs chapeaux ; et quant à celles qui lui apparaissaient, elle n'en a point baillé, dont elle ait mémoire. Item, interrogée quand elle mettait chapeaux en l'arbre qui a été désigné plus haut, si elle les mettait en l'honneur de celles qui lui apparaissaient, répondit que non. Item, ce même jour, interrogée si, quand les saintes venaient à elle, elle ne leur faisait point la révérence, comme de s'agenouiller ou incliner, répondit que oui ; et le plus qu'elle pouvait leur faire de révérences, elle leur faisait ; car elle sait bien que ce sont celles qui sont en paradis.]



Article 50. "Item, ladite Jeanne invoque fréquemment et chaque jour ces esprits, les consultant sur ses actions particulières, par exemple les réponses ; qu'elle doit faire en son procès, et sur d'autres sujets, ce qui parait constituer et constitue invocation de démons."

- A ce cinquantième article, le mercredi 28 mars, ladite Jeanne répond : "J'en ai répondu et les appellerai à mon aide tant que vivrai."
  Interrogée par quelle manière elle les requiert, répond :
- Je réclame de Notre Seigneur et Notre Dame qu'ils m'envoient conseil et confort ; et puis ils me les envoient."
  Interrogée par quelles paroles elle les requiert, répond qu'elle les requiert par cette manière :
- Très doux Dieu, en l'honneur de votre sainte passion, je vous requiers si vous m'aimez, que vous me révéliez comment je dois répondre à ces gens d'Église. Je sais bien, quant à l'habit, le commandement comment je l'ai pris, mais je ne sais point par quelle manière je le dois laisser. Pour ce, qu'il vous plaise de me l'enseigner.
  Et aussitôt ils viennent. Item, dit qu'elle a souvent des nouvelles, par ses voix, de monseigneur de Beauvais.
  Et interrogée sur ce qu'ils disent de lui, répond :
- Je vous le dirai à part.
  Item dit qu'aujourd'hui ils sont venus trois fois.
  Interrogée s'ils étaient en sa chambre, répond :
- Je vous en ai répondu, toutefois je les ouïs bien.
  Item dit que sainte Catherine et sainte Marguerite lui ont dit de quelle manière elle doit répondre concernant cet habit.

  Aussy respond qu' elle a respondu. Et les appellera a son ayde tant qu'elle vivra.
  Interroguee par quelle maniere elle les requiert, respond : Je reclame nostre Seigneur et nostre Dame qu'elle me envoye conseil et confort. Et puis le m'envoye.
  Interroguee par quelles parolles elle requiert, respond : Elle requiert par ceste maniere : "TRES DOULX DIEU, EN L'HONNEUR DE VOSTRE SAINCTE PASSION, JE VOUS REQUIERS, SE VOUS M'AYMEZ, QUE VOUS ME REVELEZ QUE JE DOIBS RESPONDRE A SES GENTZ D'EGLISE. JE SÇAIS BIEN, QUAND A L'ABIT, LE COMMANDEMENT COMME JE L'AY PRINS ; MAIS, JE NE SÇAYS POINT PAR QUELLE MANIERE JE LE DOIBS LAISSER. POUR CE, PLAISE VOUS A MOY L'ENSEIGNER."
  Et tantost ilz viennent.
  Item, dit qu'elle a souvent nouvelles, par ses voix, de monseigneur de Beauvoys.
  Interroguee que ilz disent de luy, respond : Je le diray a vous, a part.
  Item, dyent qu'ilz sont venues aujourd'huy troys foys.
  Interroguee se ilz estoyent en sa chambre, respond : Je vous en ay respondu. Toutesfoys je les oys bien.
  Item, dit que saincte Katherine et saincte Margueritte luy ont dit la maniere qu'elle doibt respondre de icelluy habit.


  [Or, le samedi 24 février, dit que la voix lui dit qu'elle répondit hardiment ; et que, quand elle fut tirée du sommeil, elle demanda à la voix conseil sur ce qu'elle devait répondre, disant à ladite voix qu'elle demandât conseil à Notre Seigneur ; et la voix lui dit qu'elle répondit hardiment, et que Dieu la réconforterait. Item, ce même jour, interrogée si, avant qu'elle la requit, la voix ne lui dit point certaines paroles, répondit que la voix lui dit certaines paroles mais qu'elle ne les comprit toutes ; mais quand elle fut éveillée, elle comprit que la voix lui dit qu'elle répondit hardiment. Item dit que cette nuit elle avait entendu la voix lui dire : "Réponds hardiment".
  Item, le mardi 27 février, interrogée sur ce que la voix lui avait dit, depuis le samedi dernier passé, répondit qu'elle lui demandait conseil sur certains points de nos interrogatoires dans le procès. Interrogée si la voix lui avait donné conseil sur certains points, répondit que sur certains elle eut conseil. Et qu'aussi, sur d'autres, on pourrait lui demander réponse qu'elle ne donnerait pas sans congé. Et si elle répondait sans congé, par aventure, elle n'aurait pas ses voix en garant ; mais quand elle aura congé de Notre Seigneur, elle ne craindra pas de parler, car elle aura bon garant. Item, ce même jour, interrogée comment elle sait faire la distinction que sur tels points elle répondrait et sur d'autres, non, répondit que sur certains points elle avait demandé congé, et qu'elle l'avait sur certains.
  Item, le lundi 12 mars, interrogée si l'ange ne lui a point failli, quant aux biens de fortune, quand elle a été prise, répondit qu'elle croit, puisqu'il plut à Notre Seigneur, que c'est le mieux qu'elle fût prise. Interrogée si l'ange, quant aux biens de la grâce ne lui a point failli, répondit : "Comment me faillirait-il quand il me réconforte tous les jours ?" Et entend que ce réconfort, c'est sainte Marguerite et sainte Catherine. Interrogée si elle les appelle ou si elles viennent sans qu'elle les appelle, répondit qu'elles viennent souvent sans être appelées, et que parfois, si elles ne venaient bientôt, elle requérait Notre Seigneur qu'il les envoyât. Item, interrogée si parfois, les ayant appelées, elles ne viennent pas, répondit qu'elle n'en eut onques besoin, ou bien peu, qu'elle ne les eût.
  Item, le mercredi 13 mars, interrogée si depuis hier elle  a parlé à sainte Catherine, répondit que depuis elle l'a ouïe ; et toutefois lui a dit plusieurs fois qu'elle répondit hardiment aux juges sur ce qu'ils demanderaient touchant son procès.
  Item, le mercredi 14 mars, interrogée si ses voix lui demandent délai pour répondre, dit que sainte Catherine lui répond quelquefois ; et parfois ladite Jeanne manque de l'entendre, à cause du trouble des prisons et des noises de ses gardes ; et quand elle fait requête à sainte Catherine, aussitôt sainte Catherine et sainte Marguerite font requête à Notre Seigneur ; et puis, du commandement de Notre Seigneur, elles donnent réponse à ladite Jeanne. Interrogée si, quand ses saintes lui viennent, il y a de la lumière avec elles, et si elle ne vit point de lumière, quand elle ouït la voix dans le château, et qu'elle ne savait si cette voix était dans sa chambre, répondit qu'il n'est jour qu'elles ne viennent dans ce château de Rouen, et elles ne viennent pas sans lumière ; et cette fois-là où elle ouït la voix, elle ne se souvient pas si elle vit la lumière, ni si elle vit sainte Catherine. Item dit qu'elle a demandé à ses voix trois choses : savoir, son expédition ; secondement, que Dieu aidât les Français et gardât bien les villes de leur obéissance ; et la troisième était le salut de son âme.]



Article 51. "Item, ladite Jeanne n'a pas craint de se vanter que saint Michel, archange de Dieu, vint à elle, avec une grande multitude d'anges, au chateau de Chinon, en l'hôtel d'une certaine femme ; et avec elle, il se serait promené, la tenant par la main, montant les degrés du château et allant en la chambre du roi ; et que cet archange fit la révérence au roi, s'inclinant devant lui, accompagné d'autres anges, comme il est rapporté plus haut ; certains d'entre eux étaient couronnés, d'autres avaient des ailes. Dire cela des archanges et des saints anges doit être tenu pour présomptueux, téméraire, simulé ; attendu surtout qu'on ne trouve point dans les livres que tant de révérence et de salutations aient été faites à un homme, quel qu'il soit, pas même devant Notre Dame, mère de Dieu. Et souvent elle a dit que sont venus à elle l'archange saint Gabriel, saint Michel, et parfois mille milliers d'anges. En outre ladite Jeanne se vante, qu'à sa prière, ledit ange apporte avec lui, en cette compagnie d'anges, une couronne bien précieuse bien précieuse pour son roi, pour qu'il la mît sur sa tête, et qu'elle est maintenant déposée au trésor du roi ; de laquelle, à ce que dit Jeanne, son roi eût été couronné à Reims, s'il avait attendu quelques jours : mais, à cause de la hâte apportée à son couronnement, il en prit une autre. Voilà des mensonges imaginés par cette Jeanne, à l'instigation du diable ou exhibés à elle par ce démon, dans de prestigieuses apparitions, pour se jouer de sa curiosité, tandis qu'elle se mêle de toucher aux choses qui la dépassent et qui sont supérieures à la faculté de sa condition, plutôt que des révélations divines."

- A ce cinquante et unième article, ce mercredi 28 mars, elle répond qu'elle a répondu ailleurs au sujet de l'ange qui apporta le signe. Quant à ce que le promoteur propose de mille millions (2) d'anges, répond qu'elle n'a point souvenir de l'avoir dit, c'est assavoir du nombre. Mais dit bien qu'elle ne fut onques blessée qu'elle n'eût grand confort et grande aide de par Notre Seigneur et par saintes Catherine et Marguerite.
  Item, de la couronne, dit qu'elle en a répondu. Et de la conclusion de l'article, que le promoteur met contre ses faits, s'en attend à Dieu, Notre Seigneur. Où la couronne fut faite et forgée, elle s'en rapporte à Notre Seigneur.

  Respond qu'elle a respondu de l'ange qui apporta le signe. Et quand a ce que le promoteur propose de mille millions d'angelz, respond qu'elle nest point recollente de l'avoir dit, c'est assavoir du nombre. Mais dit qu'elle ne fut oncques blecee, qu'elle ne eust grand confort et grand ayde de par nostre Seigneur, et de sainctes Katherine et Margueritte.
  Item, de la couronne, dit qu'elle a respondu.
  Et de la conclusion de l'article, que le promoteur meet contre ses faictz, s'en actend a Dieu nostre Seigneur.
  Et ou la couronne fut faicte et forgee, s'en rapporte a nostre Seigneur.


  [Or, le mardi 27 février, interrogée s'il y avait un ange sur la tête de son roi quand elle le vit pour la première fois, répondit : "Par NotreDame, s'il y était je l'ignore et ne l'ai point vu." Interrogée s'il y avait de la lumière, répondit qu'il y avait plus de trois cents chevaliers et plus de cinquante torches sans compter la lumière spirituelle; et que rarement elle eut révélations qu'il n'y ait lumière. Interrogée comment son roi ajouta foi à ses dires, répondit qu'il en eut bonnes enseignes, et par les clercs. Item dit que les clercs de son parti furent de cette opinion qu'ils ne voyaient rien que de bien en son fait.
  Item, le jeudi 1er mars, interrogée si son roi avait une couronne à Reims, répondit qu'elle pense que son roi en prit volontiers une qu'il trouva à Reims ; mais une bien plus riche fut apportée depuis ; et fit ainsi pour hâter son fait, à la requête de ceux de la ville, pour éviter la charge des gens d'armes ; et, si il eût attendu, il aurait été couronné d'une couronne plus riche mille fois. Interrogée si elle vit cette couronne plus riche, répondit qu'elle ne peut le dire sans parjure ; et que, si elle ne l'a vue, elle a ouï dire qu'elle est à ce point opulente.
  Item, le samedi 10 mars, interrogée quel est le signe qui vint à son roi, répondit qu'il est beau et honoré, et bien croyable ; et est bon et opulent et qu'il est trouvé le plus riche qui soit. Interrogée pourquoi elle ne veut aussi bien dire et montrer ce signe comme elle voulut avoir le signe de Catherine de la Rochelle, répondit que si le signe de ladite Catherine eût été aussi bien montré, devant notables gens d'Église et autres, archevêques et évêques, dont elle ne sait les noms, (et même y étaient Charles de Bourbon, le sire de la Trémoïlle, le duc d'Alençon et plusieurs autres chevaliers qui le virent et l'ouïrent, aussi bien qu'elle voit ceux qui lui parlent), elle n'eût point demandé à savoir le signe de ladite Catherine ; et toutefois elle savait bien par saintes Catherine et Marguerite, que du fait de ladite Catherine, c'était tout néant. Interrogée si ledit signe dure encore, répondit : "Il est bon à savoir ; et il durera jusqu'à mille ans, et outre !" Item, dit que ledit signe est au trésor de son roi. Interrogée si c'est or, argent ou pierre précieuse ou couronne, répondit : "Je ne vous en dirai autre chose ; et ne saurait homme décrire aussi riche chose, comme est ce signe." Et ajouta : "Le signe qu'il vous faut, c'est que Dieu me délivre de vos mains ; et c'est le plus certain qu'il vous sache envoyer !" Item, ce même jour, dit qu'un ange de par Dieu, et non de par autre, bailla le signe à son roi ; et elle en remercia bien des fois Notre Seigneur. Item dit que les clercs de son parti cessèrent de l'arguer quand ils eurent ledit signe. Interrogée si les gens d'Église de par-delà virent le signe susdit, répondit que, quand son roi et ceux qui étaient avec lui virent ledit signe, et aussi l'ange qui le bailla, elle demanda à son roi s'il était content, et il répondit que oui ; et alors elle partit et s'en alla en une petite chapelle assez près, et alors ouït dire qu'après son départ plus de trois cents personnes virent ledit signe. Dit en outre que, pour l'amour d'elle, et pour qu'ils cessassent de interroger, Dieu voulut permettre que ceux de son parti ledit signe, le vissent.
  Item, le lundi 12 mars, interrogée si l'ange qui apportat ledit signe ne parla point, répondit que oui, et qu'il dit à son roi qu'on la mit en besogne, et que le pays serait aussitôt allégé. Interrogée si l'ange qui apporta ledit signe fut l'ange qui premièrement lui apparut, ou si ce fut un autre, répondit que c'est toujours tout un et qu'onques il ne lui faillit. Item, ce même jour, interrogée sur le signe qu'elle bailla à son roi, répondit que sur ce elle aura conseil de sainteCatherine.
  Item, le mardi 13 mars, interrogée sur le signe qu'elle bailla à son roi, et sur ce que c'était, répondit : "Seriez-vous content que je me parjurasse ?" Interrogée si elle avait juré et promis à sainte Catherine de ne pas dire ce signe, répondit : "J'ai juré et promis de ne pas dire ce signe, et je l'ai fait de moi-même pour ce qu'on me chargeait trop de le dire." Et alors ladite Jeanne dit qu'elle n'en parlerait plus à aucun homme. Item, elle a dit ce même jour, que le signe ce fut que l'ange confirma son roi en apportant la couronne, et en lui disant qu'il aurait tout le royaume de France intégralement, à l'aide de Dieu et moyennant le labeur de ladite Jeanne ; et qu'il la mit en besogne, c'est à savoir qu'il lui baillât des gens d'armes, autrement il ne serait pas de sitôt couronné et sacré. Item, ce même jour, interrogée de quelle manière l'ange apporta la couronne, et s'il la mit sur la tête de son roi, répondit que cette couronne fut baillée à un archevêque, c'est à savoir l'archevêque de Reims, comme il lui semble, en présence de son roi ; et ledit archevêque la reçut et la bailla au roi, ladite Jeanne étant présente ; et elle fut mise au trésor de son roi. Interrogée en quel lieu elle fut apportée, répondit que ce fut en la chambre du roi, au chateau de Chinon. Interrogée du jour et de l'heure, répondit : "du jour, je ne sais ; et de l'heure, il était haute heure ; autrement n'a pas mémoire de l'heure ; et du mois, ce fut au mois d'avril ou de mars, comme il lui semble ; et au mois d'avril prochain, ou en ce présent mois, il y aura deux ans ; et c'était après Pâques. Interrogée si, la première journée qu'elle vit le signe, son roi le vit, répondit que oui, et qu'il l'eut lui-même. Interrogée de quelle matière était ladite couronne, répondit : "C'est bon à savoir qu'elle était d'or fin ; et était si riche que je ne saurais nombrer sa richesse ; et cette couronne signifiait que son roi tiendrait le royaume de France. Interrogée, s'il y avait pierreries, répondit : "Je vous ai dit ce que j'en sais." Interrogée si elle la mania ou ou baisa, répondit que non. Interrogée si l'ange qui l'apporta vint de haut, ou s'il venait de terre, répondit, répondit qu'il vint de haut, par quoi elle entend qu'il vint par le commandement de Notre Seigneur, et entra par l'huis de la chambre. Interrogée si l'ange venait par terre et marchait depuis l'huis de la chambre, répondit que, quand l'ange vint devant son roi, ledit ange fit la révérence audit roi en s'inclinant devant lui, en prononçant les paroles que ladite Jeanne a dites du signe ; et avec ce, ledit ange remémorait audit roi la belle patience qu'il avait eue, selon les grandes tribulations qui lui étaient advenues ; et depuis l'huis ledit ange marchait et s'avançait sur la terre, en venant audit roi. Interrogée quel espace il y avait de l'huis jusqu'au roi, répondit, qu'à ce qu'elle pense, il y avait bien l'espace de la longueur d'une lance ; et s'en alla l'ange par la voie par où il était venu. Item dit que, quand l'ange vint, ladite Jeanne l'accompagna, et alla avec lui par les degrés à la chambre dudit roi ; et entra l'ange le premier ; et puis elle-même dit au roi : "Sire, voilà votre signe, prenez-le" Interrogée en quel lieu l'ange lui apparut, répondit qu'elle était presque toujours en prière, afin que Dieu envoyât le signe à son roi ; et Jeanne était en son logis, savoir en l'hôtel d'une bonne femme près du château de Chinon quand l'ange vint ; et puis l'ange et ladite Jeanne allèrent ensemble audit roi ; et l'ange était bien accompagné l'ange était bien accompagné d'autres anges avec lui qu'un chacun ne voyait pas ; et ce n'eût été pour l'amour d'elle et pour l'ôter hors de la peine des gens qui l'arguaient, elle croit que plusieurs gens n'auraient pas vu ledit ange qui le virent. Interrogée si tous ceux, qui étaient là avec le roi virent l'ange, répondit qu'elle pense que l'archevêque de Reims et les seigneurs d'Alençon, de la Trémoille et Charles de Bourbon le virent ; et quant à la couronne, plusieurs gens d'église et autres la virent, qui ne virent pas l'ange. Interrogée de quelle figure et de quelle grandeur était ledit ange, répondit qu'elle n'a point congé de le dire, et que demain en répondra. Interrogée si tous ceux qui étaient en la compagnie de l'ange étaient d'une même figure, répondit que certains s'entre ressemblaient assez et les autres, non, en la manière qu'elle les voyait ; certains avaient des ailes, et il y en avait de couronnés, et les autres, non ; et étaient en leur compagnie saintes Catherine et Marguerite qui furent avec l'ange dessusdit, et les autres anges aussi, jusque dans la chambre du roi. Interrogée comment cet ange la quitta, répondit qu' il la quitta dans la petite chapelle ; et fut bien courroucée de son départ, et pleurait ; et s'en fût volontiers allée avec lui, c'est à savoir, son âme. Interrogée si, au départ de l'ange, elle demeura joyeuse ou effrayée et en grand'peur, répondit qu'il ne la laissa apeurée, mais qu'elle était courroucée de son départ. Item, interrogée si ce fut pour son mérite que Dieu lui envoya son ange, répondit qu'il venait pour grande chose, et ce fut en espérance que le roi crût le signe, et qu'on la laissât sans l'arguer, et pour donner secours aux bonnes gens d'Orléans, et aussi pour le mérite du roi et du bon duc d'Orléans. Interrogée pourquoi elle l'eut plutôt qu'une autre, répondit : "Il plut à Dieu de faire ainsi par une simple pucelle pour rebouter les adversaires du roi." Interrogée s'il lui a été dit où l'ange avait d'abord pris ladite couronne, répondit qu'elle fut apportée de par Dieu et qu'il n'y a orfèvre au monde qui la sût faire si belle ou si riche ; et où l'ange la prit, ladite Jeanne s'en rapporte à Dieu, et ne sait point autrement où cette couronne fut prise. Interrogée si cette couronne fleura point bon et si elle était reluisante, répondit qu'elle n'a point mémoire de cela et s'en avisera ; et après dit qu'elle a bonne odeur, et l'aura, mais qu'elle soit bien gardée, ainsi qu'il appartient ; et qu'elle était en manière de couronne. Interrogée si l'ange lui avait point écrit de lettres, répondit que non. Interrogée quel signe eurent le roi et les gens qui étaient avec lui et elle-même de croire que c'était un ange qui leur apparaissait, répondit que le roi le crut bien par l'enseignement des gens d'Eglise qui étaient là, et par le signe de la couronne. Interrogée comment les gens d'Église surent que c'était un ange, répondit que ce fut par leur science et parce qu'ils étaient clercs.]


  Ruines de la salle royale du chateau de Chinon


Article 52. "Item ladite Jeanne a tellement séduit le peuple catholique par ses inventions que beaucoup, en sa présence, l'adorèrent comme une sainte, et l'adorent encore en son absence, ordonnant, en révérence d'elle, messes et collectes dans les églises ; bien plus ils disent qu'elle est plus grande que tous les saints de Dieu, après Notre Dame ; ils dressent ses images et représentations sur les autels des saints, portent sur eux des médailles de plomb ou d'autre métal qui la représentent, comme on a accoutumé de le faire pour les anniversaires et représentations des saints canonisés par l'Église ; et ils prêchent publiquement qu'elle est envoyée de Dieu, et plutôt ange que femme : actes pernicieux pour la religion chrétienne, dommageables au salut des âmes et par trop scandaleux."

- A ce cinquante-deuxième article, ce mercredi 28 mars, Jeanne répond : "Quant au commencement de cet article, j'en ai autrefois répondu ; et quant à sa conclusion, je m'en rapporte à Notre Seigneur".

  Respond aussy quand au commencement de l'article, j'en ay aultresfoys respondu.
  Et quand a la conclusion de l'article, s'en rapporte a nostre Seigneur.


  [Or, ce samedi 3 mars, interrogée si elle connut onques frère Richard, répondit : "Je ne l'avais onques vu quand je vins devant Troyes". Interrogée quelle chère frère Richard lui fit, répondit que ceux de la ville de Troyes, comme elle pense, l'envoyèrent devant elle, disant qu'ils redoutaient qu'elle ne fût pas envoyée de la part de Dieu ; et quand il vint devers elle, en l'approchant, il faisait le signe de la croix et jetait de l'eau bénite ; et elle lui dit : "Approchez hardiment, je ne m'envolerai pas !" Interrogée si elle n'a point vu ou fait faire certaines images ou peintures à sa ressemblance, répondit qu'à Arras elle vit une peinture en la main d'un Écossais ; et il y avait sa figuration, tout armée, et présentait une lettre à son roi, et était agenouillée d'un genou. Et dit qu'onques ne vit ni fit faire autre image ou peinture à sa ressemblance. Interrogée d'un certain tableau ou certaine tablette, chez son hôte à Orléans, où était peintes trois femmes : Justice, Paix, Union, répondit qu'elle n'en sait rien. Interrogée si elle ne sait point que ceux de son parti aient fait dire service, messe et oraison pour elle, dit qu'elle n'en sait rien ; et s'ils en firent dire service, ne l'ont point fait de son commandement ; et s'ils ont prié pour elle il lui est avis qu'ils n'ont point fait de mal. Item, ce samedi 3 mars, interrogée quelle révérence lui firent ceux de Troyes, à l'entrée, répondit : "Ils ne me firent point de révérence." Et dit en outre, qu'à son avis, frère Richard entra à Troyes quand ils entrèrent ; mais n'a point souvenir si elle le vit à l'entrée. Interrogée si frère Richard ne fit point de sermon à l'entrée, à la venue de Jeanne, répondit qu'elle ne resta guère à Troyes et n'y coucha onques ; et quant au sermon, elle n'en sait rien.]


Article 53. "Item, contrairement au commandement de Dieu et des saints, ladite Jeanne a assumé, avec orgueil et présomption, la domination sur des hommes ; elle s'est constituée chef et capitaine d'armée, s'élevant parfois jusqu'au nombre de 16.ooo hommes, où se trouvaient princes, barons et autres nobles, que tous elle a fait servir militairement, sous elle, comme principal capitaine."

- A ce cinquante-troisième article, ce mercredi 28 mars, Jeanne répond que, quant au fait d'être chef de guerre, elle en a autrefois répondu ; et si elle était chef de guerre, c'était pour battre les Anglais. Quant à la conclusion de l'article, elle s'en rapporte à Notre Sire.

  Interroguee de ce qu'elle avoit esté chef de guerre, respond qu'elle en a aultresfoys respondu ; et, se elle estoit chef de guerre, c'estoit pour battre les Angloys. Et quand a la conclusion de l'article, s'en rapporte a nostre Seigneur.

  [Or, ce mardi 27 février, interrogée quelle compagnie lui donna son roi quand il la mit en oeuvre, répondit qu'il lui bailla dix ou douze mille hommes ; et qu'elle alla dans Orléans d'abord à la bastille de Saint-Loup, et ensuite à celle du Pont.]


Article 54. "Item, ladite jeanne ; sans vergogne, marcha avec des hommes, refusa d'avoir la compagnie et les soins de femmes, mais voulut seulement employer des hommes qu'elle fit servir dans les offices privés de sa chambre et dans ses affaires secrètes, ce qui n'a jamais été vu ni entendu d'une femme pudique ou dévote."

- A ce cinquante-quatrième article, ladite Jeanne répond que son gouvernement, c'était d'hommes ; mais, quant au logis et au gît, le plus souvent elle avait une femme avec elle ; et lorsqu'elle était à la guerre, elle gisait vêtue et armée, là où elle ne pouvait trouver des femmes. Quant à la conclusion de l'article, elle s'en rapporte à Notre Sire.

  Interroguee qui la gouvernoit, respond que son gouvernement estoit d'hommes. Mais quand au logis, avoit le plus souvent une femme avecques elle. Et quand elle estoit en guerre, elle gisoit vestue et armee, la ou elle ne povoit recouvrer des femmes.
  Quand a la conclusion de l'article, respond : j'en ay respondu.



Article 55. "Item, ladite jeanne a abusé des révélations et prophéties qu'elle dit avoir de Dieu, les faisant tourner en lucre temporel et en profit ; car, par le moyen des dites révélations, elle a acquis grand nombre de richesses, grand appareil et état, de nombreux officiers, chevaux, ornements ; et aussi pour ses frères et parents, de grands revenus temporels : en cela elle imita les faux prophètes qui, pour la quête des biens temporels et l'acquisition des faveurs des grands de ce monde, ont accoutumé de feindre qu'ils ont à leur sujet révélations qui les concernent, et entendent plaire aux princes temporels : ainsi ils abusent des divins oracles et attribuent leur mensonge à Dieu."

- A ce cinquante-cinquième article, ladite Jeanne répond : "J'en ai répondu." Quant aux dons faits à ses frères, ce que le roi leur a donné, c'est de sa grâce, sans sa requête à elle. Quant à la charge que lui donne le promoteur, et à la conclusion de l'article, elle s'en rapporte à Notre Sire.

  Et des dons fais a ses freres, respond : Ce que le roy leur a donné, c'est de sa grace, sans la requeste d'elle.
  Quand a la charge que luy donne le promoteur, s'en rapporte a nostre Seigneur.


  [Or, le samedi 10 mars, interrogée si elle eut onques autres richesses de son roi que ses chevaux, répondit qu'elle ne demanda rien à son roi, fors bonnes armes, bons chevaux et de l'argent pour payer les gens de son hôtel.
  Interrogée si elle n'avait pas de trésor, répondit que les dix ou douze mille qu'elle a vaillant ce n'est pas grand trésor pour mener la guerre, et que c'est peu ; lesquelles choses ont ses frères, comme elle pense. Et dit que ce qu'elle a, c'est de l'argent propre de son roi. Item, dit qu'elle fut prise sur un demi-coursier. Interrogée qui le lui donna, répondit que son roi ou ses gens le lui donnèrent, sur l'argent de son roi ; et avait cinq coursiers de l'argent de son roi, sans les trottiers dont elle avait plus de sept.]


Article 56. "Item, ladite Jeanne s'est vantée plusieurs fois d'avoir deux conseillers qu'elle nomme les conseillers de la fontaine, qui vinrent à elle depuis qu'elle fut prise, ainsi qu'il a été trouvé par la confession de Catherine de La Rochelle faite devant l'official de Paris (3) ; cette Catherine a dit que ladite Jeanne sortira de prison avec l'aide du diable, si elle n'était pas bien gardée."

- A ce cinquante-sixième article, ladite Jeanne répond : "Je m'en tiens à ce que j'en ai dit." Et quant aux conseillers de la fontaine elle ne sait ce que c'est. Mais croit bien qu'une fois elle y ouït saintes Catherine et Marguerite. Quant à la conclusion de l'article, elle la nie, et affirme, par son serment, qu'elle ne voudrait point que le diable la tirât hors de sa prison.

  Et dit qu'elle se tient a ce qu'elle en a respondu.
  Quand aux conseillers de la fontaine, elle sçait que c'est. Mais bien sçait et croit que une joys oyt saincte Katherine et saincte Margueritte.
  Et quand a la conclusion de l'article, elle nye. Et si afferme par son serment qu'elle ne vouldroit point que le dyable a l'eust tiree hors de la prison.


  [Or, le samedi 3 mars, interrogée si elle ne vit point ou connut Catherine de La Rochelle, répondit que oui, à Jargeau et à Montfaucon-en-Berry. Interrogée si ladite Catherine ne lui montra point une dame vêtue de blanc qu'elle disait lui apparaitre parfois répondit que non. Interrogée, ce même samedi 3 mars, sur ce que cette Catherine lui a dit, répondit que ladite Catherine lui a dit qu'une dame blanche venait à elle, vêtue de drap d'or, qui disait à ladite Catherine qu'elle allât par les bonnes villes, et que son roi lui baillerait hérauts et trompettes, pour faire crier que quiconque aurait or, argent ou trésor caché, l'apportât aussitôt ; et que ceux qui ne le feraient, et qui en auraient de caché, ladite Catherine les connaitrait bien et saurait bien trouver les dits trésors ; et que ce serait pour payer les gens d'armes de ladite Jeanne. A quoi ladite Jeanne répondit à ladite Catherine qu'elle retournât vers son mari faire son ménage et nourrir ses enfants. Et pour en avoir la certitude, elle parla à sainte Catherine ou à sainte Marguerite qui lui dirent que du fait de cette Catherine ce n'était que folie et tout néant. Et sur le fait de cette Catherine ladite Jeanne écrivit à son roi, et qu'elle lui dirait ce qu'il en devait faire ; et quand ladite Jeanne vint en la présence de son roi, elle lui dit que c'était folie et tout néant du fait de ladite Catherine. Toutefois frère Richard voulait qu'on la mît en oeuvre ; et ont été très mal contents de ladite Jeanne les dits frère Richard et Catherine. Interrogée si elle ne parla point à Catherine de La Rochelle d'aller à La Charité, répondit que ladite Catherine ne conseillait point à ladite Jeanne qu'elle y allât ; et que le temps était trop froid ; et que ladite Jeanne n'irait point. Item ce 3 mars, ladite Jeanne confessa avoir dit à ladite Catherine, qui voulait aller vers le duc de Bourgogne pour faire la paix, qu'on n'y trouverait point de paix, si ce n'était par le bout de la lance. Item ladite Jeanne confessa avoir demandé à cette Catherine si la dame lui venait toutes les nuits ; et pour ce coucherait avec elle, comme ell y coucha ; et veilla jusqu'à minuit et ne vit rien, et puis quand vint au matin, elle demanda à ladite Catherine si cette dame était venue ; et ladite Catherine répondit que cette dame était venue, et que lors dormait ladite Jeanne, et ne l'avait pu éveiller. Et lors ladite Jeanne demanda à ladite Catherine si la dame ne viendrait pas le lendemain ; ladite Catherine répondit que oui. Pour cette cause, dormit ladite Jeanne le jour, afin qu'elle pût veiller la nuit ; et, la nuit suivante, coucha ladite Jeanne avec ladite Catherine et veilla toute la nuit ; mais ne vit rien, bien que souvent elle demandât à ladite Catherine si elle viendrait ; et ladite Catherine répondait: "Oui, bientôt !"]

  Enceinte de Paris près de la Porte Saint-Honoré


Article 57. "Item, ladite Jeanne, au jour de la fête de la nativité de Notre Dame, fit rassembler tous les gens d'arme de l'ost dudit Charles, pour marcher à l'attaque de la ville de Paris, les conduisit devant ladite ville, leur promettant qu'ils y rentreraient, ce jour-là, et qu'elle le savait par révélation ; et elle fit prendre toutes les dispositions qu'elle put pour assaillir ladite ville. Ce que néanmoins elle n'a pas craint de nier en justice, devant vous. De même, en plusieurs autres lieux, comme à La Charité-sur-Loire, à Pont-l'Evêque, et aussi à Compiègne, lorsqu'elle assaillit l'ost de monseigneur le duc de Bourgogne, elle fit beaucoup de promesses et annonça force prédictions, qu'elle disait savoir, par révélation, qui ne se réalisèrent nullement ; mais c'est bien tout le contraire qui arriva. Or elle a nié devant vous avoir eu telles promesses et fait telles prédictions, cela parce qu'elles ne se réalisèrent pas comme elle l'avait dit ; cependant, bien des gens dignes de foi ont rapporté que ces promesses avaient été dites et publiées par elle. Et aussi à l'assaut de Paris, elle a dit que mille milliers d'anges l'assistaient, qui étaient prêts à l'emporter en paradis si elle mourait. Et néanmoins, à la question qui lui a été faite, pourquoi à l'encontre de sa promesse il était arrivé que non seulement son entrée à Paris n'avait pas eu lieu, mais que plusieurs de son ost, et elle aussi, avaient été déchirés d'une atroce blessure, plusieurs même occis, on rapporte qu'elle répondit : "Jésus a failli à sa promesse."

- A cet article, le mercredi 28 mars, Jeanne répond sur le commencement de l'article : "J'en ai autrefois répondu ; et si j'en suis avisée plus avant, volontiers en répondrai plus avant." Item, à la fin de l'article, que Jésus lui avait failli, elle le nie.

  Et quand est du commencement de l'article, elle en a aultresfoys respondu. Et si elle en est advisee plus avant, volluntiers en respondra.
  Et en la fin de ladicte article, que ait dit que Dieu luy ayt failly, elle ne nye.


  [Or le samedi 3 mars, interrogée sur ce qu'elle fit sur les fossés de La Charité, répondit qu'elle y fit faire un assaut ; et dit qu'elle n'y jeta ou fit jeter d'eau bénite par manière d'aspersion. Interrogée pourquoi elle n'entra pas dans ladite ville, puisqu'elle en avait le commandement de Dieu, répondit : "Qui vous a dit que j'avais commandement d'y entrer ?" Interrogée si elle n'eut point conseil de sa voix, répondit qu'elle voulait venir en France ; mais les gens de son parti lui dirent qui c'était le mieux d'aller premièrement devant La Charité.
  Interrogée, le mardi 13 mars, si, quand elle alla devant Paris, elle eut révélation de ses voix d'y aller, répondit que non ; mais ce fut à la requête de gentils hommes qui voulaient faire une escarmouche ou vaillance d'armes ; et avait bien l'intention d'aller outre et de passer les fossés. Interrogée si, d'aller devant La Charité, elle eut révélation, répondit que non ; mais y alla à la requête des gens d'armes ; comme elle a dit autrefois. Item, ce même mardi, interrogée si elle n'eut point révélation d'aller à Pont-Lévêque, répondit que, depuis qu'elle eut révélation à Melun qu'elle serait prise, elle s'en rapporta le plus souvent, du fait de la guerre, à la volonté des capitaines ; et toutefois ne leur disait point qu'elle avait révélation d'être prise. Interrogée si ce fut bien fait, le jour de la Nativité de Notre Dame, puisque c'était fête, d'aller assaillir Paris, répondit : "C'est bien fait de garder les fêtes de Notre Dame", et, à ce qu'il lui semble, dans sa conscience, d'un bout jusqu'à l'autre.]



Article 58. "Item, ladite Jeanne a fait peindre son étendard et y a fait représenter deux anges assistant Dieu tenant le monde en sa main, avec les mots JHESUS MARIA, et autres peintures ; et elle a fait cela par le commandement de Dieu, qui le lui a révélé par le moyen des anges et des saints. Lequel étendard elle a posé dans la cathédrale de Reims, près de l'autel, quand ledit Charles fut sacré, voulant que les autres honorassent singulièrement cet étendard, par superbe et vaine gloriole. Elle a fait peindre aussi ses armes, dans lesquelles elle mit deux lis d'or en champ d'azur, et au coeur des lis, une épée d'argent avec poignée et croix d'or, la pointe dressée surmontée d'une couronne d'or. Ce qui parait appartenir au faste et à la vanité, non à la piété et à la religion ; et attribuer de telles vanités à Dieu et aux anges, c'est aller contre la révérence due à Dieu et aux saints"

- A ce cinquante-huitième article, ce mercredi 28 mars, Jeanne répond : "J'en ai répondu." Et du contredit mis par le procureur répond : "Je m'en attends à notre Seigneur."

  Et que sur ce elle a respondu. Et du contredit mys par le promoteur, elle s'en raporte a nostre Seigneur.

  [Or, le Mardi 27 février, interrogée quand elle alla devant Orléans si elle avait étendard, et de quelle couleur, répondit que oui, au champ semé de lis ; et y était figuré le monde, et deux anges à ses côtés était de couleur blanche, de toile blanche ou boucassin. Et y étaient écrits ces noms : JHESUS MARIA, comme il lui semble ; et était frangé de soie. Interrogée si ces noms : JHESUS MARIA étaient en haut, ou sur le côté, ou en bas, répondit, sur le côté, comme il lui semble. Interrogée si elle aimait mieux son épée que étendard, répondit qu'elle aimait plus l'étendard que l'épée, quarante fois. Interrogée qui lui fit faire ce qui y était peint, répondit : "Je vous l'ai assez dit que je n'ai rien fait que du commandement de Dieu." Item dit qu'elle portait son étendard, quand elle entrait dedans ses adversaires, pour éviter de tuer quelqu'un ; et dit qu'onques n'a tué aucun homme.
  Item, le samedi 3 mars, dit que son étendard fut fut en l'église de Reims ; et lui semble qu'il fut assez près de l'autel et qu'elle même le tint un peu ; et ne sait point que frère Richard le tint.
  Item, le samedi 10 mars, interrogée si en son étendard le monde est peint et deux anges, répondit que oui, et n'en eut jamais qu'un. Interrogée quel signe ou signification c'était de prendre Dieu tenant le monde, et les deux anges, répondit que saintes Catherine et Marguerite lui dirent qu'elle prît l'étendard et le portât hardiment ; et qu'elle y fit mettre en peinture le Roi du ciel.   Et ce dit à son roi, mais bien contre son gré. Et de la signification ne sait autre chose. Interrogée si elle n'avait pas écu et armes répondit qu'elle n'en eut onques ; mais son roi en donna à ses frères, c'est assavoir un écu d'azur à deux fleurs de lis d'or et une épée au milieu ; lesquelles armes elle devisa à un peintre, en cette ville de Rouen, parce qu'il lui avait demandé quelles armes elle avait. Item dit que cela fut donné par son roi à ses frères, à leur plaisance, sans sa requête et sans révélation.
  Le samedi 17 mars, interrogée qui la détermina à faire peindre les anges en son étendard, avec bras, pieds, jambes et vêtements, répondit : "Vous avez réponse sur cela." Interrogée si elle a fait ces anges tels qu'ils venaient à elle, répondit qu'elle les fit peindre en la manière qu'ils sont peints dans les églises. Interrogée si onques les vit en la manière qu'ils furent peints, répondit : "Je ne vous en dirai autre chose." Interrogée pourquoi elle ne fit pas peindre la clarté qui venait à elle avec l'ange et ses voix, répondit qu'il ne lui fut point commandé.  Item ce même samedi 17 mars, interrrogée si les deux anges qui étaient peints en son étendard, représentaient saint Michel et saint Gabriel, répondit qu'ils n'y étaient que pour l'honneur de Notre Seigneur, qui était peint sur ledit étendard. Et dit qu'elle fit faire cette représentation de deux anges pour l'honneur de Notre Seigneur qui y était figuré tenant le monde. Interrogée si les deux anges qui étaient figurés sur l'étendard étaient les deux anges qui gardaient le monde, et pourquoi il n'y en avait pas plus, vu qu'il lui était commandé de par Notre Seigneur qu'elle prit cet étendard, répondit : "Tout l'étendard était commandé par Notre Seigneur, par les voix des saintes Catherine et Marguerite qui lui dirent : "Prends l'étendard de par le Roi du ciel" et parce que les Saintes lui dirent : "Prends l'étendard de par le Roi du Ciel", elle y fit faire cette figure de Notre Seigneur et de deux anges. Et de la couleur et de tout, elle fit suivant leur commandement. Interrogée si alors elle demanda à ses dites saintes, en vertu de cet étendard, si dans toutes les batailles où elle se bouterait elle obtiendrait et aurait la victoire, répondit que lesdites saintes lui dirent qu'elle le prît hardiment et que Dieu l'aiderait. Interrogée qui aidait le plus, elle à l'étendard ou l'étendard à elle, répondit que la victoire de l'étendard ou d'elle-même, femme, tout doit être attribué à Notre Seigneur. Interrogée si l'espérance d'avoir victoire était fondée dans son étendard ou en elle-même, répondit que l'espérance de la victoire était fondée en Notre Seigneur et non ailleurs. Interrogée, si un autre qu'elle avait porté l'étendard, il aurait eu aussi bonne fortune, comme elle l'avait elle-même en le portant, répondit : "Je n'en sais rien et je m'en attends à Notre Seigneur. Interrogée, si l'un des gens de son parti eût baillé à cette femme un étendard appartenant à son parti, et qu'elle l'eût porté, elle aurait eu aussi bonne espérance en celui-là qu'en son étendard propre, qui lui était imposé de par Dieu, et spécialement si on lui avait baillé l'étendard de son roi, répondit : "Je portais plus volontiers cet étendard qui m'était ordonné par Notre Seigneur ; mais toutefois, du tout, je m'en attendais à Notre Seigneur." Item, ce même samedi 17 mars, interrogée si elle ne fit pas tournoyer son étendard autour de la tête de son roi en le déployant, répondit qu'elle ne sait pas l'avoir fait. Interrogée pourquoi son étendard fut plus porté en l'église de Reims, au sacre de son roi, que les étendards des autres capitaines, répondit qu'il avait été à la peine, et que c'était bien raison qu'il fût à l'honneur.]



Article 59. "Item, à Saint-Denis en France, ladite Jeanne offrit et fit poser dans l'église, en lieu élevé, l'armure sous laquelle elle avait été blessée, lors de l'assaut fait contre la ville de Paris qu'elle fût honorée du peuple comme reliques. Et, dans la même ville, elle fit allumer des chandelles de cire dont elle versait la cire liquéfiée sur la tête des petits enfants, prédisant leur fortune à venir, et, à leur sujet, par ces sortilèges faisait grand nombre de divinations." (4)

- A ce cinquante-neuvième article, ce mercredi 28 mars, Jeanne répond : "J'en ai répondu", quant aux armures ; et quant aux chandelles allumées, répandues goutte à goutte et distillées, elle le nie.

  Et en tant que sont les armures, elle en a respondu.
  Et au regard des chandelles allumees, elle nye.


  [Or, le samedi 17 mars, interrogée quelles armes elle offrit à Saint-Denis dit que c'était un blanc harnois entier, tel qu'il convient à un homme d'armes, avec une épée ; et que cette épée, elle l'avait gagnée devant Paris. Interrogée à quelle fin elle offrit ces armes, répondit qu'elle le fit par dévotion, comme il est accoutumé aux gens de guerre quand ils sont blessés ; et, pour ce qu'elle avait été devant Paris, elle offrit ces dites armes à Saint-Denis, puisque c'est le cri de France. Interrogée si elle le fit pour qu'on adorât ces dites armes, répondit que non.]


Article 60. "Item, ladite Jeanne, méprisant les préceptes et les sanctions de l'Église, a plusieurs fois refusé de jurer de dire la vérité en justice, se rendant par là suspecte d'avoir fait ou dit certaines choses, en matière de foi ou de révélations, qu'elle n'ose découvrir aux juges ecclésiastiques, craignant pour elle-même une punition méritée ; c'est ce qu'elle a suffisamment confessé, à ce qu'il semble, quand à ce propos elle a allégué dans ce procès le proverbe "Pour avoir dit la vérité souvent des gens sont pendus" ; elle a dit : "Vous ne saurez tout", et "J'aimerais mieux avoir la tête tranchée que de vous dire tout."

- A ce soixantième article, ce mercredi 28 mars, ladite Jeanne répond qu'elle n'a pris délai que pour répondre plus sûrement à ce qu'on lui demandait ; et quant à la conclusion, dit qu'elle craignait de répondre et elle a pris délai pour savoir si elle devrait parler [sur ce qu'on lui demandait].
  Item, dit que quant au conseil de son roi, pour ce qu'il ne touche point le procès, elle ne l'a point voulu révéler. Et du signe baillé au roi, elle l'a dit, parce que les gens d'Église l'ont condamnée à le dire.

  Interroguee pour quoy elle a prins delay, respond que elle ne l'a seulement prins que pour respondre a ce que on luy demanderoit plus seurement.
  Et aussy a prins delay, pour savoir si elle debvoit dire ce que on luy demanderoit.
  Et quand au conseil du roy, pour ce qu'il ne touche point le procez, elle ne l'a voulu reveller.
  Et du signe baillé au roy, elle a dit, pour ce que les gens d'Église l'ont condampnee a le dire.


  [Or, le jeudi 22 février, interrogée si, quand la voix lui montra son roi, il n'y avait point de lumière, répondit : "Passez outre". Item, interrogée si elle ne vit point d'ange sur le dit roi, répondit : "Epargnez-moi et passez outre !" Item, dit que, avant que son roi la mit en œuvre, il eut plusieurs apparitions et belles révélations. Interrogée de quelle sorte, répondit: "Je ne le vous dirai point ; vous n'aurez encore réponse sur cela ; mais envoyez vers le roi, et il vous les dira."
  Item, le samedi après les Brandons, 24 février, nous, évêque, avons exposé à Jeanne qu'elle jurât purement, simplement et absolument, et sans condition ; et de cela elle fut par trois fois requise et admonestée. Elle a dit : "Donnez-moi congé de parler" ; et elle ajouta : "Par ma foi, vous me pourriez demander telles chose que je ne vous dirai pas". Item elle a dit : "Peut-être que de beaucoup de choses que vous me pourriez demander, je ne vous dirai pas le vrai, de ce qui touche mes révélations ; car, par aventure, vous pourriez contraindre à dire telle chose que j'ai juré de ne dire point : et ainsi je serais parjure, ce que vous ne devriez vouloir." Item : "Moi, je vous le dis ; avisez-vous bien de ce que vous dites être mon juge. Vous prenez grande charge, et trop vous me chargez." Item dit, qu'à ce qu'il lui semble, c'est assez d'avoir juré deux fois. Interrogée si elle veut jurer simplement et absolument, répondit : "Vous pouvez bien vous en contenter, j'ai assez juré de deux fois" ; et dit que tout le clergé de Rouen ou de Paris ne la saurait condamner, si ce clergé ne l'avait en droit. Et ajouta qu'en huit jours elle ne dirait pas tout. Item, dit que, de sa venue, elle dira volontiers vérité ; mais ne dira tout. Item, il lui fut dit qu'elle prit conseil des assesseurs, si elle devait jurer ou non : répondit que de sa venue elle dira volontiers vérité, et non autrement ; et qu'il ne lui en fallait plus parler. Item, elle fut encore avertie, et on lui dit qu'elle se rendrait suspecte ; elle répondit comme devant. En outre nous, évêque de Beauvais, la requîmes de jurer précisément : elle répondit: "Volontiers je dirai ce que je sais, mais pas tout". Item fut ensuite requise de jurer ; et admonestée, sous peine d'être chargée de ce qu'on lui imposait : répondit : "J'ai assez juré", ajoutant : "Passez outre !" Item, requise encore et abondamment admonestée de jurer et de dire la vérité sur ce qui touche le procès, et qu'elle s'exposait à un grand danger, répondit : "Je suis prête à jurer de dire ce que je saurai, touchant le procès, mais non tout ce que je sais" ; et ainsi elle jura. Interrogée ce même jour, 24 de février, si la voix lui interdit de tout dire répondit : "Je ne vous répondrai point là-dessus" ; et : "Il y a certaines révélations qui touchent le roi que je ne vous dirai pas." Interrogée si la voix lui a défendu de dire les révélations répondit : "Je ne suis point avisée sur cela" ; et demanda terme de quinze jours pour répondre ; et après elle répondra. Item demanda délai pour répondre sur cela. Item dit : "Si la voix me l'a défendu, qu'en voulez-vous dire ?" Interrogée encore si cela lui fut défendu par la voix, répondit : "Croyez bien que ce ne sont pas les hommes qui me le défendirent." Item dit qu'aujourd'hui elle ne répondra pas et qu'elle ne sait si elle doit dire ou non tout ce qui lui a été révélé. Interrogée si elle croit que cela déplaise à Dieu que l'on dise la vérité, répondit à nous, évêque, que ses voix lui dirent qu'elle dit certaines choses au roi, et non à nous. Interrogée si son conseil lui a révélé qu'elle s'échapperait des prisons, répondit : "J'ai à vous le dire ?" Interrogée si, cette nuit-là, la voix ne lui donna point conseil sur ce qu'elle avait à répondre, répondit que, si la voix le lui a révélé, elle ne l'a pas bien comprise. Interrogée si, en ces deux derniers jours où elle entendit les voix, la lumière vint avec elles, répondit qu'au nom de la voix la clarté vint. Interrogée si, avec cette voix, elle voit quelque chose répondit : "Je ne vous dirai tout et n'ai congé de cela", et que son serment ne touche cela. Item dit que cette voix est belle, bonne et digne, et que sur ce qu'on lui demande elle n'est point tenue de répondre. Interrogée si la voix qui vient à elle a la vue, c'est assavoir des yeux (et aussi on lui avait demandé cela, car ladite Jeanne demanda à avoir en écrit les points sur lesquels elle ne répondait point) : à quoi elle répondit: "Vous ne l'aurez point encore". Item dit que le dicton des petits enfants est : "On pend bien quelquefois les gens pour avoir dit vérité."
  Item, le mardi après Reminiscere, le 27 février, requise par nous, évêque de Beauvais, de faire et de prêter serment sur ce qui touche le procès, répondit que, des choses qui toucheraient le procès, volontiers elle jurerait, mais non pas sur tout ce qu'elle saurait. Derechef nous l'avons requise que, sur tout ce qui lui serait demandé, elle répondit la vérité. Répondit comme devant, disant : "Vous devez vous en contenter ; j'ai assez juré." Item dit que, sur ce qu'elle aura congé par Notre Seigneur de révéler, volontiers elle dira la vérité ; mais de ce qui touche les révélations concernant son roi, elle ne le dira pas, sans congé de sa voix. Ce même jour, interrogée si saintes Catherine et Marguerite sont vêtues d'un même drap, répondit : "Je ne vous en dirai maintenant autre chose", et qu'elle n'a pas congé de le révéler ; et : "Si vous ne me croyez, allez à Poitiers !" Item dit qu'il y avait certaines révélations Tableau anonyme de Charles VIIqui vont à son roi, et non à ceux qui l'interrogent. Interrogée si lesdites saintes, qui lui apparaissent, sont du même âge, répondit que de dire cela elle n'a pas congé. Interrogée si elles parlent ensemble, ou l'une après l'autre, répondit qu'elle n'a pas congé de le dire ; et toutefois, chaque jour, elle a conseil de toutes les deux. Interrogée laquelle lui apparut la première, répondit : "Je ne les reconnais pas de sitôt" ; et parfois elle l'a bien su, mais elle l'a oublié; et, si elle en a congé, elle le dira volontiers ; et c'est au registre, à Poitiers. Interrogée de quelle figure était saint Michel qui lui apparut, répondit : "Sur cela, il n'y a pas encore de réponse pour vous ; et je n'ai pas encore congé de le dire." Interrogée sur ce que saint Michel lui dit, la première fois, répondit : "Vous n'aurez réponse sur cela, aujourd'hui." Item dit que ses voix lui dirent qu'elle répondit hardiment. Dit en outre qu'elle n'a pas encore congé de révéler ce que saint Michel lui a dit ; et voudrait bien que son interrogateur eût copie du livre qui est à Poitiers pourvu que ce soit le plaisir de Dieu. Interrogée si saint Michel et les autres saintes lui dirent qu'elle ne les révélât point, sans leur congé, répondit : "Encore ne vous en réponds point" et : Et sur quoi j'en aurai congé, volontiers vous répondrai" ; et que s'ils lui défendirent, elle ne l'a pas compris. Interrogée quel signe elle donne par quoi elle sache que c'est de par Notre Seigneur, et que soient saintes Catherine et Marguerite, répondit : "Je vous l'ai assez dit que ce sont saintes Catherine et Marguerite" ; et : "Croyez-moi si vous le voulez !" Interrogée quelles révélations eut son roi, répondit : "Vous ne les aurez pas de moi cette année !".
  Item le jeudi 1er mars, interrogée quelles promesses ses saintes lui firent, répondit : "Ce n'est pas du tout de votre procès !" Interrogées si elles lui promirent autre chose que de la conduire en paradis, répondit qu'il y eut d'autres promesses, mais ne les dira pas ; et dit que cela ne concerne pas le procès. Item dit qu'avant trois mois elle dira autre promesse. Interrogée si lesdites saintes lui dirent qu'avant trois mois elle serait délivrée de prison, répondit : "Ce n'est pas de votre procès !" Cependant elle ne sait quand sera délivrée. Item dit que ceux qui la veulent ôter de ce monde pourraient bien s'en aller avant. Item interrogée si son conseil ne lui a point dit qu'elle serait délivrée de geôle, répondit : "Avant trois mois, reparlez-m'en, et je vous répondrai !" Et dit en outre qu'on demandât aux assesseurs, sous leur serment, si cela touchait le procès. Et ensuite la délibération des assesseurs, qui tous conclurent que cela concernait le procès, elle dit : "Moi, je vous ai toujours bien dit que vous ne sauriez tout" ; et elle ajouta : "Il faudra, une fois, que je sois expédiée ; et veux avoir congé de le dire" ; et sur ce requit délai. Interrogée si les saintes lui défendirent de dire la vérité, répondit : "Voulez-vous que je vous dise ce qui va au roi de France ?" Item dit qu'il y a bien des choses qui ne touchent le procès. Item, ce même jeudi 1er mars, interrogée quel signe elle donna à son roi qu'elle venait de par Dieu, répondit : "Je vous ai toujours répondu que vous ne le tireriez pas encore de ma bouche. Allez lui demander !" Interrogée si elle a juré de ne pas révéler ce qui lui serait demandé touchant le procès, répondit : "Je vous ai dit ailleurs que ce qui va à notre roi, je ne vous le dirai pas." Interrogée si elle ne sait point ledit signe, répondit : "Vous ne le saurez de moi." Item lui fut dit que cela touchait le procès ; elle répondit : "De ce que j'ai promis de tenir bien secret, je ne le vous dirai." Et dit en outre : "je l'ai promis en tel lieu que je ne puis vous le dire sans me parjurer." Interrogée à qui elle l'a promis, répondit qu'elle l'a promis aux saintes Catherine et Marguerite ; et ce fut montré à son roi. Item dit qu'elle leur a promis sans qu'elles la requérissent ; et ce fit ladite Jeanne de son propre gré ; et dit que trop de gens lui eussent demandé son signe, si aux saintes elle n'eût fait promesse. Interrogée si, en sa compagnie, quand elle montra le signe à son roi, il y avait autre personne que lui, répondit : "Je pense qu'il n'y avait autre personne que lui, bien que, assez près, fussent beaucoup de gens." Interrogée si elle a vu la couronne sur la tête de son roi, quand elle lui montra le signe, répondit : "Je ne puis vous le dire sans me parjurer."
  Item, interrogée le samedi 3 mars, si elle croit que dans les mode et forme où Dieu créa dès le principe [saint Michel et Gabriel], elle les vit, répondit : "Vous n'aurez autre chose pour le présent, fors ce que je vous ai répondu." Interrogée si elle avait vu ou su par révélation qu'elle s'échapperait, répondit : "Cela ne touche votre procès. Voulez-vous que je parle contre contre moi ?" Interrogée si les voix lui en dirent quelque chose, répondit : "Cela ne touche votre procès ; je m'en rapporte à Messire ; et, si tout vous concernait, je vous dirais tout." Et dit en outre : "Par ma foi je sais l'heure ni le jour." Interrogée si, quand Dieu lui révéla qu'elle changeât son habit, ce fut par la voix de saint Michel, de sainte Catherine ou de sainte Marguerite, répondit : "Vous n'en aurez maintenant autre chose."
  Interrogée, le lundi 12 mars, si elle n'eut point de lettres de saint Michel et de ses voix, répondit : "Je n'ai point congé de vous le dire et, d'ici à huit jours, j'en répondrai volontiers ce que je saurai".]



Article 61. "Item ladite Jeanne, admonestée de soumettre tous ses dits et faits à la détermination de l'Église militante et avertie de la distinction entre l'Église militante et l'Église triomphante, a dit se soumettre à l'Église triomphante, refusant de se soumettre à la militante, déclarant ainsi sa mauvaise opinion au sujet de l'article : Unam Sanctam etc..., et se montra là-dessus dans l'erreur. Elle a dit qu'elle était à Dieu, sans intermédiaire, s'en référant de ses faits, à lui et à ses saints, et non pas au jugement de l'Eglise."

- A ce soixante-et-unième article, Jeanne répond qu'à l'Église militante elle voudrait porter honneur et révérence, de tout son pouvoir. Quant à s'en rapporter de ses faits à l'Église militante, dit : "Il faut que je m'en rapporte à Notre Seigneur qui me l'a fait faire."
  Interrogée si elle s'en rapporte à l'Église militante, quant à ce qu'elle a fait, répond : "Envoyez-moi le clerc, samedi prochain, et je vous répondrai".

  Interroguee si elle se vouldroit submetre a l'Eglise militant, respond qu'elle luy vouldroit porter reverence de son povoir.
  Et de se rapporter de ses faicts a l'Église militant, dit : Il fault que je l'en rapporte a Nostre Seigneur, qui le m'a fait faire.
  Interroguee si elle se rapportera a l'Eglise militante, quand a ce qu'elle a faict, respond : Envoyez moy le clerc samedy prochain, et je vous en respondray.


  [Or, ce jeudi 15 mars, il lui fut déclaré ce que c'était que l'Église triomphante et l'Église militante ; et requise présentement qu'elle se soumît à la détermination de l'Église, en ce qu'elle a fait ou dit, soit bien ou mal, répondit : "je ne vous répondrai autre chose pour le présent." Et après les admonestations et réquisitions qui lui ont été faites, assavoir que si elle a fait quelque chose contre notre foi, elle doit s'en remettre à la détermination de l'Église, répondit que ses réponses soient vues et examinées par les clercs, et après qu'on lui dise s'il a quelque chose contre la foi chrétienne, et
qu'elle saura bien dire ce qu'elle en trouvera par son conseil ; et toutefois, s'il y a quelque chose de mal contre la foi chrétienne que notre Sire commanda, elle ne voudrait le soutenir; et qu'elle serait bien courroucée de venir et d'aller à l'encontre. Item, ce même jour, interrogée si, sur ce qu'elle a dit et fait, elle veut se soumettre et s'en rapporter à la détermination de l'Église, répondit : "Toutes mes œuvres et tous mes faits sont en la main de Dieu, et m'en attends à lui. Et vous certifie que je ne voudrais rien faire ou dire contre la foi chrétienne ; et si j'avais rien dit ou fait, ou qu'il fût sur moi
quelque chose que les clercs sussent dire qui fût contre la foi chrétienne que Notre Seigneur a établie, je ne le voudrais soutenir, mais le bouterais hors". En outre interrogée si, en cela, elle ne voulait point se soumettre à la détermination de l'Eglise, répondit : "Je ne vous en répondrai maintenant autre chose ; mais samedi envoyez-moi le clerc, si ne voulez venir, et je lui répondrai sur ce, à l'aide de Dieu, et sera mis en écrit."
  Item, le samedi 17 mars, interrogée s'il ne lui semble pas qu'elle soit tenue de répondre pleinement la vérité à notre Saint-Père le pape, vicaire de Dieu, sur tout ce qu'on lui demanderait touchant la foi et le fait de sa conscience, répondit qu'elle requiert qu'elle soit menée devant lui, et puis répondra devant lui tout ce qu'elle devra répondre.
  Item, le samedi 31 mars (5), interrogée si elle veut s'en rapporter au jugement de l'Eglise qui est sur la terre, de tout ce qu'elle a dit et fait, soit bien ou mal, spécialement des cas, crimes et délits qu'on lui impose, et de tout ce qui touche son procès, répond que, sur ce qu'on lui demande, elle s'en rapporte à l'Église militante, pourvu qu'elle ne lui commande chose impossible à faire ; et entend que ce qu'elle répute impossible, c'est que les faits qu'elle a dits et faits, déclarés au procès, sur les visions et révélations qu'elle a dit avoir faites de par Dieu, elle les révoque et ne les révoquera pour rien au monde. Et, de ce que notre Sire lui a fait faire et commandé, elle ne laissera de le faire, pour homme qui vive ; et lui serait impossible de le révoquer. Et au cas où l'Eglise lui voudrait faire faire autre chose, contraire au commandement qu'elle dit que Dieu lui a fait, elle ne le ferait pour quelque cause. Interrogée, si l'Église militante lui disait que ses révélations sont illusions ou choses diaboliques, ou superstitions, ou mauvaises choses, elle s'en rapporterait à l'Eglise, répondit qu'elle s'en rapportera à Notre Seigneur, dont elle fera toujours le commandement ; et qu'elle sait bien que ce qui est contenu en son procès est arrivé par le commandement de Dieu ; et que, ce qu'elle a affirmé audit procès avoir fait du commandement de Dieu, il lui serait impossible de faire le contraire ; et au cas où l'Église militante lui commanderait de faire le contraire, elle ne s'en rapporterait à personne au monde, fors à Notre Seigneur, qu'elle ne fit toujours son bon commandement. Interrogée si elle croit qu'elle soit sujette à l'Église qui est sur la terre, c'est à savoir, à notre Saint-Père le pape, aux cardinaux, archevêques, évêques et autres prélats d'Église, répondit que oui, notre Sire premier servi. Interrogée si elle a commandement de ses voix de ne point se soumettre à l'Église militante qui est sur la terre, ni à son jugement, répondit qu'elle ne répond chose qu'elle ne prenne en sa tête ; mais ce qu'elle répond, c'est du commandement de ses voix ; et elles ne commandent point qu'elle n'obéisse à l'Eglise, notre Sire premier servi.
  Item mercredi 18 avril, il fut dit à ladite Jeanne que, pour la maladie qu'elle disait avoir, plus elle avait de craintes pour sa vie, plus elle devait l'amender, et qu'elle n'aurait pas les droits de l'Église comme catholique, si elle ne se soumettait à l'Église. Elle répondit : "Si le corps meurt en prison, je m'attends que le fassiez mettre en terre sainte (6); et, si vous ne le faites mettre, je m'en attends à Notre Seigneur." Item, ce même jour, interrogée, puisqu'elle que requiert que l'Église lui baille son créateur, si elle voudrait se soumettre à l'Église, si on lui promettait de le lui bailler, répondit que de cette soumission elle ne répondra autrement qu'elle n'a fait ; et qu'elle aime Dieu, le sert, et qu'elle est bonne chrétienne, et voudrait aider et soutenir [sainte] Église de tout son pouvoir.]



Article 62. "Item ladite Jeanne s'efforce de scandaliser le peuple, de l'induire à croire fermement à tous ses dits et prédictions, assumant en elle l' autorité de Dieu et de ses anges, s'érigeant au-dessus de toute puissance ecclésiastique pour mettre les hommes dans l'erreur. Ainsi les faux prophètes ont accoutumé de faire lorsqu'ils introduisent des sectes d'erreur et de perdition et qu'ils se séparent de l'unité du corps de l'Église : ce qui est pernicieux pour la religion chrétienne. Et si les prélats de l'Église n'y pourvoient, il pourra s'ensuivre subversion de toute l'autorité de l'Église ; de toutes parts s'insurgeront hommes et femmes, feignant d'avoir révélations de Dieu et les anges, semant mensonges et erreurs, comme on l'a expérimenté tant de fois depuis que cette femme s'est levée et commença de scandaliser le peuple chrétien et de proposer ses impostures. (7)"- A ce soixante-deuxième article, ce mercredi 28 mars, ladite Jeanne répond que samedi elle vous répondra.

  Respond que samedi elle en respondra.
  Respond : Je m'en raporte ad ce que j'en ay dit.
  Et de la charge et conclusion de l'article, s'en raporte a nostre Sire. (9)



Article 63. "Item ladite Jeanne n'a pas craint de mentir devant la justice, en violation de son propre serment, et elle affirma tour à tour, touchant ses révélations, bien des choses contraires et contradictoires ; elle a proféré des malédictions contre des seigneurs et des personnes notables, contre une nation entière ; elle a sans vergogne, prononcé truferies et paroles dérisoires qui ne conviennent nullement à une femme sainte et montrent assez qu'elles ont été régie et gouvernée dans ses actes par de malins esprits, et non pas par le conseil de Dieu et de ses anges, comme elle s'en vante. Or le Christ a dit des faux prophétes : "A leurs fruits vous les reconnaitrez".

- A ce soixante-troisième article, ce dit jour, Jeanne répond : "Je m'en rapporte à ce que j'en ai dit" ; et de la charge et conclusion de l'article, elle s'en rapporte à notre Sire.

  Respond : Je vous en ay respondu, a quoy je m'en raporte.
  Et de la charge et conclusion, s'en raporte a nostre sire. (9)


  [Or, le mardi 27 février, dit qu'elle avait cette épée à Lagny, et depuis Lagny jusqu'à Compiègne porta l'épée d'un Bourguignon qui était bonne épée de guerre, et bonne à donner de bonnes buffes et de bons torchons. Et dit que, où elle a perdu l'autre épée, cela n'est pas du procès, et lors n'en répondra pas.
  Item, le jeudi 1er mars, dit que serait morte, n'était la révélation qui la réconforte chaque jour. Interrogée si saint Michel avait des cheveux, répondit : "Pourquoi les lui aurait-on coupés" elle ne vit pas saint Michel, depuis qu'elle a quitté Le Crotoy ; et ne le voit pas souvent. (8)]



Article 64.
"Item que ladite Jeanne se vante de savoir qu'elle a obtenu rémission du péché qu'elle a perpétré, d'un coeur désespéré, à l'instigation de l'esprit malin, en se précipitant du haut de la tour du château de Beaurevoir, alors que l'Écriture enseigne que nul ne sait s'il est digne ou d'amour ou de haine, et par conséquence s'il est purgé ou justifié de son péché."

- A ce soixante-quatrième article, ce jour de mercredi, 28 mars, répond : "Je vous en ai répondu ; à quoi je m'en rapporte" Et, de la charge et conclusion, s'en rapporte à notre Sire.

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Article 65. "Item, que la dite Jeanne, bien des fois, a dit qu'elle requérait Dieu qu'il lui envoyât expresse révélation pour sa conduite, au moyen des anges et des saintes Catherine et Marguerite, par exemple, si elle devait répondre la vérité en ce procès sur certaines questions et sur certains faits qui lui sont personnels. Voilà qui est tenter Dieu, requérir de lui ce qui ne doit être requis, sans nécessité, sans avoir fait la recherche ou investigation humainement possible. Principalement audit saut de la tour, il apparait manifestement qu'elle a tenté Dieu."

- A ce soixante-cinquième article, cedit jour de mercredi, Jeanne répond qu'elle en a répondu ; et qu'elle ne veut point révéler ce qui lui a été révélé, sans le congé de Notre Seigneur ; et qu'elle ne le requiert point sans nécessité, [comme il est dit en cet article] ; et qu'elle voudrait qu'il en envoyât encore plus, afin qu'on aperçut mieux qu'elle est venue de par Dieu, c'est assavoir qu'il l'a envoyée !

  Respond qu'elle en a respondu et qu'elle ne veult point reveler ce qui luy a esté revelé, sans le congié de nostre Seigneur, et qu'elle ne requiert point sans neccessité ; et qu'elle vouldroit qu'il en envoyast encore plus, affin que on apperceust mieulx qu'elle fust venue de par Dieu, c'est assavoir, qui l'eust envoyee. (9)


Article 66. "Item, certaines de ses prédictions sont divergentes des droits divin, évangélique, canonique et civil, contraire aux décisions approuvées par les conciles généraux ; il y a là sortilèges, divinations, superstitions ; certaines formellement, d'autres causativement et autrement, sentent l'hérésie ; bien des erreurs contre la foi induisent à perversité hérétique et la favorisent. Il y en a de séditieuses, de perturbatrices et faisant obstacle à la foi ; il y en a qui incitent à l'effusion du sang humain ; certaines aussi ne sont que malédictions et blasphèmes envers Dieu, les saints et les saintes ; d'autres encore offensantes pour les oreilles des hommes pieux. Sur tout cela ladite accusée, par une téméraire audace, à l'instigation du Diable, offensa Dieu et sa sainte Eglise ; envers elle, elle a commis excès et délit, s'est montrée telle une scandaleuse ; et, de tout cela, notoirement diffamée, cette accusée a comparu devant vous pour être corrigée et amendée."

- Au soixante-sixième article, ladite Jeanne répond qu'elle est bonne chrétienne ; et de toutes les charges mises en cet article, elle s'en rapporte à Notre Seigneur.

  Interroguee de la foy, dit qu'elle est bonne chrestienne.
  Et de toutes les charges mises en cest article, dit qu'elle n'a point faict les delitz proposez par le promoteur.



Article 67. "Item, toutes et chacune de ces choses, ladite accusée les a commises, perpétrées, dites, produites, proférées, dogmatisées, promulguées et accomplies, tant en ladite juridiction qu'ailleurs, en plusieurs et divers lieux du royaume,  non pas une fois, mais à plusieurs reprises, en divers temps, jours et heures ; elle y a récidivé et elle a prêté et apporté aide, conseil et faveur à ceux qui les ont perpétrées."

- Ce soixante-septième article, ladite Jeanne le nie.

  Le nie. (9)


Article 68. "Item, c'est pourquoi, dès que, par le bruit insinuant de la clameur qui frappa vos oreilles, non pas une fois mais plusieurs, par publique renommée et information faite en et sur ce, vous avez découvert que ladite accusée était véhémentement suspectée et diffamée, vous avez décrété qu'il y avait lieu de faire enquête sur elle, de procéder par vous ou l'un de vous à son sujet, qu'elle devait être citée et répondre sur ces points, ainsi qu'il a été fait."

- Sur ce soixante-huitième article, ladite jeanne répond "cet article concerne les juges."

  Concerne les juges. (9)


Article 69. "Item, ladite accusée, en et sur tout ce cède, fut et est véhémentement suspecte, scandaleuse au plus haut point, et notoirement diffamée, aux yeux des personnes honnêtes et sérieuses. De cela, pourtant, elle ne se corrigea en rien, et ne s'en est amendée par quelque moyen ; bien au contraire, elle a différé et diffère de s'en corriger et amender, s'en est récusée et récuse ; et elle a continué et persévéré dans ses erreurs, continue et persévère, bien que toutefois, tant de votre part que de celle d'autres notables, clercs et autres personnes honnêtes, elle en ait été sommée et requise, tant charitablement qu'autrement, dûment et suffisamment."

- Sur ce soixante-neuvième article, Jeanne dit que les délits proposés contre elle par le promoteur, elle ne les a pas faits ; et du surplus, elle s'en rapporte à Notre Seigneur ; et que de ces délits, proposés contre elle, elle ne croit avoir rien fait contre la foi chrétienne.
  Interrogée, si elle avait fait quelque chose contre la foi chrétienne, elle voudrait se soumettre à l'Église et à ceux à qui en appartient la correction, répond que samedi, après dîner, elle en répondra.

  Dit que les deliz proposés par le promoteur contre elle, elle ne les a pas fais; et du sourplus s'en raporte a nostre Seigneur; et que d'iceulx deliz proposés contre elle, n'en cuide avoir rien fait contre la foy chrestienne. (9)
  Interroguee, se elle avoit faict aulcune chose contre la foy chrestienne, se elle s'en vouldroit rapporter a l'Eglise at aux ceulx ausquelz en appartient la correction, respond que, sabmedy, apprez disner, elle en respondra.


Article 70. "Item, que toutes et chacune de ces propositions sont vraies, notoires, manifestes, et que sur elles se sont exercées et s'exercent encore la voix publique et la renommée ; ladite accusée les a reconnues et confessées, plusieurs fois et suffisamment, comme vraies, devant des gens probes et dignes de foi, tant en jugement qu'ailleurs".

- A ce soixante-dixième article, Jeanne le nie, hors ce qu'elle a confessé.

  Le nie hormis ce qu'elle a confessé. (9)

                                                      *
                                                 *        *

   " De ces points et d'autres que vous supplérez, corrigerez et réformerez au mieux, pour et sur lesquels le demandeur sollicite et supplie que l'accusée soit par vous interrogée, ledit demandeur conclut que, ces points ayant été établis en tout ou en partie, autant qu'il suffira pour [justifier] la demande, vous rendiez, profériez et prononciez votre sentence contre ladite accusée pour toutes et chacune des fins qu'il a ci-dessus indiquées, et qu'en outre vous disiez et jugiez selon qu'il sera de droit et de raison. Sur cela, comme il convient, il implore humblement votre office (10)."

                                      


Sources : traduction de Pierre Champion (1921) et E.O'Reilly (1868).

Notes :
1 Incident mentionné par la minute française mais non reporté dans le procès officiel.

2 Jeanne a bien dit :"mille millions"...

3 Les archives ne possèdent plus ces documents et l'on ignore à quoi d'Estivet faisait allusion.

4 Cette accusation, qui n'a pas de fondement, a été rapportée par un clerc parisien qui répondait à Gerson en 1429 : "de plus à ce que l'on rapporte, elle semble user de sortilège. Ainsi par exemple, lorsque les enfants dont il a été parlé (ceux des villes de l'obédience du Dauphin) lui offraient, avec la vénération que j'ai dites, les cierges en question, elle faisait tomber sur leur tête trois gouttes de cire ardente en pronostiquant qu'à cause de la vertu d'un tel acte ils ne pouvaient être que bons. Donc idolâtrie dans le fait de l'offrande, et, dans le fait de laisser égoutter cette cire, sorilège compliqué d'hérésie..." Noël Valois - "un nouveau témoignage sur Jeanne d'Arc", 1907.
On voit sur quels genres de sources et de ragots d'Estivet bâtissait son instruction ! (ndlr)

5 ndlr : A noter que ces "justifications" sont d'une date postérieure à la lecture faite à Jeanne d'Arc le 28 mars ! (Extraits du 31 mars et du 18 avril rapportés au réquisitoire après la lecture à Jeanne)

6 ndlr : "en terre sainte" c'est à dire au cimetière catholique.

7 ndlr : Les articles 62 et 64 à 70 ont un style très différent et beaucoup plus "savant" par rapport aux précédents, de plus ils ne sont pas justifiés comme d'Estivet l'a fait pour la plupart des autres articles. On sent la "patte" des théologiens parisiens. De Courcelles en est sûrement l'auteur.

8 ndlr : On cherche vainement les "contradictions" dans cette justification de d'Estivet !

9 Minute du ms de d'Urfé.

10 La conclusio salutaris accumule les formules supplétoires pour le cas où des omissions auraient été commises dans le libelle : pour réserver le droit d'ajouter et modifier selon qu'il sera opportun, enfin pour affirmer qu'on n'aura à prouver les faits que dans la mesure nécessaire à établir le bien-fondé de la demande. (Tisset)
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